Intervention de Guillaume Gontard

Réunion du 19 juillet 2022 à 14h30
Accord entre la france et le qatar relatif au statut de leurs forces — Adoption définitive d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme nous l’avions fait pour l’accord établissant un partenariat pour la sécurité de la Coupe du monde de 2022, nous avons demandé, au nom du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, le retour à la procédure normale pour l’examen de ce projet d’accord entre la France et le Qatar relatif à l’état de leurs forces.

D’une manière générale, nous nous étonnons et nous nous inquiétons que les liens politiques, diplomatiques, militaires et économiques qui lient notre république avec la monarchie qatarienne ne fassent l’objet, pour ainsi dire, d’aucun débat au sein de notre classe politique.

Le Qatar est pourtant loin d’être un partenaire comme les autres. Rares sont les pays au monde qui respectent aussi peu les droits humains les plus fondamentaux. Et parmi eux, plus rares encore sont ceux avec lesquels nous nous entretenons une relation aussi étroite et aussi peu exigeante.

Alors qu’un nouveau mandat présidentiel commence, il nous paraît essentiel d’avoir ce débat dans notre hémicycle, afin de savoir notamment, monsieur le ministre, si vous infléchirez quelque peu la position française des cinq dernières années.

Ce texte, qui a pour ambition de renforcer la sécurité juridique des citoyens français, au premier rang desquels nos militaires, ainsi que des citoyens qataris en France, n’est pas la convention la plus problématique qui nous ait été soumise. Elle l’est beaucoup moins que notre participation déshonorante à la sécurité de la « Coupe du monde de la honte », que nous avons vivement condamnée en février dernier.

Ce texte n’est pas seulement un moyen de sécuriser la présence de militaires français au Qatar ou de militaires qatariens en France. Dépassant l’enjeu de la simple sécurité juridique, il apporte une pierre supplémentaire à l’édifice de la relation que nous construisons avec l’émirat, dont nous interrogeons le bien-fondé et dont nous condamnons l’étroitesse parfois complice.

Fort de la respectabilité internationale que lui confère l’organisation d’un événement planétaire, l’émirat se permet, par la voix d’un responsable de la sécurité de la Coupe du monde, de sommer les supporters LGBTQIA+ qui se rendront à la Coupe du monde de se tenir à carreau.

Pis encore, la presse est venue mettre en lumière les dispositions légales qataries qui condamnent à des peines allant jusqu’à sept ans de prison les relations sexuelles hors mariage et les relations homosexuelles.

Or l’article 11 de la présente convention stipule que la partie d’accueil exerce par priorité son droit de juridiction. Nous allons donc soumettre nos soldats et nos soldates à ces lois et à ces peines incompatibles avec le respect le plus basique des droits humains.

Soulagement tout de même, les alinéas 11-8 et 11-9 protègent les membres du personnel et les personnes à charge des deux États contre la peine de mort toujours en en vigueur au Qatar et contre les traitements inhumains et dégradants, au sens de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Pour tenter de nous rassurer, le rapport de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale faisait preuve d’un manque d’exhaustivité qui confinait à la partialité et a été dénoncé comme tel, notamment par notre estimée ancienne collègue Marie-George Buffet. Celui de la commission du Sénat, en version simplifiée, n’est pas non plus à la hauteur de la responsabilité qu’induit le renforcement d’un tel partenariat.

Si la France souhaite établir avec le Qatar un dialogue lucide et exigeant sur les droits humains, elle n’y parviendra certainement pas en fermant les yeux sur les châtiments corporels, la soumission des femmes, les discriminations ou encore les conditions de travail ayant entraîné la mort, cela a été rappelé, de près de 6 500 ouvriers esclaves sur les chantiers de la Coupe du monde.

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