adjoint à la sous-directrice des politiques publiques, direction générale des outre-mer (DGOM), ministère de l'intérieur et des outre-mer. - Les obligations des communes face à l'érosion du littoral constituent une thématique qui devient de plus en plus prégnante dans le rôle joué par les autorités, quel que soit leur niveau, qu'elles relèvent de l'État ou des collectivités territoriales. Chacune de ces autorités a un rôle particulier et les communes sont concernées également.
Je commencerai par rappeler les deux plans principaux qui intéressent cette thématique, à savoir les plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) et les plans de prévention des risques littoraux (PPRL), qui sont des PPRN traitant des risques de submersion marine. J'indiquerai ensuite les évolutions législatives et réglementaires actuelles et à venir récentes liées en particulier à l'adoption de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et résilience, et à l'ordonnance prise au mois d'avril 2022.
Un plan de prévention des risques naturels est un document réglementaire établi par l'État, en concertation avec les collectivités territoriales. Il réglemente l'utilisation et l'occupation des sols. C'est le préfet qui conduit cette élaboration, mais il le fait dans un cadre très normé. Son but est de prendre en compte les risques naturels dans l'aménagement et de maîtriser l'urbanisation du territoire. Les cinq départements et régions d'outre-mer sont soumis à cette obligation d'élaboration et d'application de mise en oeuvre des PPRN, tout comme Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon au titre de l'identité législative.
Un plan de prévention des risques littoraux est un document supplémentaire qui définit les secteurs littoraux sur l'initiative du préfet, en concertation avec les communes. Il s'agit de rendre purement et simplement inconstructibles les secteurs les plus exposés et de faire en sorte de limiter la construction et la constructibilité là où un risque est à venir. On parle bien de prévention : il s'agit non pas d'apporter un remède en fonction de la réalisation du risque, mais plutôt d'empêcher les conséquences liées à ce risque. De ce point de vue, le rôle des collectivités territoriales, notamment des communes, est absolument crucial dans la mise en oeuvre de ces plans produits par l'État, en concertation avec les parties prenantes.
Ces prescriptions doivent être intégrées dans certains documents d'urbanisme opposables aux tiers, comme les plans locaux d'urbanisme (PLU) ou les plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi). Ces plans de prévention doit être considérés par les communes comme des outils permettant de penser l'aménagement au mieux du territoire et des populations et non comme une contrainte.
Le plan de prévention des risques naturels à Saint-Martin, qui a dû être adopté postérieurement à l'ouragan Irma, a nécessité une concertation longue et suscité des oppositions et des incompréhensions. Malgré des faits douloureux - des morts, des destructions massives -, certaines parties prenantes nourrissaient encore une forte réticence vis-à-vis de ce document de prévention.
L'érosion du littoral est un phénomène naturel et continu, qui est actuellement en voie d'accélération. La situation a un peu évolué : aujourd'hui, le recul du trait de côte est en grande partie lié à l'élévation du niveau moyen des mers, phénomène probablement lui-même lié au réchauffement climatique.
Sa cinétique et son ampleur en font un phénomène prévisible. On n'est donc pas face à une situation de crise, comme un ouragan. Par conséquent, au sens du code de l'environnement, l'érosion du littoral n'est plus aujourd'hui forcément à considérer comme un risque naturel au sens d'un aléa totalement imprévisible : c'est une évolution qui devra être prise en compte dans les plans de prévention et dans l'aménagement.
Le Parlement s'est saisi de cette question et a adopté au mois d'août 2021 la loi dite Climat et résilience. Ce texte vise à créer les conditions pour l'adoption d'outils à mettre à disposition des communes pour faire en sorte qu'elles puissent agir face à cette problématique. Elle a été complétée par une ordonnance adoptée au mois d'avril 2022, qui prévoit le droit de préemption spécifique pour l'adaptation des territoires au recul du trait de côte, c'est-à-dire des baux de long terme avec des mécanismes de résiliation et d'échéances qui tiennent compte de l'évolution prévisible du trait de côte. Il existe également le bail réel d'adaptation à la région côtière, qui vise à peu près les mêmes objectifs.
Cette dimension passe également par l'information, notamment des locataires.
Enfin se pose la question de l'indemnisation qui peut être accordée à ceux qui sont directement touchés par ces phénomènes. La loi définit des méthodes d'évaluation des biens en prenant en compte le recul du trait de côte.
Une liste des communes concernées a été dressée : 126 dans l'Hexagone et 25 dans les territoires ultramarins. Elles devront engager une procédure de révision de leurs documents structurants. Il s'agira en particulier d'établir une cartographie de l'évolution du trait de côte, selon des termes définis, celle-ci devant être intégrée dans la prévision constituée par les plans de prévention. Cette cartographie est importante parce que son adoption ou non dans des temps donnés permettra ou non à la commune d'avoir recours aux outils contenus dans la loi.
Il existe des possibilités d'éviction pour certaines communes qui se sentiraient moins concernées à court terme, notamment parce que leur plan de prévention des risques littoraux serait déjà d'un niveau d'exigence élevé. Dans ce cas, les outils liés à cette inscription ne sont pas directement utilisables.
Tels sont les outils que nous construisons ensemble, État, Parlement, collectivités territoriales.