Intervention de Pierre Moscovici

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 13 juillet 2022 à 9h30
Rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques et sur l'avis du haut conseil des finances publiques sur le projet de loi de finances rectificative pour 2022 — Audition de M. Pierre Moscovici premier président de la cour des comptes et président du haut conseil des finances publiques

Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes et président du Haut Conseil des finances publiques :

Je le répète, je suis en phase avec le message d'alerte du ministre de l'économie et des finances, mais il faut en tirer toutes les conséquences et passer à l'action.

Ni la Cour des comptes ni le Haut Conseil des finances publiques n'ont de commentaires à faire sur des mesures en faveur du pouvoir d'achat qui sont prises à chaud ou en direct. Nous y reviendrons sans doute le moment venu.

Nous avons, en revanche, appelé l'attention sur deux points.

Le premier point porte sur l'effet financier. La perspective d'un déficit à 5 % du PIB en 2022 n'est pas inatteignable, mais n'est pas la plus probable : la perspective est plutôt une hausse, dans des proportions qui ne sont pas considérables. Ainsi, d'autres institutions anticipent un déficit pour la France à quelque 5,6 % du PIB.

Le second point porte sur la nature des mesures. Des mesures ciblées et temporaires sont davantage dans nos moyens et adaptées à la situation que des mesures pérennes et généralisées.

Sur les pensions, les mesures décidées par le Gouvernement sont une anticipation de la revalorisation prévue au 1er janvier 2023. C'est coûteux - quelque 3,7 milliards d'euros - et cela pèsera sur les charges de la sécurité sociale et de l'État. Pour autant, ce n'est pas en soi contestable.

Pour ce qui est de l'euro, les effets ne sont pas nécessairement négatifs ni sur les finances publiques ni sur la compétitivité ; cela peut même améliorer cette dernière. Il est sans doute trop tôt pour mesurer la totalité des effets.

Quels leviers pour mieux maîtriser la masse salariale ? Je rappelle que la masse salariale dans les administrations publiques s'élève à 312,4 milliards d'euros en 2021, soit 13,6 % du PIB, que l'on compte 5,7 millions d'agents, que la masse salariale a augmenté de 1,6 % par an en moyenne et qu'un certain nombre de mesures salariales alourdiront cette masse dans les prochaines années. Dans ce contexte, il nous semble qu'il faut à la fois afficher un objectif nominal, et non un pourcentage du PIB du niveau de masse salariale, et mobiliser les marges de manoeuvre issues des futurs départs à la retraite. Nous ne recommandons pas je ne sais quelle mesure impérative qui a pu être suggérée par le passé. Toutefois, notre pays est loin d'avoir mis en place des politiques de réduction de la fonction publique, puisqu'entre 1996 et 2020 on a dénombré environ 1,1 million d'agents publics supplémentaires.

J'en profite pour vous signaler que nous publions aujourd'hui une analyse complète de la situation financière de l'État.

Enfin, sur les collectivités territoriales, je ne veux pas encore conjecturer. Nous ne savons pas de quoi sera fait l'hiver et quel sera le contexte géopolitique ; nous ignorons si nous devrons vivre complètement sans gaz russe, ni comment nous pourrons suppléer à telle ou telle pénurie.

En revanche, la Cour des comptes s'est prononcée sur les ressources des collectivités territoriales. Comme je l'ai dit, la responsabilité financière doit s'appliquer à tous : État, collectivités territoriales et sécurité sociale. Il y a deux jours a été publié un rapport sur la situation financière des politiques territoriales qui, certes, doit être nuancé en fonction des différents blocs, mais qui montre que leur situation financière est incontestablement plus favorable.

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