Intervention de Thomas Fatome

Commission des affaires sociales — Réunion du 20 juillet 2022 à 9h05
Présentation du rapport « charges et produits » – Audition de M. Thomas Fatôme directeur général de la caisse nationale de l'assurance maladie

Thomas Fatome, directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie :

– Merci beaucoup de me donner l’occasion de vous présenter les grandes lignes du rapport « charges et produits » qui a été adopté par le conseil de la CNAM la semaine dernière.

Le rapport constitue, comme chaque année, une somme relativement importante de travaux à la fois de diagnostics et de propositions. Il est assez dense, et il faudrait sans doute beaucoup de temps pour évoquer dans le détail chacun des éléments de diagnostic et de proposition. Je vais tâcher d’aborder les principaux.

Pour préparer ce rapport, qui, vous l’imaginez, a nécessité un travail de plusieurs mois, nous nous sommes situés dans un contexte marqué par trois enseignements : l’importance, que la crise a rappelée, des politiques de santé publique et de prévention ; les leçons à tirer des nouveaux modes d’organisation et des transformations que la crise sanitaire a pu susciter – coopération public-privé sur la réanimation, place de la téléconsultation, place des organisations territoriales des systèmes de santé, changement des compétences des professionnels sur les tests et la vaccination ; l’impact financier majeur de la crise : après deux déficits historiques de l’assurance maladie en 2020 et 2021 – respectivement de 30 milliards et de 26 milliards d’euros – et un déficit prévisionnel, pour 2022, tout près de 20 milliards d’euros – ce sera le troisième plus élevé de l’histoire –, l’enjeu est de reconstruire la viabilité économique à long terme de notre système de santé et d’assurance maladie.

Nous avons enrichi le diagnostic habituel de « charges et produits » de trois manières.

Premièrement, nous avons retravaillé la « cartographie des dépenses d’assurance maladie », que nous publions chaque année depuis dix ans et qui consiste à présenter les dépenses d’assurance maladie par pathologie. Combien coûtent le diabète, le cancer ? Quelle est leur prévalence ? Comment se répartit la dépense ? Comment évolue-t-elle ? Comment évoluent les effectifs concernés ? Cette année, nous avons souhaité changer assez profondément sa présentation, au travers d’un site abrité sur ameli, Data pathologies, qui permet à chaque citoyen de s’emparer des données concernées via un outil de data visualisation, avec des cartographies aux niveaux national, départemental, régional. Toutes ces données sont ouvertes en open data, ce qui permet à chacun de les utiliser, de les rapprocher, d’effectuer des comparaisons entre départements, régions ou pathologies. Nous avons ouvert ce site il y a trois semaines. Les mesures d’audience montrent d’ores et déjà l’intérêt d’un tel outil. Le système national des données de santé (SNDS) permet notamment de mettre des données à disposition de l’ensemble des citoyens pour effectuer des analyses de ce type.

Deuxièmement, vous trouverez dans le rapport une forme de cartographie de l’activité des professionnels de santé libéraux sur le territoire français depuis vingt ans. Quelle est la démographie des personnels de santé ? Quelle est leur densité ? Quelle est l’évolution de leur répartition territoriale ? Quelle est leur file active ? Combien représentent leurs prescriptions ? Quels sont les secteurs d’exercice des médecins ? Quel est le niveau de dépassement d’honoraires ? Toutes ces données ne sont pas fondamentalement nouvelles, mais nous mettrons à jour chaque année ce panorama de l’activité des professionnels de santé de ville et nous réaliserons un certain nombre de focus.

Troisièmement, nous avons construit un tableau de bord des indicateurs de santé publique dans notre pays, y compris pour donner corps à l’idée que la santé publique et la prévention doivent avoir une place plus importante à la fois dans l’action des pouvoirs publics et dans le débat public. Ce tableau de bord, qui se fonde sur 17 indicateurs de santé publique, montre notamment les progrès importants que nous avons à réaliser en termes de prévention.

Nous avons construit le rapport autour de différents fils rouges.

Le premier concerne les pathologies. Depuis plusieurs années, le rapport « charges et produits » essaie de construire des analyses et des propositions autour non pas d’une offre de soins identifiée – la ville, l’hôpital, le médico-social ou le médicament –, mais de pathologies : comment améliore-t-on la prise en charge du diabète cette année ? Comment tire-t-on les enseignements des travaux que nous avons menés l’année dernière sur l’insuffisance cardiaque ?

