rapporteure. – En matière de communication d’abord, nous avons assisté à une prise en main du politique sur la communication publique, mais aussi à des moments de grande ambiguïté, quand, sur la partie médicale, ce fut le ministre – et néanmoins médecin – qui s’exprimait. Il en est résulté une confusion, voire une collusion, entre la dimension médicale et scientifique d’un côté, la communication politique de l’autre. Si l’on ajoute à cela les débordements sur les réseaux sociaux et les joutes de plateau entre scientifiques de qualité diverse, sûrs de leurs certitudes avant d’être démentis quinze jours plus tard par la réalité médicale, on peut dire que la parole publique a totalement manqué de cohérence.
Finalement, ce sont surtout le directeur général de la santé (DGS), le ministre et le Président de la République, au travers de son conseil de défense sanitaire, qui ont communiqué de manière ponctuelle. Dans le même temps, des institutions qui pourtant ont fait leurs preuves ou, du moins, ont tiré les conséquences de moments difficiles – notamment l’ANSM après l’affaire du Mediator – sont restées relativement silencieuses. Alors qu’elles revendiquent leur indépendance et qu’elles ont été créées pour cela, elles n’ont pas été chargées d’exprimer la parole scientifique.
La multiplication des intervenants et de comités ad hoc – professeur Delfraissy, professeur Fischer, élus, DGS, scientifiques, médecins – n’a pas permis d’identifier un corpus de communication chargé de la partie médicale et scientifique. Il était dès lors difficile de s’y retrouver dans cet afflux de communications, dont on ignorait si elles reposaient sur des bases scientifiques ou, au contraire, sur du sable, voire sur des motivations malveillantes...
La leçon à tirer de tout cela est que nous disposons en France, avec la HAS et l’ANSM, d’instances compétentes sur lesquelles nous appuyer pour communiquer. Qu’un ministre de la santé soit médecin n’est pas un problème, mais il faut séparer la parole médicale de la parole politique.
Par ailleurs, si la communication en faveur de la vaccination a été très active, celle consacrée aux modalités concrètes de déclaration et aux effets secondaires a été très modeste voire, par moments, inexistante. Elle ressemblait parfois à de la transparence jetée dans un océan d’incertitudes.
De nombreuses personnes ont témoigné de leurs difficultés à déclarer leur arrêt de travail ou exprimé le sentiment de ne pas avoir été reconnues. Comprendre la souffrance, l’entendre ou encore accompagner la déclaration ne revient pas à reconnaître l’imputabilité. En revanche, ne pas le faire est une faute. Dans la situation que nous avons traversée, les gens avaient besoin d’être accompagnés, et nous avons entendu, au-delà des revendications, beaucoup de souffrance.
J’en viens à présent aux données de santé. En réalité, le système national des données de santé (SNDS) qui regroupe les données issues de la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM), des hospitalisations et des mutuelles, ne recouvre pas l’ensemble des données. Les troubles menstruels par exemple, ne donnent pas nécessairement lieu ni à hospitalisation ni à déclaration ni à prise en charge sanitaire ni à consultation gynécologique. Ils font partie de ces nombreux symptômes et syndromes qui n’apparaissent pas dans les données pharmaco-épidémiologiques.
En revanche, les événements rares, mais détectables, sont clairement identifiables par ce système robuste et efficace. Cela a été le cas pour les myocardites Il faut que le groupement d’intérêt scientifique Epi-Phare soit capable de procéder à une revue complète des données de santé afin d’observer les phénomènes émergents.
Les troubles menstruels concernent aujourd’hui tellement de personnes que le fait de ne pas les reconnaître revient à agiter un chiffon rouge alertant sur le fait qu’on ne dit pas tout. Nous devons renforcer les moyens de la pharmacovigilance et libérer la parole sur les effets indésirables. Naturellement, il ne s’agit pas de lancer des informations au grand public sans anticiper les politiques publiques nécessaires, ni de compromettre la politique de santé publique. Tout doit être coordonné, mais la pharmacovigilance doit prendre la parole sur ces sujets, au même titre que les autres intervenants.