Je vais peut-être vous choquer, mais il y a trois mois, j'ai demandé aux officiers du corps départemental que je dirige de réfléchir aux manières d'éteindre les feux sans eau. Cette contrainte est réelle : l'eau est un élément rare, et les sapeurs-pompiers utilisent de l'eau potable, ce qui me choque en tant que citoyen. Il faut trouver des techniques opérationnelles permettant d'utiliser de l'eau brute. Lorsque j'ai commencé ma carrière de sapeur-pompier, nous apprenions à éteindre les feux avec beaucoup moins d'eau, en particulier parce que les camions pouvaient moins en porter. Nous devons utiliser des techniques ancestrales, comme le contrôle de contre-feux, c'est-à-dire de feux tactiques et dirigés. Il s'agit d'un sujet de préoccupation tant pour les soldats du feu que pour les maires.
Un autre élément important est le volontariat. Les 3SM ont été notre force de frappe durant la crise du Covid, pendant laquelle nous avons vacciné 25 % de la population. Le volontariat est une force du quotidien, qui nous permet de réagir aux situations exceptionnelles. Il faut le favoriser et le défendre.
Je suis en discussion avec l'Assemblée des départements de France (ADF) au sujet d'une nouvelle prestation de fidélité et de reconnaissance. Aujourd'hui, un sapeur-pompier volontaire s'étant engagé pendant 30 ans verra sa retraite augmentée de 70 euros par mois. Il s'agit d'un vrai sujet : une véritable politique publique doit reconnaître l'engagement tant des volontaires que des entreprises et des collectivités leur permettant de se libérer.
Les précédents présidents de la fédération se désolaient que ce message ne soit porté que par la FNSPF. Il s'agit pourtant d'un véritable sujet de politique publique, qui permet que nos territoires soient résilients au quotidien, que cela soit au niveau du Secours d'urgence aux personnes (SUAP) ou lors de catastrophes naturelles.
Au sujet du soutien de l'État, il faut évidemment davantage accompagner les collectivités. L'accompagnement des territoires dans la mise en oeuvre de la Défense extérieure contre l'incendie (DECI) ne relève pas de mes compétences. Les maires sont contraints par la limitation de leurs capacités fiscales, et je comprends le débat à ce sujet. Cependant, en tant que citoyen, je pense que des manoeuvres fiscales peuvent permettre d'agir dans les territoires.
Pour autant, au sujet des crédits qui abondent les SDIS, la solidarité nationale doit s'exprimer. La crise que nous traversons et les situations d'urgence vécues par la protection civile doivent relever du « quoi qu'il en coûte ». Ce terme fait certes réagir, au sortir de la crise du Covid, alors que la question de l'endettement de notre pays se pose à nouveau. Aujourd'hui, face au dérèglement et à l'urgence climatique, il est nécessaire de maintenir un « bouclier » d'intervention rapide - je reprends à mon compte l'expression de M. Bacci -, qui nous permet d'éviter que les feux ne deviennent de gros feux : il faut davantage de moyens, humains et financiers.
Les feux d'aujourd'hui sont particuliers, car ils n'ont plus besoin de vent pour se propager. Nous devons davantage travailler pour que nos concitoyens ne mettent pas le feu. Une grande majorité des feux, à hauteur de 70 %, est liée à de l'imprudence : ils sont dus en particulier à des mégots de cigarettes jetés dans les aires d'autoroutes, ou à des travaux réalisés à proximité de zones à risque, des disqueuses ou des soudeuses projetant des étincelles. Le plus gros feu de 2016 dans les Bouches-du-Rhône, qui a menacé Vitrolles et Marseille, aurait ainsi été provoqué par quelqu'un qui coupait du carrelage.
Nous travaillons donc pour informer le public du comportement à observer dans leur environnement. À hauteur de 30 %, les feux sont dus à de la malveillance, pour diverses raisons - par exemple, les gens mettent sciemment le feu lors de conflits de voisinage, pour chasser ou encore pour détruire les preuves d'un délit. Seules la police et la répression judiciaire peuvent empêcher ces gens-là de mettre le feu.