Avant d'en venir au sujet qui nous occupe, je vous fais part de l'honneur qui est le mien de vous présenter le premier projet de loi que le Gouvernement soumet au Parlement.
Je me réjouis de travailler avec vous dans le respect des convictions de chacun et du bicamérisme, qui est la considération des deux chambres. Il y a l'Assemblée nationale bien sûr, qui semble expérimenter des accords politiques qui peuvent interpeller, mais aussi le Sénat, que je ne connais pas mais dont je sais qu'il est une chambre soucieuse des territoires et de la qualité du droit, sachant prendre ses responsabilités. La Première ministre a rappelé la nécessité de bâtir des compromis sans se renier : c'est dans cet esprit que je me présente à vous, d'autant que le Sénat a toujours recherché les équilibres sur les textes relatifs à la crise sanitaire. Je salue en particulier Philippe Bas, pour ses précieux apports, et rends hommage aux sénatrices et aux sénateurs, mobilisés de nombreuses heures en commission et dans l'hémicycle, tout comme aux membres du Gouvernement avec qui vous avez travaillé.
La crise sanitaire a accaparé une part significative des ressources de la Nation. Je rends aussi hommage aux soignants et aux travailleurs de deuxième et de troisième lignes, aux agents du ministère et des associations. J'ai une pensée particulière pour les personnes décédées de la maladie et pour leurs proches.
Le projet de loi acte l'extinction au 31 juillet prochain du régime juridique de l'état d'urgence sanitaire et du régime de sortie de crise sanitaire tout en maintenant certains outils de gestion, qui demeurent indispensables, car l'épidémie est toujours là. Comme je l'ai dit à l'Assemblée nationale, je dois cinq engagements aux Français et à leurs représentants : transparence, protection de la population, proportionnalité des mesures, préservation du système de santé et maintien de la prise en charge des soins hors covid.
Je vais tout d'abord vous présenter la situation épidémique : nous connaissons actuellement une septième vague, due aux variants omicron, BA.4 et BA.5. Nos voisins la subissent aussi, selon une temporalité légèrement différente. Au 12 juillet, le taux d'incidence atteint 1 344 pour 100 000 habitants, soit une hausse de 19 % sur les sept derniers jours. Sur cette même période, 130 000 cas par jour sont recensés en France, l'Ouest et le Sud étant particulièrement touchés. Concernant les outre-mer, pour lesquels j'ai et aurai toujours une attention particulière, la Guadeloupe et, dans une moindre mesure, la Guyane et La Réunion font face à une résurgence, plus lente qu'en métropole. La Martinique l'a subie aussi, mais la situation s'y améliore grâce à l'engagement de la population et des soignants. Enfin, à Mayotte, le taux d'incidence est faible et la situation maîtrisée.
Pour que nos hôpitaux puissent faire face, j'ai signé en fin de semaine dernière une instruction à destination des agences régionales de santé (ARS) pour préciser les modalités de mise en oeuvre des mesures d'urgence de la mission que j'avais réalisée sur la demande de ma prédécesseure, Brigitte Bourguignon. Donner des leviers aux territoires et engager ensemble soignés, soignants et élus, telle est la méthode en laquelle je crois.
Je résume notre stratégie en cinq mots : prévenir, vacciner, tester, isoler, traiter.
Prévenir, tout d'abord : les gestes barrières doivent redevenir des réflexes, particulièrement le port du masque dans les lieux bondés et dans les transports. J'en appelle à la responsabilité citoyenne que je privilégie, face à des rebonds successifs, à l'obligation que certains réclament.
Vacciner : le médecin que je suis s'insurgera toujours de la désinformation dans ce domaine. Oui, le vaccin réduit significativement le risque de développer une forme grave de covid-19. Conformément aux recommandations des autorités scientifiques, nous avons ouvert le deuxième rappel vaccinal aux plus vulnérables, notamment les personnes âgées de plus de 60 ans ou immunodéprimées - 3,7 millions de nos concitoyens l'auraient reçu. C'est bien plus qu'il y a quelques jours, mais nous devons encore accélérer.
Tester et isoler : quand nous sommes cas contacts ou symptomatiques, nous devons prendre nos responsabilités et, en cas de test positif, nous isoler jusqu'au rétablissement. Ainsi, 3,4 millions de tests ont lieu chaque semaine : les Français se testent massivement et ils ont raison.
Traiter enfin : des traitements curatifs comme le Paxlovid ou par anticorps monoclonaux existent, il faut que les Français les connaissent et puissent en parler à leurs médecins et à leurs pharmaciens.
L'épidémie est toujours là, et c'est pourquoi nous avons besoin d'outils de surveillance, notamment épidémiologique. Ainsi, le présent projet de loi, profondément modifié par l'Assemblée nationale, comprend dans son article 1er le maintien, jusqu'au 1er janvier 2023, des systèmes d'information SI-DEP et Contact-Covid. Ce sont nos thermomètres de l'épidémie, essentiels pour protéger les Français.
SI-DEP permet d'enregistrer les tests covid, de prendre en charge les personnes positives et de générer les certificats pour permettre aux citoyens de se déplacer dans les pays faisant l'objet de restrictions sanitaires. Contact-Covid aide à identifier et à informer les cas contacts.
Je sais que votre commission des lois, qui a joué un rôle important dans la création de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) en 1978, y est attentive. Toute personne ayant accès à ces systèmes d'information est soumise au secret médical et ces dispositifs sont contrôlés par la CNIL et par le comité de liaison parlementaire prévu par la loi du 11 mai 2020. Sur SI-DEP, les tests négatifs sont supprimés au bout de trois mois, et six mois pour les tests positifs.
Les députés ont voté hier, contre l'avis du Gouvernement, la suppression de l'article 2, qui tendait à maintenir jusqu'au 31 janvier 2023 la possibilité de demander des justificatifs pour les déplacements depuis ou vers l'Hexagone, la Corse et les outre-mer. Cela permettait de nous protéger d'éventuels variants inquiétants et, après consultation des exécutifs locaux de Corse et des outre-mer, de protéger les systèmes hospitaliers de ces territoires qui sont facilement saturés. Je suis prêt à échanger avec vous et en appelle à la responsabilité collective : nos territoires ont besoin de cet outil.
La possibilité de demander un passe vaccinal tombera le 31 juillet : ce texte est clair, et il n'y a pas de place à la désinformation sur les bancs des deux chambres.
Le parcours parlementaire du texte n'est pas terminé, le Gouvernement s'engagera pleinement au Sénat pour rétablir ces dispositions.