Le deuxième fil rouge est une approche par population : il s’agit, là aussi, d’essayer d’aller plus loin que des approches par offreurs de soins. Nous avons, cette année, travaillé sur les sujets de la maternité et de la petite enfance. Quel est l’état de santé des femmes enceintes de notre pays ? Comment y sont pris en charge les enfants de zéro à six ans ? Quelles sont les insuffisances et les avancées que nous pouvons pousser ?

Le troisième fil rouge a trait à l’organisation des soins. À quelques mois de la future négociation sur la convention médicale, qui sera l’un des sujets majeurs de l’automne, et des réflexions que le Gouvernement devrait avoir autour de l’organisation territoriale des soins, nous formulons des diagnostics et des propositions sur ce sujet.

L’efficience et la maîtrise des dépenses sont évidemment un sujet incontournable du rapport « charges et produits », avec des propositions à hauteur de 1,2 milliard d’euros.

Je vais essayer de faire quelques « zooms » sur des éléments importants ou des propositions marquantes que je souhaite partager avec vous.

Nous avons continué à mener un travail important avec les acteurs sur les territoires pour construire un diagnostic territorial de la prise en charge de l’insuffisance cardiaque à la fois par la ville et par l’hôpital et pour construire quatre propositions.

Premièrement, nous mènerons, à la rentrée, une grande campagne de communication, comme on peut le faire sur d’autres thèmes, comme la grippe, les antibiotiques ou le dentaire, pour mieux faire connaître les signes d’alerte de l’insuffisance cardiaque. Il existe quatre signes d’alerte bien identifiés par les sociétés savantes : une fatigue soudaine, un essoufflement, une baisse de poids rapide et des œdèmes. Ces signes sont insuffisamment connus de la population, voire, parfois, du corps médical.

Deuxièmement, nous proposons d’améliorer la prise en charge à la sortie de l’hôpital pour les patients insuffisants cardiaques. Vous savez que, depuis une dizaine d’années, nous développons des programmes d’accompagnement de la sortie d’hôpital – c’est le programme Prado, qui a d’abord concerné la maternité. Nous voulons monter en charge très rapidement dans les dix-huit prochains mois sur le programme Prado pour qu’au moins un tiers des patients insuffisants cardiaques qui sortent de l’hôpital soient accompagnés par les professionnels de santé de ville. Trop de patients insuffisants cardiaques qui sortent de l’hôpital ne voient pas de médecin, cardiologue ou généraliste, dans le mois qui suit leur hospitalisation.

Troisièmement, nous proposons de créer des équipes de soins spécialisés, notamment en cardiologie. Nous avons des acteurs motivés pour le faire. Avoir un point de contact où adresser les patients, une organisation des soins territoriale qui permette de structurer, sur le territoire, une prise en charge, de la télésurveillance, des consultations avancées est une attente à la fois des patients et des médecins généralistes.

Quatrièmement, nous proposons de développer la télésurveillance pour l’ensemble des patients qui présentent une insuffisance cardiaque sévère. Des expérimentations ont été menées dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. Nous voulons maintenant les généraliser, y compris sur le fondement de la loi de financement pour 2022.

Nous avons mené un travail important sur la situation sanitaire des femmes enceintes et de la petite enfance, qui a permis d’établir un certain nombre de constats plus ou moins bien connus : un gradient social important en termes d’exposition des femmes enceintes à des risques comme le tabac et l’alcool ; un suivi des enfants encore trop hétérogène ; une consommation de médicaments trop importante, par rapport à d’autres pays, pour les enfants de moins de six ans ; des examens obligatoires insuffisamment réalisés ou des suivis insuffisants.

Cela justifie trois propositions de notre part.

La première vise à améliorer l’accompagnement des femmes pendant la grossesse et après l’accouchement. Il s’agit d’encourager les femmes à choisir une sage-femme référente – nous finalisons une négociation avec les sages-femmes à ce sujet –, de prévenir la dépression post-partum, avec un nouvel entretien post-natal – c’est le sens du programme « 1 000 premiers jours » que nous déployons – et de permettre aux sages-femmes de prescrire des soins de psychologie, dans le cadre du dispositif MonPsy, qui a été ouvert par la loi de financement de l’année dernière aux médecins, mais pas encore aux sages-femmes.

Notre deuxième proposition consiste à systématiser le repérage à l’école des troubles du langage et des troubles visuels pour tous les enfants de trois ans. Depuis deux ans, nous avons engagé des expérimentations avec les orthophonistes, les orthoptistes et l’éducation nationale pour organiser la formation des professionnels de l’éducation nationale et leur permettre d’adresser aux orthophonistes et aux orthoptistes les enfants dont ils identifient les risques de troubles visuels et du langage. Cette expérimentation permet une meilleure qualité d’adressage vers les professionnels de santé de ville et une identification plus rapide et précoce des troubles concernés. Nous voulons la systématiser sur l’ensemble des territoires dans les deux ans à venir.

