Je ne dis pas que les choses sont parfaites, mais j'aimerais quand même que de temps en temps on rappelle ce que sont les réalités historiques. Je sais, monsieur le sénateur Assouline, combien vous êtes attaché à l'histoire.
En ce qui concerne les BRAV, j'entends souvent qu'elles ne seraient pas des unités spécialisées à l'égal des CRS et des escadrons de gendarmes mobiles, mais c'est faux. Les BRAV sont des unités spécialisées, peut-être plus entraînées que celles que je viens de citer - je dis « peut-être » parce que je ne veux froisser personne -, mais d'un haut niveau de technicité propre à la préfecture de police. Ce n'est pas une invention de ma part ; j'ai simplement inventé l'acronyme et le modus operandi. Ces effectifs dits « des compagnies d'intervention » existent à la préfecture de police depuis la nuit des temps, sous la forme d'unités de forces mobiles spécialisées de la préfecture de police, pour des raisons qui tiennent à l'histoire, comme je le rappelais précédemment, et à ce qu'est la région capitale.
Les BRAV sont spécialisées dans l'intervention en matière d'ordre public. Il n'est donc pas surprenant que lorsque nous avons eu besoin de réserves, nous les ayons fait intervenir. C'était parfaitement justifié, car ce sont des unités d'élite. D'ailleurs, je suis à la disposition de vos commissions, messieurs les présidents, si vous voulez assister à un entraînement des compagnies d'intervention.
Plus que d'une méconnaissance du dispositif de police - car ce n'est pas forcément la spécialité absolue des uns et des autres -, la confusion vient de l'appellation. En province - ceux qui sont élus d'une région autre que l'Île-de-France le savent bien -, sont désignées comme « compagnies d'intervention » les unités de sécurité publique qui se forment pour des opérations d'ordre public. Toutefois, cette appellation similaire ne remet pas en cause le fait que la technicité et l'expérience restent très fortes dans les unités constituées.
En ce qui concerne la vente d'alcool à la sauvette, nous avons effectivement recensé beaucoup de cas. Neuf personnes ont été interpellées. Mais il est assez difficile d'interpeller des vendeurs à la sauvette en raison de leur extrême mobilité. D'ailleurs, en ce moment, je suis en train d'expérimenter les interpellations de vendeurs à la sauvette sur le Champ-de-Mars - ventes de boissons, de souvenirs, de maillots de supporters, etc.
Encore une fois, il était absolument nécessaire de les interpeller, mais dans la hiérarchie des incidents, ce qui nous a préoccupés au niveau des interpellations, c'est d'abord les agressions et les violences aux personnes. C'était ça l'absolue priorité.
Quid ensuite des comparutions immédiates ? Comme je l'ai souligné tout à l'heure, il va falloir voir tout cela avec les parquets concernés. Mais très souvent, ce que l'on observe dans des mouvements de foule de cette nature, c'est que l'on ne peut pas reprocher à la justice de ne pas déférer les personnes en comparution immédiate : le problème que nous avons, c'est la rédaction des procès-verbaux d'interpellation. Quand vous êtes dans un moment de cette nature, c'est-à-dire d'une intensité policière extrêmement forte, il faut rédiger le PV d'interpellation de la personne. En situation d'urgence, tout cela est souvent mal fait. Ce n'est pas un reproche que j'adresse aux hommes et aux femmes sous mon commandement, mais c'est une réalité d'expérience. Très franchement, ils ont vraiment autre chose à faire. Or, quand les PV sont mal rédigés, les magistrats, à juste titre, nous disent que cela ne tient pas debout. C'est un problème que nous rencontrons lors les manifestations depuis 2015, c'est-à-dire depuis que la nature des manifestations a changé - vous voyez, c'était avant mon arrivée, tout n'est pas dû à ma présence à la préfecture de police !
Bref, nous avons du mal à documenter précisément les conditions d'une interpellation et à formuler l'infraction ou le délit commis. Nous avons expérimenté plusieurs méthodes, qui n'ont pas été déployées au Stade de France, notamment en missionnant des agents spécialisés en appui des éléments d'intervention ; il s'agit, en quelque sorte, de greffiers du dispositif. Leur mission est d'aider très rapidement le fonctionnaire à rédiger son PV d'interpellation. Mais pour les raisons que j'ai évoquées tout à l'heure, ces agents n'ont pas été déployés ce soir-là et, assez vraisemblablement, nos PV n'étaient pas totalement bien rédigés.
Je ne reviendrai pas sur les explications concernant la présence de 30 000 à 40 000 supporters. J'espère néanmoins, même si j'ai bien compris que je n'avais pas convaincu tout le monde, avoir été clair.