Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 9 décembre dernier, le Président de la République présentait les priorités de la PFUE. En l’abordant sous l’angle d’une Europe plus souveraine, il mettait en avant la stabilité et la sécurité de notre voisinage. Il estimait alors que l’on ne pouvait pas bâtir l’Europe de la paix en laissant les Balkans occidentaux dans leur situation d’alors, appelant donc à un réengagement fort de l’Union européenne dans la région.
Six mois plus tard, face à la nouvelle donne géopolitique en Europe, une telle affirmation est plus que jamais d’actualité. Mais le réengagement promis fait toujours défaut. En tant que présidente du groupe d’amitié France-Balkans occidentaux du Sénat, je ne peux que le regretter.
Lors du dernier Conseil européen, les vingt-sept chefs d’État et de gouvernement ont accordé le statut de candidat à l’Ukraine et à la Moldavie. Face à l’agression russe, ce geste de solidarité et d’unité européennes était nécessaire.
Le Conseil européen a d’ores et déjà annoncé que le chemin vers l’adhésion serait long. Il a eu raison : la priorité est à la fin du conflit militaire, à la reconstruction, puis à la mise en œuvre progressive des acquis européens avant d’envisager toute accession à l’Union européenne.
Pourtant, la nouvelle donne a totalement bouleversé la perspective européenne des Balkans occidentaux. Quel a été le message envoyé à ces États voisins de l’Union européenne ? Y a-t-il eu un réengagement, comme l’avait promis le Président de la République ?
Malheureusement, la réponse européenne fut faible ; tout juste l’Union européenne a-t-elle réaffirmé à cette occasion son attachement total à la perspective de l’adhésion des Balkans occidentaux et à une accélération du processus.
Les conclusions du Conseil européen donnent l’impression que la région demeure au milieu du gué. Il y a pourtant urgence à réengager clairement la dynamique européenne des Balkans occidentaux. D’une part, les pays concernés nous adressent des signes de progrès : des tensions bilatérales s’apaisent, et des efforts sensibles de mise en conformité avec les règles européennes sont opérés ; cela doit être récompensé. D’autre part, l’influence sur la région de pays étrangers comme la Chine, la Russie ou la Turquie est grandissante – vous l’avez rappelé, madame la ministre – alors que la frustration et les tensions s’aiguisent face à l’absence de perspective européenne.
L’accélération demandée par le Conseil européen doit se traduire concrètement. Madame la ministre, la France et les institutions européennes doivent s’engager fermement pour mettre en musique les conclusions du Conseil européen sur les Balkans occidentaux.
Toujours au chapitre du renforcement de la souveraineté de l’Europe, il est tout aussi essentiel d’évoquer la question énergétique. Les conséquences de la guerre en Ukraine ont confirmé, s’il en était besoin, le caractère fondamentalement stratégique de l’énergie.
Qu’il s’agisse des livraisons alternatives de gaz de pétrole liquéfié (GPL), des achats communs de gaz ou de la gestion des stocks stratégiques, les réponses communes élaborées pendant la présidence française apparaissent aussi ambitieuses dans leur principe que fragiles dans leur mise en œuvre.
En effet, la PFUE n’aura pas permis d’avancées décisives sur l’organisation du marché de l’électricité – en l’occurrence, le débat n’a pas débouché sur des progrès suffisants –, sur la dépendance persistante à certaines matières premières et équipements indispensables au développement des énergies renouvelables ou encore sur le rôle du nucléaire, dont la place au sein de la taxonomie verte vient d’être confirmée in extremis au Parlement européen, mais qui fait toujours l’objet d’attaques virulentes.
Alors qu’aucune transition énergétique ne saurait être viable sans l’atome, la PFUE n’aura pas été l’occasion de remettre le nucléaire au centre du jeu énergétique européen.
Si l’Europe semble donc être revenue à davantage de raison dans le secteur de l’énergie, force est de constater qu’il y a encore du chemin à parcourir. Madame la ministre, la France a un rôle moteur à jouer en la matière ; elle doit se faire entendre !