Monsieur le président – je salue votre première apparition au plateau –, madame la ministre – je salue votre première apparition au banc du Gouvernement –, mes chers collègues, la présidence française de l’Union européenne, ce n’est pas la présidence de l’Europe par le chef de l’État français. Le titulaire de cette fonction est appelé à jouer un rôle de catalyseur, pour que le travail du Conseil européen avance, sur la base des propositions de la Commission.
Lors du premier semestre de l’année 2022, il importait de faire progresser un certain nombre de dossiers, pour que les trilogues puissent aboutir avant la fin du mandat du Parlement européen et de la Commission. Il était d’autant plus précieux que la présidence du Conseil revienne à un pays disposant d’une administration que l’on sait efficace et mobilisée et qui, pendant ces six mois, n’a pas menti à sa réputation : c’est la clé pour obtenir, sur des sujets souvent techniques, des accords ou des avancées.
Restait, toutefois, la partie politique. Bien entendu, nous avons tous été profondément choqués par l’agression russe contre l’Ukraine. Face à cet événement majeur, nous avons dû nous unir pour prendre des sanctions contre la Russie, accélérer l’élargissement de l’Union européenne, accueillir les réfugiés venus d’Ukraine et actionner la Facilité européenne pour la paix (FEP), afin d’accompagner les forces armées ukrainiennes.
En parallèle, cette agression remet en cause plusieurs de nos fondamentaux.
Je pense tout d’abord au climat : à lui seul, le défi climatique justifie le renforcement de toutes nos politiques communes et l’extension de la solidarité européenne.
Le paquet Fit for 55 a avancé, certes, mais somme toute assez peu. La fin des quotas gratuits a été repoussée pour permettre l’adoption de mécanismes d’ajustement carbone aux frontières, mais la question de l’accompagnement de la compétitivité de nos entreprises à l’export n’est pas encore totalement traitée.
Toutefois, dans le contexte de la guerre en Ukraine, la taxonomie élaborée semble totalement anachronique : je pense notamment à la place du gaz, à l’heure où nous sommes dans l’obligation de renforcer notre indépendance énergétique.
À cet égard, la guerre en Ukraine vient remettre en cause le modèle de développement européen en général et allemand en particulier, qui est fondé depuis plus de vingt ans sur le gaz russe.
Je pense aussi aux effets de la crise alimentaire et à la manière dont la PAC devra y répondre.
Mes chers collègues, j’en viens aux questions d’asile et d’immigration. Pour faire avancer le pacte asile et migrations proposé en 2020 par la Commission européenne, l’on a opté pour une approche assez technique et graduelle.
On a obtenu de petites avancées, mais plutôt sur des textes répressifs, comme le règlement Eurodac. À ce titre, les personnes débarquant après un sauvetage en mer ne sont plus soumises aux règles de l’immigration illégale : elles font désormais l’objet de dispositions spécifiques. C’est précisément grâce à cette avancée que l’Espagne a accepté le texte en question.
N’oublions pas non plus le règlement Filtrage, au sujet duquel le Parlement européen aurait encore beaucoup à dire.
Quant à la déclaration de solidarité européenne, elle reste très faible : les pays qui l’ont signée s’engagent aujourd’hui à quelque 8 000 relocalisations, chiffre insuffisant au regard des besoins.
Au demeurant, les accords obtenus sur ces textes doivent encore être validés par le Parlement européen. Or, nous le savons, un certain nombre de pays continuent d’espérer que cette institution, fidèle à la ligne qu’elle a suivie jusqu’à présent, revienne sur un certain nombre d’acquis obtenus.
Madame la ministre, la protection temporaire a été mise en œuvre en faveur des Ukrainiens. C’est une première. Espérons que cette décision permette de faire évoluer un certain nombre de fondamentaux européens en matière d’asile.
Pour la première fois, des personnes qui viennent demander la protection de l’Europe disposent de la liberté de circulation et ont immédiatement droit au travail. Ces deux avancées méritent d’être prises en compte pour faire évoluer la politique d’asile en Europe.