Je ne veux pas verser dans l'autoflagellation excessive. Nous sommes capables de nous améliorer si des travaux rapides sont menés. À cet égard, le rapport Cadot pose de bonnes premières bases.
Le Sénat a un rôle important à jouer. Le rapport Murat-Martin de 2007, « Faut-il avoir peur des supporters ? », était très visionnaire, et la Haute Assemblée a su imposer le dialogue avec les supporters dans la loi de 2016 visant à lutter contre le hooliganisme.
Plusieurs points restent à améliorer.
Il y a d'abord la gestion des flux depuis les lieux de dépôt des transports en commun. Il faut encore mettre en place une signalétique : je ne comprends pas pourquoi la préfecture de police le refuse. Nous devons enfin pouvoir anticiper les impondérables comme les incidents techniques ou les mouvements de grève.
La France interdit les fan walks ; or nos homologues européens savent pertinemment que c'est un atout pour la sécurité, car cela permet de savoir où sont les supporters et de mieux les encadrer. De même, nous interdisons les déplacements en train de supporters de Ligue 1 ou de Ligue 2, ce qui est une aberration, puisque l'on préfère les laisser dans la nature, livrés à eux-mêmes. Au-delà des incidents qui nous réunissent aujourd'hui, la France a de gros efforts à faire pour mieux appréhender la gestion des supporters.
Il faut également améliorer la réactivité et la prise de décision dans l'instant. Dès 18 heures, ce jour-là, nous avions remarqué que des problèmes allaient se poser, mais nous n'avons pu trouver aucun interlocuteur pour faire part de nos craintes. Il serait pertinent d'avoir, pour chaque stade, un policier-référent connaissant parfaitement l'enceinte et susceptible de répondre immédiatement à tout problème qui se poserait.
Sur le quatrième point, je serai très bref, parce qu'il a déjà été évoqué : il faut apprendre à comprendre le profil des supporters, qui varie d'un match à l'autre, et d'un club à l'autre. En France, comme on considère qu'il n'y a que deux problématiques à gérer lors d'un match, le hooliganisme et le terrorisme, on ne sait pas adapter le dispositif à la situation particulière d'une rencontre. Il faut absolument nous améliorer sur ce point. Pour cela, le livre vert du supportérisme, qui avait été commandé par Rama Yade quand elle était ministre des sports, avait posé de très bonnes bases sociologiques.
Cinquième point : il faut anticiper les risques externes. Je ne reviendrai pas sur les témoignages effrayants des supporters anglais ou madrilènes sur les actes de délinquance qu'ils ont subis pendant cette rencontre, mais on a l'impression que ce problème n'a jamais été envisagé. Ce qui nous a le plus frappés, c'est qu'à la sortie du stade, alors qu'il y avait déjà eu beaucoup d'actes de délinquance avant le match, il n'y avait plus de forces de police, à part quelques agents en bas des tribunes pour empêcher un envahissement du terrain. À l'extérieur du stade, une fois le coup de sifflet final donné, les lampadaires étaient éteints, et il n'y avait plus de policiers.