Intervention de Arnaud Humbert-Droz

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 23 juin 2022 : 1ère réunion
Étude sur la gestion des déchets dans les outre-mer — Table ronde sur la responsabilité élargie des producteurs rep

Arnaud Humbert-Droz, président exécutif de Valdelia :

Merci de votre accueil.

Depuis 2013 et la mise en place de la filière REP, nous sommes confrontés à des performances faibles ou négatives sur les territoires ultramarins. Quels dispositifs pourrions-nous mettre en oeuvre, conjointement avec les collectivités locales, l'État et les éco- organismes, pour faire en sorte que les territoires ultramarins deviennent un enjeu pour les filières REP ? Pour nous, chez Valdelia, les territoires ultramarins font partie du territoire national. Nous y avons donc une ambition tout aussi importante que dans l'Hexagone. La preuve : depuis 2013, nous investissons régulièrement dans ces territoires, mais avec des résultats assez médiocres, dont nous sommes extrêmement insatisfaits.

Nous constatons régulièrement que le sujet est principalement abordé sous l'angle de la rémunération et de l'investissement des éco-organismes. Pour notre part, nous investissons plus sur les territoires ultramarins que ce que nous percevons en éco-contributions. Le problème ne réside donc pas dans la capacité financière d'investissement, mais dans la philosophie, que nous devons faire évoluer ensemble.

L'objectif d'une filière REP, c'est bien de développer une économie circulaire territorialisée. Je me rends une fois par an outre-mer pour juger de l'avancement des travaux et m'assurer que les acteurs politiques et nos facilitateurs locaux, qui sont en place depuis 2015, sont bien dans une démarche constructive. Je constate que nous sommes confrontés dans chaque territoire à un manque probant de dispositifs et de capacités de collecte, mais aussi et surtout de traitement. Partout, nous sommes confrontés à une politique qui ne nous permet pas de développer localement des dispositifs de traitement durables.

Par exemple, en Martinique, le syndicat martiniquais de traitement et de valorisation des déchets (SMTVD) nous empêche régulièrement de déployer des dispositifs de collecte, tout simplement parce que nous faisons face à des grèves à répétition. Vous pourriez objecter que, d'un point de vue financier, nous pourrions charger des conteneurss et les ramener dans l'Hexagone. Mais la philosophie des filières REP est de développer une économie circulaire locale. En effet, le déchet a la capacité de créer des emplois locaux, non délocalisables, avec à la clef un dispositif de formation pour les personnes les plus éloignées de l'emploi.

Nous souhaitons construire l'avenir des territoires autour de quatre sujets qui nous importent.

Tout d'abord, il faut un changement de regard. L'État, les collectivités territoriales et les éco-organismes doivent construire ensemble des plans pour disposer d'outils de traitement adaptés aux territoires. Ces outils seront situés sur place et leur taille sera adaptée à celle de chaque territoire. L'État dispose d'un certain nombre de dispositifs pouvant nous permettre d'atteindre la rentabilité avec de tels outils, notamment la dotation générale de décentralisation. Par exemple, Valdelia souhaite atteindre un taux de recyclage important dans l'ensemble des territoires, et nous n'y arrivons pas, parce que nous ne disposons pas des outils idoines. Nous pourrions changer l'orientation de notre visibilité en passant d'un objectif de recyclage important à un objectif de valorisation énergétique...

À La Réunion, une usine de fabrication de combustibles solides de récupération (CSR) a été construite, mais nous n'avons pas de consommateurs ! Aussi, le CSR ne trouve pas de débouchés, parce que nous n'avons pas été jusqu'à la fin du parcours politique - alors que l'usine a été cofinancée par les collectivités territoriales et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).

Un deuxième sujet qui nous importe est la mutualisation. L'idée de multi-REP est une philosophie que Valdelia souhaite développer dans les territoires ultramarins. En Guadeloupe, par exemple, nous avons un projet d'usine de recyclage du bois. La filière du mobilier ne suffit pas, et nous nous positionnons donc sur la filière des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB) pour atteindre un volume suffisant.

Une question plus difficile est celle de l'implication des collectivités locales. La loi Agec donne la possibilité d'élaborer des plans régionaux ambitieux. Les collectivités territoriales doivent nous permettre de construire avec elles, avec l'Ademe, avec les services de l'État, des outils de traitements locaux et durables.

Le dernier axe est un axe majeur sociétal. Il s'agit du réemploi et de la réutilisation, qui permettent d'accompagner les personnes éloignées de l'emploi vers des métiers de menuisier, chaudronnier, tapissier... Les plans régionaux d'économie circulaire doivent comporter systématiquement des dispositifs d'aide au réemploi. Par exemple, à La Réunion, nous accompagnons une association, que nous formons ici en métropole, pour qu'elle puisse déployer sur le terrain des dispositifs de réemploi et de réutilisation. Nous travaillons d'ailleurs avec la collectivité territoriale, qui met à la disposition de cette association un local de bonne qualité.

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