Le président Cambon a relayé avec lucidité les craintes concernant le manque de munitions disponibles pour nos armées, ce qui amènera sûrement à prendre en compte cette inquiétante situation. Cependant, je suis peiné de constater la médiatisation de cet état de fait peu glorieux, et de voir notre vulnérabilité affichée au grand jour dans un contexte tendu d'augmentation de la conflictualité.
Aussi, ne serait-il pas envisageable, si cela n'a pas encore été esquissé par la DGA, de mettre en place deux types de stocks de munitions au sein de nos forces armées ? Un premier stock de munitions stratégiques, dit « de guerre », serait destiné à répondre aux types de conflits les plus probables. Ses contours seraient largement élaborés avec le Parlement, mais sa confidentialité contribuerait à notre crédibilité internationale. Un audit pourrait être organisé pour chaque type de munitions, de manière à maîtriser toute la chaîne de fabrication, ainsi que les approvisionnements et les réquisitions reposant uniquement sur nos moyens humains et industriels nationaux.
Force est de constater que l'économie libérale mondialisée n'est pas adaptée au domaine de la sécurité militaire, et qu'elle nous rend dangereusement vulnérables. Je sais qu'un texte législatif piloté par la DGA est à l'étude pour réquisitionner les matériaux et les entreprises civiles à des fins militaires. Au Sénat, nous l'attendons avec intérêt. Il s'agirait également d'une manière de réindustrialiser la France et de donner corps à l'économie de guerre prônée par le Président de la République. Il sera difficile de mettre en oeuvre cette économie de guerre pour les équipements et les pièces de rechange afin d'atteindre le modèle d'armée complète de demain.
Le second stock de munitions serait constitué par des munitions consommables, susceptibles de répondre aux besoins quotidiens de nos forces armées et à leur entraînement. Ce stock serait davantage soumis aux contraintes budgétaires, le débat pouvant facilement s'instaurer à son sujet, car il serait déconnecté des contraintes de confidentialité de défense, ce qui ne mettrait pas directement en cause notre vulnérabilité.