J'ai beaucoup travaillé sur la question de la quête de sens dans un autre livre, La révolte des premiers de la classe, qui traitait de la reconversion de cadres supérieurs en cuisiniers, pâtissiers, artisans, etc. Les territoires ont un sens et nous assistons à une recomposition de leur représentation, en particulier pour les campagnes et les petites villes, qui étaient plutôt considérées comme les perdants de l'histoire. Ces territoires sont en train de prendre leur revanche. Il faudrait que cette revanche se traduise aussi en qualité de vie pour leurs habitants.
Le déplacement de population des grandes villes vers ces espaces, à la suite de la crise du covid-19, va certainement créer des frottements, mais aussi un nouvel intérêt. Je prends un exemple : le grand nombre de projets de « tiers-lieu » proposés aux collectivités depuis deux ans. Les espaces périurbains vont se transformer grâce à cet apport de nouvelles populations et le renouvellement générationnel. Ce ne sera pas le même périurbain - la liquidation récente des Maisons Phénix en est le symbole... Les attentes de ces nouvelles populations sont différentes, en particulier d'un point de vue écologique. Certaines caractéristiques des zones urbaines que j'évoquais tout à l'heure vont ainsi se diffuser dans le périurbain.
Pour répondre à votre question sur les territoires vivables, j'ai l'impression que la notion de « vivre ensemble », beaucoup utilisée, n'est pas forcément la bonne : « faire ensemble » a certainement davantage de sens. Le territoire lui-même est facteur de cohésion : souvent, les gens sont très attachés à l'endroit où ils ont grandi et où ils vivent. La sensibilité des Français à leur lieu de vie est très forte, ce qui est positif pour l'avenir et montre qu'il n'y a pas de fatalité.
Enfin, je vous remercie d'avoir cité Bernard Cathelat et ses « socio-styles », l'un de nos inspirateurs, un peu oublié de nos jours. C'était un publicitaire qui faisait de la sociologie. Il avait une façon très vivante de le faire ; nous avons essayé de nous inscrire dans ce mouvement.