Nous sommes exceptionnellement rassemblés aujourd'hui pour examiner les conclusions d'un rapport conjoint de contrôle sur le financement de l'audiovisuel public. Ce rapport arrive à point nommé après que le Président de la République a annoncé pendant la campagne électorale son intention de supprimer la contribution à l'audiovisuel public au nom de la défense du pouvoir d'achat.
Une réforme de la CAP était certes nécessaire, le Sénat l'a dit régulièrement depuis 2015, notamment par le biais du rapport de nos collègues Jean-Pierre Leleux et André Gattolin. L'évolution des usages a, en effet, tendance à réduire la possession de téléviseurs qui sert de base au paiement de la CAP. La suppression complète de la taxe d'habitation en 2023 condamnait cette ressource et nécessitait d'en trouver une autre. Je rappelle que le Sénat avait fait part de sa préférence pour la création d'une taxe universelle sur le modèle allemand. Cette taxe aurait permis d'assurer la prévisibilité des ressources dans la durée et d'éviter les ajustements intempestifs. Par ailleurs, il me semble que le fait de devoir payer pour bénéficier d'un service ne constitue pas un mauvais principe tant on peut considérer que « ce qui n'a pas de prix n'a pas de valeur ». En supprimant la CAP, c'est le lien entre les Français et l'audiovisuel public qui risque de s'affaiblir.
Nous prenons acte de la décision du Président de la République, qui a fait de la suppression de la CAP un engagement devant les Français. Cette suppression aura lieu dans la prochaine loi de finances rectificative (LFR) et l'enjeu est moins de savoir si nous y sommes ou non favorables que de déterminer les garanties qui pourront entourer la nouvelle ressource publique appelée à financer l'audiovisuel public.
Mais au-delà de la nature et du montant de cette ressource, nous pensons également que la question des missions et de l'organisation du service public de l'audiovisuel doit être à nouveau posée : quels moyens pour quelles missions ?
Face à la révolution numérique en cours dans le secteur des médias, à la « plateformisation » et aux rapprochements engagés entre les médias privés, c'est l'avenir de l'audiovisuel public qui est en jeu. Ses programmes doivent rester attractifs et accessibles.
Pour différentes raisons, la réforme de l'audiovisuel public n'a pu aboutir lors du précédent quinquennat, alors même que le projet de loi Riester promettait des avancées importantes. Le temps perdu ne se rattrape pas, le retard de l'audiovisuel public ne s'est pas réduit au cours des dernières années, bien au contraire. Si Radio France et Arte ont fait preuve d'initiatives pertinentes dans le numérique, on ne saurait en dire autant de France Télévisions avec Salto. Par ailleurs, les mutualisations menées « par le bas » ont très vite trouvé leurs limites. Comme l'ont indiqué plusieurs de nos interlocuteurs, il est difficile pour l'État d'arbitrer lorsque les entreprises n'ont pas envie de travailler ensemble.
C'est la raison pour laquelle nous considérons que la question de la réforme de la gouvernance de l'audiovisuel public constitue un aspect incontournable de son avenir et des moyens qui lui seront consacrés. Alors que le regroupement de l'audiovisuel public semblait utopique en 2015 lorsque le Sénat a proposé la création d'un holding public, il est aujourd'hui considéré comme inéluctable par la plupart des acteurs. Nous proposerons d'avancer dans cette direction de manière plus déterminée, car il n'est plus temps de tergiverser.
Je laisse la parole à Roger Karoutchi pour présenter les aspects budgétaires et financiers de nos conclusions.