Notre troisième proposition tend à faire de Mon espace santé le vrai carnet de santé numérique de l’enfant. Alors que nous avons lancé le dispositif en février dernier, la quasi-totalité de la population française a désormais un espace santé ouvert. De fait, très peu d’assurés se sont opposés à la création de ce dernier, qui, s’il n’avait pas été activé par l’assuré lui-même, l’a été par un mécanisme d’opt-out après un peu plus de six semaines. Cet espace santé peut et doit devenir le vrai carnet de santé numérique de l’enfant, pour permettre aux parents d’avoir un carnet de santé facilement accessible et aux professionnels de santé de le remplir de façon dématérialisée, et pour nous permettre d’améliorer à la fois le suivi des examens réalisés et le suivi épidémiologique des enfants et de mener les actions correctrices qui découleront de ce suivi amélioré.

Comme chaque année, nous avons réalisé deux analyses sectorielles : l’une sur la biologie médicale, l’autre sur l’accès aux médicaments innovants.

Le rapport met en avant la très forte concentration du secteur de la biologie médicale depuis dix ans. Aujourd’hui, près de six groupes représentent plus de 60 % de la dépense de biologie médicale. Cette concentration s’est accompagnée d’un maintien de la densité du nombre de sites de laboratoires de biologie médicale : 4 160 en 2021, contre 4 060 en 2019. Ces chiffres sont très satisfaisants en termes d’accès aux soins. La concentration s’est surtout accompagnée d’une augmentation significative de la rentabilité du secteur. La biologie médicale en France, comme dans d’autres pays européens, est un secteur économique très rentable, puisqu’elle présente un ratio excédent brut d’exploitation-chiffre d’affaires de l’ordre de 19 %. Bien évidemment, la crise covid a fortement augmenté le chiffre d’affaires des laboratoires de biologie et contribué à accroître encore leur rentabilité, laquelle s’est élevé, dès 2020, à 23 %. Il est probable que ce niveau de rentabilité se soit confirmé en 2021, voire en 2022, malgré les baisses de prix des tests PCR que l’assurance maladie a réalisées depuis mai 2020.

Nous proposons de changer le pilotage financier du secteur, de faire de la convention avec les biologistes une vraie convention au sens de l’assurance maladie, avec de la maîtrise médicalisée des dépenses, des missions de santé publique confiées aux biologistes et une évolution du pilotage tarifaire qui passe par des enveloppes dédiées à l’innovation – des innovations en matière de biologie doivent passer du secteur hospitalier au secteur de ville. Il faut aussi des ajustements tarifaires. Nous proposons de baisser les tarifs de la biologie dans les prochaines années, pour un montant, dès 2023, de 180 millions d’euros. Ces baisses devraient se poursuivre dans les années à venir.

Le second zoom thématique du rapport porte sur l’accès aux médicaments innovants. Depuis plusieurs années, un certain nombre d’études sont parues qui pouvaient montrer une forme de retard de la France dans ce domaine par rapport à nos voisins européens. Il nous est apparu que ces travaux d’analyse étaient en réalité imparfaits, puisqu’ils ne prenaient pas en compte les dispositifs d’accès précoces, notamment les dispositifs d’autorisation temporaire d’utilisation (ATU), qui permettent, dans notre pays, un accès rapide à des médicaments innovants pour beaucoup d’assurés et de traitements.

Nous avons lancé une étude, en coopération avec trois pays voisins, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, sur 12 médicaments innovants, notamment des anticancéreux. Dès lors que l’on intègre les dispositifs d’accès précoce, on voit que les performances du système français sont bien meilleures que ce que les études pouvaient laisser croire. Si notre pays est un peu moins bon que l’Allemagne, qui a un système particulier de négociations, il est bien meilleur que l’Italie ou l’Espagne. Nous proposons, sur cette thématique, de nous doter d’un système d’observation qui prenne en compte justement l’ensemble des dispositifs d’accès précoces et qui soit partagé avec l’ensemble des pays européens.

Le quatrième fil rouge, et sans doute l’un des plus importants du rapport, est l’accès – financier et territorial – aux soins.

