Intervention de Bernard Doroszczuk

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 17 mai 2022 à 14h35
Audition de l'autorité de sûreté nucléaire sur son rapport annuel pour 2021

Bernard Doroszczuk, président de l'Autorité de sûreté nucléaire :

L'ensemble des projets qui sont affichés aujourd'hui sont assez inédits. Ces dix dernières années, l'ensemble de la filière nucléaire a manqué de projets en volume suffisant pour pouvoir entretenir les compétences et recruter du personnel. Un certain nombre de segments industriels ont beaucoup de difficultés pour recruter alors que les besoins sont extrêmement importants, par exemple les besoins en personnels de la mécanique seront multipliés par six entre 2020 et 2026. La marche à franchir est considérable, y compris en interne pour EDF, dans le domaine des études et de l'ingénierie. Selon le Gifen, 4 000 ingénieurs seraient nécessaires.

À mon sens, il faut un « plan Marshall », c'est-à-dire une mobilisation à la fois des industriels et des pouvoirs publics. Faire en sorte que les moyens humains et financiers soient disponibles, cela se planifie. Il faut organiser des trajectoires de recrutements et d'investissements. J'ai employé une telle expression, car, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l'idée du général Marshall, qui n'était certes pas dénuée d'intérêt pour les États-Unis, a été d'investir pour le futur, avec un plan d'investissements étalé dans le temps. Je pense, même si le parallèle est un peu osé, que nous sommes dans une situation comparable. Nous passons d'une période où l'on n'imaginait pas autant de projets à une période où il y en a beaucoup ; c'est un changement de paradigme. Il faut donc anticiper, planifier, payer d'avance le recrutement et la formation. Cela requiert un engagement de la part des pouvoirs publics, faute de quoi les ambitions affichées ne seront pas soutenables, ce qui sera la pire des choses pour la crédibilité du programme industriel. En outre, sans un tel investissement dans le capital humain, nous n'aurons pas la capacité d'atteindre le niveau de qualité nécessaire pour les installations nucléaires. C'est aussi la responsabilité de l'ASN de le dire.

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