Comme l'ont dit mes collègues, ces événements sont regrettables. Nous avons préparé du mieux que nous le pouvions, dans les trois mois qui nous étaient impartis, la finale du 28 mai. Nous avons mené de très nombreuses réunions avec le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, avec M. Cadot et ses équipes de la délégation interministérielle aux grands événements sportifs (Diges), le préfet de police de Paris, le préfet du département de Seine-Saint-Denis et l'ensemble des acteurs.
Il faut en tirer les enseignements et se demander comment, collectivement, nous pouvons progresser, dans la perspective de la Coupe du monde de rugby et des jeux Olympiques, pour faire en sorte que de tels événements ne se reproduisent pas et pour organiser au mieux l'accueil des spectateurs.
Notre première recommandation est en lien avec le plan de mobilité. Nous insistons sur la nécessité de le définir conjointement et d'avoir, au sujet des flux de personnes qui viennent au Stade de France, une communication en temps réel entre l'organisateur que nous sommes, la préfecture de police et les opérateurs de transports publics.
Dans le cas de la finale de la Ligue des champions, la FFF a organisé, en lien avec l'UEFA, un plan de mobilité relatif au dispositif d'accueil et d'orientation. Cela signifie que nous avons pris en compte l'acheminement de l'ensemble des spectateurs en provenance des deux clubs finalistes dès le moment où ils posaient le pied sur le sol français jusqu'aux différents lieux où ils pouvaient être amenés à se retrouver. Pour les autocars, nous avons défini, avec l'aide du Stade de France, de la ville de Saint-Denis et de Plaine Commune, un dispositif d'accueil pour séparer les supporteurs. Schématiquement, la partie nord du Stade de France était dédiée à ceux du Real Madrid, la partie sud à ceux de Liverpool et aux personnes invitées par l'UEFA et les différents partenaires de la compétition. Nous avons travaillé sur ce plan pendant trois mois, sous l'égide de la préfecture de Seine-Saint-Denis, qui nous a fortement accompagnés pour le mettre en oeuvre. Une fois ce plan élaboré, nous avons défini l'accueil et l'orientation des personnes qui venaient par les aéroports, principalement Beauvais, Charles-de-Gaulle et Orly.
Dans le cas des supporteurs de Liverpool, nous avions trois typologies. « Je suis supporteur de Liverpool, avec un billet, je veux me rendre au Stade de France » était l'une d'entre elles. Dans ce cas, dès l'arrivée dans un aéroport ou dans une gare, un plan d'acheminement était défini, car nous avons contractualisé, avec les différents opérateurs, Aéroports de Paris, l'aéroport de Beauvais, la RATP et la SNCF, un dispositif d'accueil et d'orientation. Nous sommes allés jusqu'à proposer des plans pour arriver à destination, toujours avec la contrainte très forte consistant à différencier les flux et à faire en sorte que les supporteurs de Liverpool ne croisent jamais les supporteurs de Madrid. Nous avons également pris en considération la capacité d'emport du RER B par rapport au RER D, la taille des flux et des couloirs de palpation pour inciter les supporteurs à s'orienter majoritairement vers le RER B. Nous avons travaillé avec la RATP et la SNCF pour les orienter en diffusant des annonces dans les stations, en anglais et en français.
Autre typologie : « Je suis supporteur de Liverpool, je n'ai pas de billet, mais je veux me rendre dans la fan zone ». Quel que soit votre emplacement dans Paris, vous aviez des informations pour vous y rendre. De même, pour le Real Madrid, nous avons fait en sorte d'avoir un maillage dans la plupart des stations, dans Paris, que ce soit à travers des messages sonores, des hôtes et hôtesses ou des plans.
J'insiste sur la communication en temps réel. À partir du moment où a été prise la décision de réorienter les flux, nous aurions dû avoir l'information pour pouvoir faire preuve de souplesse ; par « nous », j'entends le Stade de France, la FFF pour l'accueil des spectateurs, la préfecture de police, mais également la RATP et la SNCF pour l'orientation. Si nous avions eu l'information, en milieu d'après-midi, que le flux du RER B était poussé vers le RER D, nous aurions pu avoir le temps de repenser notre dispositif. Avec l'accord de la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC), nous aurions pu faire évoluer le positionnement des forces mobiles et repenser notre dispositif d'accueil au niveau des couloirs de palpation.
Voilà pour nous l'enseignement important : nous avons beau construire des dispositifs pour accueillir et acheminer les spectateurs dans les meilleures conditions, si certaines personnes prennent des décisions sans en référer aux autres acteurs concernés, cela ne fonctionne pas.