Intervention de Alain Cadec

Réunion du 12 juillet 2022 à 14h30
Bilan de la présidence française de l'union européenne — Suite d'une déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Alain CadecAlain Cadec :

Il n’a reçu de nos partenaires européens qu’un accueil poli, pour ne pas dire froid ; et, dans un récent rapport, la Commission européenne invite à ne pas former de trop grandes attentes quant à sa mise en œuvre concrète.

Non, madame la ministre, la politique commerciale n’a pas été réorientée sous l’impulsion de la France, « afin notamment de renforcer les exigences environnementales et sociales dans les accords commerciaux ».

La volonté de procéder à un tel renforcement est affichée par la Commission européenne depuis des années. Le rapport, longtemps attendu, qu’elle vient de publier sur ce sujet va encore dans ce sens. Sa lecture attentive révèle néanmoins que des sanctions commerciales pour non-respect de ces exigences par nos partenaires ne pourront être envisagées qu’en tout dernier ressort, à des conditions très difficiles à réunir et au terme de procédures lourdes et complexes.

De plus, ces procédures ne concerneront que les accords commerciaux futurs et non ceux qui ont déjà été conclus ou sont en attente de conclusion – je pense en particulier au Mercosur. Les progrès réels sont donc très limités.

De manière plus générale, la question des accords commerciaux pose problème.

Tout le monde en convient, la France est parvenue, sous sa présidence, à bloquer la conclusion de certains accords : dont acte. Mais, au fil des mois, il est devenu clair que la Commission, sa direction générale du commerce et le groupe des États membres les plus libre-échangistes de l’Union européenne attendaient simplement leur heure.

L’annonce de la conclusion d’un accord de libre-échange avec la Nouvelle-Zélande est dramatique pour notre agriculture. Elle a été faite en grande pompe par la présidente de la Commission européenne et la Première ministre de Nouvelle-Zélande le 1er juillet dernier, c’est-à-dire dès le lendemain de la fin de la présidence française !

Pis, la nouvelle présidence tchèque du Conseil de l’Union européenne a inscrit la relance de l’agenda européen de négociations commerciales en tête de ses priorités pour le semestre.

Au titre de la concurrence économique internationale, la présidence française n’aura pas non plus été à même de lever tous les blocages sur la taxation minimale des multinationales ou de convaincre la Hongrie de se joindre au consensus européen. Nous en sommes donc littéralement réduits à espérer que le gouvernement américain, qui entend dénoncer la convention fiscale le liant à Budapest, soit plus efficace sur ce sujet que la présidence française.

Ces constats illustrent, à mon sens, tout ce que les pouvoirs découlant d’une telle présidence peuvent avoir de relatif.

Les autocongratulations dédiées aux succès de la présidence française ne sauraient nous faire oublier que l’Europe, si elle semble désormais avoir davantage conscience d’elle-même, de ses intérêts et de la réalité du monde, se trouve à la croisée des chemins.

Je le répète, la France a sans doute fait du bon travail. Elle n’a pas à rougir de son bilan. Toutefois, un peu de modestie aurait sans doute été plus raisonnable dans la présentation des résultats obtenus. Il est vrai que l’humilité n’est pas la qualité première du Président de la République…

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