Intervention de Florence Lassarade

Commission des affaires sociales — Réunion du 21 juin 2022 à 15h05
Effets indésirables des vaccins contre la covid-19 et système de pharmacovigilance français – présentation du rapport fait au nom de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo de Florence LassaradeFlorence Lassarade :

rapporteure. – Laurence Cohen faisait le parallèle entre transparence et inquiétude. L’époque est révolue où il suffisait d’appeler à la vaccination pour que les gens vaccinent leurs enfants. Aujourd’hui, moins on en dit, plus cela se sent et plus la confiance disparaît. Dans le rapport sur l’hésitation vaccinale que nous avions remis, en janvier 2018, avec Cédric Villani, nous avions bien mis en évidence ce phénomène.

Toute la question est de savoir qui prend en charge l’information. Avant que l’information ne soit diffusée dans les médias, il revient selon moi à la HAS de donner des préconisations claires.

Souvenons-nous que le scandale du Mediator a également jeté l’opprobre sur le système de pharmacovigilance, pas seulement sur les laboratoires eux-mêmes.

Concernant les laboratoires, il faut rappeler que développer un vaccin nécessite d’y mettre les moyens. C’est parce que la Biomedical Advanced Research and Development Authority (Barda) a mobilisé 10 milliards d’euros, ce que nous n’avons pas réussi à faire en Europe, qu’un vaccin a été obtenu.

Les techniques utilisées dans les vaccins contre la covid sont très différentes de celles des vaccins classiques. Elles n’utilisent pas d’adjuvants à base d’aluminium. Le rapport détaille ces « plateformes vaccinales » : les vaccins ARN sont portés par des nanoparticules-lipidiques, elles-mêmes composées de quatre lipides différents. De son côté, AstraZeneca utilise comme plateforme l’adénovirus, qu’on modifie en lui introduisant un gène destiné à fabriquer le spicule.

Il est donc possible d’expliquer que l’on recourt non plus à des adjuvants, mais à ces plateformes, qui semblent néanmoins être à l’origine des accidents vaccinaux que sont les phénomènes inflammatoires de type thrombose ou myocardite. Reste à en déterminer la cause exacte.

Corinne Imbert a souligné la fragilité de l’ANSM. Les différents centres de pharmacovigilance nous ont expliqué que, dans la période de crise, les rallonges budgétaires n’ont pas été à la hauteur du surplus d’activité. J’ai trouvé remarquable que la pharmacovigilance ait signalé les troubles menstruels à l’Agence européenne du médicament, laquelle a négligé dans un premier temps ce signalement, avant de finalement le reconsidérer.

Or nous considérons, en tant que rapporteures, qu’il y a là un véritable sujet, corroboré par les témoignages des associations « Où est mon cycle » et « Les navigants libres », que nous avons reçues. Certaines hôtesses de l’air ont été très ennuyées par des saignements et se sont vu retirer leur licence. Il est vrai qu’un gynécologue lambda ne verra pas une gravité extrême dans ce type d’effets secondaires et que ces derniers ne constituent pas nécessairement un motif de consultation. L’utérus étant une zone très inflammatoire, nous disposons de quelques pistes d’explication concernant les mécanismes à l’origine de ces effets, mais nous n’avons pas encore toutes les réponses.

Je vous rejoins sur la politique de communication : nous avons eu, dans un premier temps, une gestion de pénurie. Puis, alors que les vaccins devenaient excédentaires et que l’adhésion à la vaccination marquait le pas, on a voulu passer à la vaccination des enfants et des adolescents. Cela a été mal expliqué : on a invoqué la recherche d’une immunité collective qui n’est toujours pas arrivée. Nous prévoyons d’ailleurs de nous pencher, si nous poursuivons ce travail, sur la vaccination de l’enfant et sur les effets secondaires en fonction des tranches d’âge.

Concernant l’aspect territorial, nous ne disposons pas pour l’heure de chiffres spécifiques aux outre-mer. Assurément, le contexte social y est différent et la part de la non-adhésion à la vaccination due à une méfiance dans les institutions est peut-être plus importante que dans l’hexagone, mais nous y travaillerons.

En réponse à Pascale Gruny, qui évoquait les rappels mal supportés, il semblerait que si la deuxième dose est mal supportée, le rappel pourrait l’être encore moins. En revanche, le fait de bien supporter un vaccin lors des deux premières doses incite au contraire à poursuivre les vaccinations.

Les cas de covid long après vaccin que nous avons recensés seraient survenus, selon les explications scientifiques qui nous ont été données, sur de premières contaminations qui seraient passées inaperçues et que le vaccin aurait réactivées. Les personnes souffrant de covid long ont été incitées à se faire vacciner quand même. Or une première dose mal supportée aurait dû être un signal pour ne pas administrer la deuxième dose.

Avec le recul, j’ai acquis la conviction que c’est au médecin traitant de déterminer quel est le vaccin le mieux adapté à chaque patient. Son rôle est primordial. D’ailleurs, les médecins se sont bien prêtés à l’exercice de la déclaration : les plateformes ont reçu beaucoup plus de déclarations qu’en temps normal et les CRPV disent préférer de loin celles qui sont faites par des médecins à celles qui sont réalisées par des patients, lesquelles sont moins rigoureuses scientifiquement.

En ce qui concerne l’exploitation des données de santé, Epi-Phare a constitué un outil somme toute assez performant qui complète bien le dispositif de pharmacovigilance classique. Même si celle-ci a souffert du discrédit causé par l’affaire du Mediator, elle, qui a été pionnière dans les années 1980, reste l’un des systèmes les plus performants du monde.

Il serait inexact de dire que les pays européens ne se sont pas penchés sur les effets indésirables de la vaccination. Toutefois, nous aurions intérêt à comparer nos données avec les données américaines, israéliennes et australiennes, quand bien même la situation des États-Unis, qui se caractérise par une forte proportion d’obésité, est particulière. Cela explique peut-être que la vaccination des enfants de 6 mois à 5 ans y a déjà débuté.

Concernant enfin les myocardites, le rapport contient des chiffres assez précis page 43. Ainsi, à partir des données obtenues entre le 15 mai et le 31 octobre 2021, il a été déterminé que pour 100 000 secondes doses de vaccin Spikevax administrées, on constate un excès de 17 cas de myocardite chez les hommes de 18 à 24 ans. Un excès de risque a également été signalé chez les jeunes hommes âgés de 12 à 17 ans. Des morts subites ont pu survenir, car, jusqu’ici, on ne recherchait pas les signes d’alerte et on ne donnait pas de consignes particulières aux hommes vaccinés. On sait désormais détecter les myocardites, et cette population est aujourd’hui particulièrement surveillée.

Mme Pascale Gruny. – Au sein de la commission des affaires européennes, nous travaillons avec Laurence Harribey sur la question des médicaments. Il est difficile d’établir des comparaisons avec la Barda, dans la mesure où l’Union européenne n’exerce qu’une compétence d’appui en matière de santé. C’est déjà un exploit que d’avoir permis aux pays qui le souhaitaient de procéder à des commandes de vaccins groupées.

Par ailleurs, le règlement général sur la protection des données (RGPD) constitue un frein important en matière de recueil de données de santé.

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