Sur la comparaison avec l'Euro 2016, il y a deux éléments à prendre en compte. Il y a eu, en 2016, une vraie mobilisation de l'ensemble des services de l'État, du ministère des sports notamment, ainsi que des villes-hôtes. Les conditions d'accueil et d'hospitalité ont été beaucoup mieux prises en compte qu'aujourd'hui : clairement, nous avons perdu en expertise depuis 2016, surtout depuis la crise de la covid. L'Euro 2016 n'a pas pour autant été parfait. Mais nous avons commis l'erreur de faire l'impasse sur le retour d'expérience, mis à part quelques réunions de débriefing avec la délégation interministérielle aux grands évènements sportifs. Je n'ai pas le souvenir qu'un travail réel ait été effectué.
Au moins deux éléments auraient été pertinents pour la finale de la Ligue des champions : le plan de mobilité, pour tout ce qui concerne la circulation et la signalétique autour du Stade de France, et la question des stadiers. En 2016, le budget consacré à la sécurisation des stades avait nécessité de faire appel à une myriade de sociétés de sécurité : les acteurs principaux du domaine en France n'avaient pas été intéressés par des marchés trop bas pour eux, alors même que nous étions en période de risque terroriste. J'espère que le travail du Sénat permettra de relever ces erreurs et de ne pas les reproduire.
Notre rôle, en tant qu'organisation, n'est pas tant d'engager des poursuites que de conseiller nos membres, à Liverpool et à Madrid, sur les meilleures options qui s'offrent à eux. Un certain nombre d'entre eux ont porté plainte pour des agressions, vols de téléphones et autres. D'autres s'apprêtent à faire des signalements à l'inspection générale de la police nationale (IGPN). Mais ce n'est pas facile, car le formulaire qui a été mis en ligne sur le site de l'ambassade de France du Royaume-Uni et sur celui de l'ambassade de France en Espagne ne correspond pas nécessairement aux faits qu'ont subis les supporters anglais et espagnols. De plus, les policiers qui se sont déplacés à Liverpool sont largement restés introuvables. Nous, organisation de supporters, savons par nos contacts dans la police britannique qu'ils étaient bien présents à Liverpool mais, à aucun moment, ils n'ont eu la possibilité de recueillir des plaintes ou conseiller les supporters. On en vient donc à se demander quelle était la finalité du déploiement de ces policiers français à Liverpool...
Le dépôt de plainte après match est un problème qu'on rencontre toujours lors des matches européens. Si vous vous êtes fait agresser, si vous avez été victime de violences policières, votre premier réflexe sera de rentrer chez vous. Ce n'est qu'une fois rentré, après quelques jours, que vous envisagez de porter plainte. La proposition du ministère de l'intérieur était intéressante, car elle pouvait faciliter le dépôt de plainte. Malheureusement, elle n'a pas été suivie d'effet.