rapporteur. – Tout repose sur la DSN, qui contient tous les renseignements. D’où l’intérêt du recalcul systématique, à partir de la fiche de paie, des cotisations déclarées « à la maille individuelle », comme le fait l’Agirc-Arrco. C’est particulièrement important dans le cas d’une retraite par points. L’Urssaf Caisse nationale, quant à elle, utilise traditionnellement les données agrégées, c’est-à-dire calculées à l’échelle de l’entreprise, à partir de la masse salariale. Ce mode de fonctionnement n’est pas neutre : : si une entreprise est redevable de 200 euros de cotisations pour 2 salariés dont la paie est identique, soit 100 euros pour chacun, et qu’elle verse 110 euros pour le premier et 90 pour le second, elle paye bel et bien la somme globale due, mais les données individuelles sont erronées. Dans le cadre d’un contrôle opéré à la maille agrégée, l’anomalie sera invisible, ce qui ne sera pas le cas à la maille individuelle. D’où l’importance de détecter ces potentielles anomalies, de sorte que les salariés bénéficient des prestations auxquelles ils ont droit, surtout dans un régime contributif par points comme le régime de retraite complémentaire des salariés du privé.
Monsieur Vanlerenberghe, vous disiez que l’Agirc-Arrco était défavorable à l’unification au moment de la réforme ; à présent, elle y est totalement opposée ! Elle ne veut pas en entendre parler tant que la répartition des compétences avec les Urssaf n’est pas clarifiée et que des garanties suffisantes ne sont pas apportées sur le plan de la fiabilisation des données individuelles. Un transfert à tout prix présente peu d’intérêt, mais des risques importants.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. – L’Urssaf sera-t-elle prête pour 2024 ?
rapporteur. – Nous suggérons de lui laisser le soin de faire la preuve de la qualité de ses dispositifs de fiabilisation des données individuelles, ce qui sera d’ailleurs utile pour le calcul d’autres prestations que la retraite complémentaire. Je vous renvoie aux préconisations que nous avons faites.
Si, au final, le degré de fiabilité que nous attendons n’est pas atteint, l’unification serait contre-productive. Il appartiendra à la Cour des comptes, par exemple, de donner son feu vert. Certes, l’Urssaf a engagé des expérimentations, mais trop récentes pour que nous disposions du recul suffisant. C’est pourquoi nous proposons ce délai supplémentaire.
Vous avez évoqué la fraude sociale. En effet, si les données transmises via la DSN ne sont pas fiables, on n’évitera pas les indus. A contrario, certaines personnes pourraient se voir priver de prestations diverses auxquelles elles ont droit. Ainsi, selon la CNAF, environ 2 % des DSN alimentant ses bases de données contiennent une anomalie, ce qui n’est pas acceptable, d’autant que les APL et la prime d’activité sont désormais calculées tous les trois mois, sur la base des revenus des douze derniers mois glissants. En l’absence de réactivité, certains allocataires pourraient se voir priver indument de telle ou telle prestation. Si l’instauration du versement à la source des prestations sociales demeure bien l’objectif du Gouvernement, alors il faudra impérativement que les DSN soient fiabilisées.
En conclusion, nous devons veiller à ce que cette unification présente une véritable valeur ajoutée. À ce jour, le bénéfice financier ou logistique de cette opération ne va pas de soi, ni pour les employeurs, ni pour les caisses déchargées de leur activité de collecte. Nous y reviendrons lors de l’examen du prochain PLFSS. Je pense d’ailleurs que le Gouvernement procèdera de lui-même à ce report d’un an par décret, comme la loi le lui permet.
Voici nos propositions.
Premièrement, mener à bien la fiabilisation des données individuelles de la DSN, afin de sécuriser le paiement à bon droit des cotisations et prestations sociales.
Deuxièmement, surseoir au transfert aux Urssaf de l’activité de recouvrement de l’Agirc-Arrco, de la Caisse des dépôts et consignations et de la Cavimac tant qu’un niveau suffisant de fiabilisation des données individuelles n’est pas garanti. Pour la Cavimac, cette unification ne présente aucun intérêt. Idem pour la Caisse des dépôts.
Troisièmement, poursuivre le transfert aux Urssaf de l’activité de recouvrement de la Cipav et de la CRPCEN, lesquelles n’y voient aucun inconvénient.