Je m'associe aux propos du président vous souhaitant la bienvenue, aussi bien au ministre Bruno Le Maire, dans la continuité de son action, qu'à Gabriel Attal. Vous savez que notre assemblée a pour habitude de travailler avec sérieux et de faire preuve d'une grande vigilance.
Comme vous, nous allons nous mettre rapidement au travail, dès lors que nous disposons - enfin ! - des éléments que nous attendions depuis un long moment. Je comprends à cet égard que la Première ministre veillera à améliorer les habitudes d'hier - vous serez toujours les bienvenus dans cette maison, messieurs les ministres !
Vous avez retenu dans votre scénario central une hypothèse d'inflation de 5 % pour l'année 2022, alors que l'Insee prévoit 5,6 %. Qu'est-ce qui motive ce choix ? À quel coût pour nos finances publiques ce différentiel correspond-il ? Je me réjouis d'entendre votre attachement au redressement des comptes, monsieur le ministre Bruno Le Maire, mais avec les effets sur les obligations indexées ou les mesures de soutien aux ménages, ce chiffre n'est pas neutre.
Vous répétez à l'envi depuis quelque temps - un peu comme un aveu - que la cote d'alerte est atteinte pour les finances publiques. Si je comprends bien, lorsqu'elle est atteinte, elle est dépassée... Vous avez affirmé hier devant la commission des finances de l'Assemblée nationale la nécessité, dans l'état actuel, de compter chaque euro, rappelant qu'il fallait tenir compte du fait que les conditions de financement ont changé. Mais je n'ai pas le sentiment que ce PLFR reflète ces propos ! Il ouvre en effet des crédits nouveaux sur une centaine de programmes du budget général, pour un total de plus de 47 milliards d'euros en montant brut, et il n'en annule que sur un seul programme, celui correspondant à la charge d'intérêt de SNCF Réseau - pour 9 millions d'euros. Certes, il s'agit en partie de rétablir les crédits annulés dans le cadre du décret d'avance pour financer la remise de 18 centimes en avril dernier. Mais cela signifie-t-il aussi que vous n'avez pas pu identifier un seul programme du budget général, en dehors de celui que je viens de mentionner, sur lequel des crédits auraient pu être annulés, de manière à compenser au moins partiellement les ouvertures de crédits nécessaires sur d'autres dispositifs ?
Quelque 12 milliards d'euros sont prévus pour les participations financières de l'État. La Première ministre, dans sa déclaration de politique générale, a annoncé son intention que l'État détienne 100 % du capital d'EDF. Vous avez indiqué hier devant nos collègues députés que les 12 milliards d'euros correspondaient à l'acquisition des actions manquantes d'EDF, ainsi qu'à d'autres opérations éventuelles. Quel est le montant exact prévu pour l'opération liée à EDF ? Selon quels critères des participations financières pourront-elles être envisagées pour d'autres opérations ?
Je voudrais évoquer également la suppression, confirmée dès 2022, de la contribution à l'audiovisuel public (CAP), que vous présentez comme une mesure de pouvoir d'achat, ce qu'il convient de relativiser si l'on regarde le gain réel pour les ménages concernés et si l'on pense que près de 5 millions de foyers sont d'ores et déjà exonérés du paiement de cette contribution.
Cette suppression était largement anticipée, mais s'effectue dans un certain manque de transparence : le Gouvernement s'était engagé en 2019 à présenter un rapport au Parlement sur l'avenir de ce prélèvement, mais ce document n'a jamais été publié. En octobre dernier, une mission conjointe de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires culturelles devait rendre des conclusions : nous n'avons pas davantage été informés. Vous parlez de transparence : il est toujours mieux, en effet, de travailler en bonne intelligence et en portant les chiffres à la connaissance de nos assemblées. Nous avons le sentiment, sur ce sujet, d'une politique du fait accompli. Je vous reconnais le courage de vous attaquer à la modernisation du secteur de l'audiovisuel public ; mais comment allez-vous procéder pour 2023 ? Plutôt que de supprimer des ressources sans donner de choix alternatif, il eût été préférable d'agir progressivement, en concertation avec les deux assemblées.
Enfin, 4,6 milliards d'euros sont prévus dans ce texte pour la mise en place d'un dispositif de soutien aux travailleurs qui disposent d'un véhicule, à hauteur de 2 milliards d'euros, et la prolongation de la remise sur le prix des carburants à la pompe, pour 2,6 milliards d'euros. Le dossier de presse comporte des précisions sur le ciblage du dispositif, notamment en faveur des actifs, et de ceux qui font les plus longs trajets, pour remplacer la remise actuelle. Pouvez-vous nous donner des précisions supplémentaires sur ce ciblage ? Vous avez évoqué un certain nombre de catégories, l'on pourrait aussi penser aux retraités qui, dans certains territoires ruraux, ne disposent pas d'alternative à la voiture. Vous indiquez depuis hier que les parlementaires pourront faire part de leurs volontés pour déplacer, si besoin, le curseur entre les catégories de bénéficiaires. Dans quelle mesure ? Le texte ne prévoit que des crédits budgétaires, et vous savez bien que nous sommes contraints par la recevabilité financière de nos amendements ! Si nous ne disposons pas de vraies marges de manoeuvre, ce ne sera que du bavardage - cela me conduit à m'interroger sur la sincérité de votre volonté de dialogue et d'ouverture.