S’agissant de l’accès financier, le rapport fait un point détaillé sur le 100 % Santé et montre des résultats très satisfaisants, notamment sur le dentaire et sur l’audioprothèse, avec des taux de pénétration des paniers 100 % Santé très significatifs et une augmentation du recours aux soins dans ces deux champs très importants. Le bilan est plus nuancé sur l’optique, même s’il ne faut pas négliger l’intérêt du dispositif 100 % Santé notamment pour les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S), à qui il a permis d’accéder à une diversité et à une qualité de l’offre meilleures, qu’il s’agisse des montures ou des verres. Je rappelle que l’assurance maladie a engagé à la fois une campagne d’accompagnement des opticiens – nous sommes allés à la rencontre de plus de 10 000 magasins d’optique à l’automne 2021, pour leur rappeler les règles du jeu du 100 % Santé – et, depuis le début de l’année, une campagne de contrôle de près de 200 magasins d’optique, laquelle a abouti à une centaine de procédures, de sanctions ou de pénalités financières pour non-respect du cahier des charges du 100 % Santé, notamment de la présentation des devis et de l’information en magasin des assurés.

Nous proposons d’élargir la démarche à d’autres champs de l’offre de soins. Les conditions ne sont pas forcément réunies pour qu’il s’agisse de 100 % Santé stricto sensu, mais il convient de travailler sur des mécanismes permettant de diminuer le reste à charge des patients. Nous proposons d’y travailler dans trois domaines : les prothèses capillaires, à savoir le financement de perruques pour les femmes en post-chimiothérapie, pour lesquelles nous notons des restes à charge importants du fait de la classification des différentes prothèses, avec des tarifs parfois élevés – nous proposons, en l’occurrence, un élargissement du dispositif 100 % Santé classique, avec un prix limite de vente permettant de faire du zéro reste à charge ; les semelles orthopédiques, pour lesquelles nous avons encore un travail important à opérer sur la nomenclature ; l’orthodontie.

Sur ce dernier sujet, le plus important en nombre de personnes concernées et en dépenses, nous notons des restes à charge élevés, notamment pour les familles avec enfants ou adolescents, avec des taux de dépassement extrêmement dynamiques et quasi mécaniques. Ainsi, depuis 2013, les taux de dépassement progressent de 3,5 % par an. Ils étaient de 217 % en 2013 et de 244 % en 2021, les tarifs étant parfois élevés dans certains départements de la région parisienne ou certaines grandes métropoles. S’agissant de l’orthodontie, il serait sans doute déraisonnable de vouloir faire un 100 % Santé « classique », puisque cela exposerait les complémentaires à des dépenses très élevées sans que ce soit forcément extrêmement pertinent, mais il nous semble utile de réfléchir avec les acteurs – chirurgiens-dentistes, orthodontistes – et les assureurs complémentaires à une façon de mieux réguler les tarifs du secteur. Faut-il mettre un prix limite de vente ? Faut-il mieux différencier ce qui relève de l’esthétique de ce qui relève du soin, même si c’est un peu compliqué ? Comment faire en sorte de diminuer les restes à charge des familles ?

Pour améliorer l’accès territorial aux soins, qui, me semble-t-il, répond, lui aussi, à un certain nombre de vos préoccupations, nous avons fait trois séries de propositions.

La première tourne autour de l’idée de fournir à l’ensemble des acteurs une vraie boîte à outils pour garantir un meilleur accès à un médecin traitant dans le contexte de diminution de la densité des médecins généralistes. Il s’agit d’essayer de construire autour des médecins traitants une vraie équipe de soins – avec un assistant médical, une infirmière, éventuellement une infirmière en pratique avancée (IPA), une infirmière Asalée... –, d’alléger la charge administrative des médecins, de déployer des protocoles de coopération, de promouvoir les délégations de tâches. Au vu des premiers résultats, prometteurs, du dispositif des assistants médicaux, avec des augmentations de file active et de patientèle médecin traitant de 5 à 10 %, nous pensons qu’il est possible de faire gagner aux médecins traitants un temps extrêmement précieux, de leur permettre de travailler mieux et de prendre en charge davantage de patients avec une équipe de soins autour d’eux.

La deuxième proposition pour lutter contre les inégalités territoriales de santé vise à organiser la présence de médecins spécialistes libéraux dans les zones sous-denses, avec des consultations avancées régulières en dehors de leur cabinet dans des endroits sous-denses. Il s’agit de faire en sorte qu’un médecin spécialiste assure une à deux demi-journées tous les quinze jours dans des communes dotées de peu de médecins spécialistes, en complément de son activité. Cela me semble à la fois souhaitable et possible pour améliorer l’accès aux soins spécialisés, ce qui sera sans doute l’un des sujets de la négociation conventionnelle à venir. Au reste, il convient de simplifier et de rendre plus lisibles les contrats d’aide à l’installation en zones sous-denses, avec, si possible, un contrat unique d’installation dans ces zones, même si cette solution n’est sans doute pas la seule pour faire face aux enjeux de la démographie médicale et de la répartition des médecins sur le territoire.

