Même si le dénigrement systématique de l’action politique est dans l’air du temps, il n’y a aucune raison de ne pas le dire clairement : la PFUE s’achève par un succès.
Nos diplomates, qu’il faut saluer, et notre gouvernement ont imprimé un rythme effréné à Bruxelles, capitale des compromis, des équilibres et des décisions chronophages. Même si quelques rares dossiers manquent à l’appel, plusieurs accords majeurs en ont forgé le bilan positif.
Les priorités étaient claires : climat, numérique et social.
La directive sur les salaires minimums a pu voir le jour. Avec elle, le cœur de cible de ces urgences a été atteint.
Pour ce qui concerne le climat, la France a su composer et, dans les tout derniers jours, trouver à l’arraché des terrains d’entente pour réduire collectivement nos émissions de gaz à effet de serre.
À ce titre, la vision de mon groupe est celle d’une écologie libérale, de progrès et d’innovations. Le travail relatif à la sobriété énergétique et les réponses industrielles associées seront des atouts importants de demain. Je salue particulièrement les avancées sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), exemple de l’alliance entre le développement économique et les ambitions climatiques.
Enfin, au sujet du numérique, j’approuve ce qu’a très justement déclaré le commissaire Thierry Breton : « Tout ce qui est interdit offline doit l’être online. » Mme la ministre l’a rappelé au commencement de ce débat : la régulation des grandes plateformes numériques est capitale, non seulement pour nos entreprises, mais surtout pour nos citoyens.
Les réseaux antisociaux sont un Far West où se développent complotisme et haine de l’autre. C’est un écosystème de fake news qui abîme nos démocraties et met les jeunes et les moins jeunes à la merci du cyberharcèlement.
La régulation des contenus avec le Digital Services Act (DSA) et l’encadrement des pratiques commerciales avec le Digital Markets Act (DMA) sont les meilleurs moyens de maîtriser notre espace européen. Je forme le vœu que ces textes soient applicables dès la fin de l’année et que l’on continue sans relâche à travailler sur ces sujets.
La performance des six derniers mois est d’autant plus appréciable que cette présidence a été percutée de plein fouet, le 24 février dernier, par la guerre en Ukraine. L’idée de réorienter les priorités ayant été à juste titre écartée, tout a dû être mené de front.
La sale guerre de Poutine a donc été la toile de fond des deux tiers de la présidence française. Elle aurait pu faire voler l’Union européenne en éclats : elle n’a fait, paradoxalement, que la renforcer.
Poutine voulait diviser l’Europe : il la cimente ; ridiculiser l’OTAN : il la retrempe ; humilier les États-Unis : il ressuscite Biden après le revers de Kaboul ; rallier à lui les régimes autoritaires : la Chine s’inquiète, la Turquie montre les dents et le Kazakhstan refuse l’envoi de ses soldats. Il pensait prendre l’Ukraine en trois jours : il est embourbé pour longtemps.
Le principal succès français – il faut y associer la présidente de la Commission – a été, dans des circonstances difficiles, avec certains partenaires à la limite du chantage, de parvenir à maintenir l’unité des Vingt-Sept, de décider de sanctions communes, de réunir une aide militaire et humanitaire efficace à l’Ukraine et, enfin, de renforcer la cohésion avec les États-Unis et l’ensemble des démocraties.
La prochaine étape sera plus difficile. Poutine le sait : il l’attend et l’espère. Elle consiste à relever le défi du long terme, quand la guerre va peu à peu affecter l’économie et renchérir l’inflation et le coût de la vie en augmentant les dépenses d’énergie.
Le défi sera de tenir face aux opinions publiques quand une mauvaise petite musique, bien sûr renforcée par tous les trolls, les bots et les trash media de la cinquième colonne des Le Pen, des Zemmour et des Mélenchon, viendra susurrer que la guerre coûte trop cher, que tout n’est pas noir ou blanc et que, après tout, cette guerre n’est pas la nôtre, alors que bien sûr elle l’est.