Intervention de Éric Bocquet

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 13 juillet 2022 à 9h30
Rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques et sur l'avis du haut conseil des finances publiques sur le projet de loi de finances rectificative pour 2022 — Audition de M. Pierre Moscovici premier président de la cour des comptes et président du haut conseil des finances publiques

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Je parlerai impôts. On parle déficits, dettes, excès de dépenses, mais jamais de déficit de recettes. Dans un article récent, Patrick Artus, qui n'est pas un révolutionnaire patenté, déclare que « la baisse de la fiscalité du capital est un échec », soulignant que, grâce à la suppression de l'ISF et à la mise en place de la flat tax, le taux d'épargne a augmenté ces dernières années, passant de 12 % à 17 %, et qu'à l'inverse le taux d'investissement par les entreprises est passé de 5 % à 3 %. Par ailleurs, les investissements vont en général très majoritairement sur des actifs déjà existants et ont donc très peu d'impact sur la création d'emplois et d'activité. Voilà qui pose question.

Qui plus est, cela nourrit l'inflation des fortunes. Je vous invite à acheter le magazine Challenges de la semaine dernière, qui relève + 315 % d'augmentation des fortunes industrielles de ce pays entre 2010 et 2022.

Ce Gouvernement rejette par principe toute hausse d'impôts. Pourtant, certains économistes, qui ne sont pas tous des économistes alternatifs, avancent l'idée que l'on pourrait augmenter l'impôt sur le revenu pour les hautes tranches - les Britanniques l'ont fait, eux qui s'apprêtent à taxer les profits des compagnies pétrolières de manière exceptionnelle pour faire un peu payer les gagnants de la pandémie et de la crise.

Mme Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), préconise également d'augmenter l'impôt sur les hautes tranches, assurant que cela ne pénaliserait nullement la croissance des économies des États concernés. La pandémie a fait des gagnants ; cela vaut le coup d'y réfléchir.

Solliciter de nouveau les collectivités locales pour contribuer au redressement des comptes publics n'est pas juste. En effet, la part de la dette des collectivités sur la dette totale de ce pays s'élève invariablement à 8 % ou 9 % depuis trente ans. Par ailleurs, aux termes de la loi, leur budget doit être équilibré à l'euro près, ce que ne s'impose pas l'État, puisque le Parlement vote régulièrement depuis 47 ans un budget en déficit. Enfin, les emprunts que les collectivités contractent servent à financer l'investissement et non pas le fonctionnement - les collectivités représentent encore dans ce pays 70 % de l'investissement public dans l'économie française : elles sont donc source de croissance, de développement, d'emploi et d'amélioration des comptes publics.

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