La troisième proposition concerne la téléconsultation. Si celle-ci s’est installée dans le paysage de l’organisation des soins, elle mérite, selon nous, un cadre plus structuré. Certaines pratiques ne sont pas complètement satisfaisantes. Nous proposons notamment d’avancer sur quatre idées.

Premièrement, il faut mieux faire connaître la possibilité de procéder à des téléconsultations assistées, qui permettent notamment à un infirmier d’aller au domicile des patients et de faire une téléconsultation avec un médecin traitant. Les médecins traitants auront, dans les prochaines années, peu de temps pour se déplacer davantage à domicile. Le dispositif de la téléconsultation assistée bénéfice d’ores et déjà de tarifs dédiés.

Deuxièmement, il faut créer un vrai statut ad hoc d’offreurs de télémédecine. Aujourd’hui, les plateformes de télémédecine et les télécabines se développent. Cela mérite pour nous – c’est un constat et une proposition assez largement partagée avec les équipes du ministère de la santé – un vrai statut, plus clair, plus transparent, davantage gage de qualité et prévoyant des obligations de qualité et d’organisation, puisque l’on voit se développer des pratiques quelque peu condamnables.

Troisièmement, nous proposons de supprimer la prise en charge des arrêts de travail prescrits en téléconsultation quand ils ne le sont pas par le médecin traitant du patient. Nous voyons des dérives significatives, avec des assurés qui font jusqu’à quatre ou cinq téléconsultations pour obtenir un arrêt de travail. Il nous semble préférable qu’un arrêt de travail qui ne serait pas prescrit par le médecin traitant qui connaît le patient soit prescrit à l’issue d’un échange physique, dans le cabinet d’un médecin, et non de quelques clics sur une plateforme de téléconsultation. En 2021, près de 200 000 téléconsultations ont abouti à une prescription d’arrêt de travail non délivrée par le médecin traitant, pour un montant de 95 millions d’euros, et il est probable que ce volume et ce montant aient vocation à augmenter très significativement si nous n’instaurons pas les garde-fous nécessaires.

Notre quatrième proposition vise à soutenir et accélérer le développement des organisations territoriales de téléconsultation. Un certain nombre de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) se sont notamment inscrites dans cette démarche. Cela nous semble un bon compromis entre l’accès à une téléconsultation et le maintien d’un lien avec le territoire.

Notre dernière proposition sur ce bloc consiste évidemment à participer à la mise en œuvre des mesures d’urgence sur les soins non programmés ainsi qu’à leur évaluation, qui aura lieu à la fin de l’été. Nous devrons en tirer des enseignements de manière pérenne.

Je termine par le dernier chapitre du rapport – ce n’est pas le moins important –, consacré à l’efficience et à la pertinence des soins et au « paquet d’économies », si j’ose dire. Nous avons souhaité situer ce travail résolument dans un cadre pluriannuel. Nous avons souhaité mieux différencier, dans nos propositions, les économies de court terme, liées notamment à des opérations de maîtrise médicalisée et de contrôle qui auront un rendement immédiat en 2023, d’actions de plus long terme, qui peuvent avoir un impact économique faible à très court terme, mais vont monter en puissance dans les années à venir, et le faire en lien avec nos fils rouges. Nous avons donc construit un tableau, avec des économies liées à l’approche par pathologie et à l’approche par population et une description plus classique d’économies en matière d’efficience, de pertinence, de contrôle et de lutte contre la fraude.

Tout cela aboutit à un montant de 1,2 milliard d’euros : 160 millions d’euros d’actions structurelles – fondées sur les pathologies, les parcours de soins, la prévention –, 750 millions d’euros d’actions d’efficience et de pertinence et 300 millions d’euros d’actions de contrôle et de lutte contre la fraude, avec une augmentation significative – de près de 25 % – de nos objectifs de lutte contre la fraude.

Nous avons identifié des sujets prioritaires d’action sur les produits de santé, avec les médicaments biosimilaires, la prévention de l’antibiorésistance, le renforcement de notre plan d’action général sur les arrêts de travail, la relance des travaux sur la pertinence en matière d’imagerie médicale, et, je l’ai dit, le renforcement de la lutte contre la fraude, notamment des facturations inadéquates des professionnels de santé, dans la continuité des travaux que j’ai pu présenter à la commission il y a quelques semaines sur l’évaluation de la fraude, en particulier de la part des infirmiers libéraux.

Voilà, madame la présidente, une rapide présentation des propositions du rapport « charges et produits » pour 2023.

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