Intervention de Didier Mandelli

Commission des affaires économiques — Réunion du 3 août 2022 à 11h00

Photo de Didier MandelliDidier Mandelli :

vice-président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. – Madame la présidente, mes chers collègues, nous sommes réunis pour la présentation du rapport de la mission de contrôle relative à la prévention et à la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie. La mise en place de cette mission a été arrêtée par notre commission de l’aménagement du territoire et du développement durable le 16 février dernier. Nous avions alors acté la nécessité d’y associer la commission des affaires économiques, compétente au titre de la forêt.

Je salue d’emblée les quatre rapporteurs, M. Jean Bacci, Mme Anne-Catherine Loisier, M. Pascal Martin et M. Olivier Rietmann, pour le travail d’ampleur réalisé dans des délais resserrés. Depuis le début du mois de juin, vous avez en effet conduit près de 30 auditions ; vous vous êtes également déplacés le 11 juillet dernier dans la plaine des Maures, un an après l’incendie dévastateur qui avait touché le massif ; vous avez enfin mené des consultations à la suite des feux hors normes ayant ravagé le mois dernier la forêt girondine. Le résultat de ce travail est à la hauteur de cet investissement : un rapport riche de 70 recommandations, regroupées en 8 axes.

Voici quelques éléments de contexte qui ont alimenté votre réflexion.

Premier constat : depuis les années 1990 et jusqu’à la fin des années 2010, la France a globalement réussi à maîtriser le risque incendie sur son territoire. Le nombre de surfaces de forêt brûlées a ainsi été divisé par cinq en quarante ans. Ce recul est largement imputable à l’efficacité de notre stratégie de défense des forêts contre les incendies, en particulier à la doctrine d’attaque rapide des feux naissants. Cette doctrine s’appuie sur un équilibre entre prévention, pour empêcher les départs de feu, et lutte immédiate, massive et proactive, pour limiter la propagation des feux, avec un objectif d’intervention dans les dix premières minutes sur des foyers encore maîtrisables.

Ce recul significatif des surfaces brûlées est d’autant plus remarquable que notre pays a, dans le même temps, connu une hausse des facteurs de risque : à la dégradation des conditions météorologiques se sont ajoutés une augmentation du combustible en forêt et un phénomène de déprise agricole.

Malheureusement, la France doit se préparer à une évolution défavorable du risque dans les années et décennies à venir.

Quatre tendances se dessinent d’ores et déjà, comme nous pouvons, hélas, le voir en cet été 2022.

Première tendance : une intensification du risque. En région méditerranéenne française, les surfaces brûlées pourraient ainsi augmenter de 80 % d’ici à 2050. Avec une hausse de la fréquence des feux, les espaces boisés pourraient peu à peu laisser place à des maquis, en région méditerranéenne notamment.

Deuxième tendance : une extension géographique. En 2050, près de 50 % des landes et forêts métropolitaines pourraient être concernées par un niveau élevé de risque, contre un tiers en 2010. En juillet 2022, plus de 1 700 hectares de lande ont ainsi brûlé dans les monts d’Arrée, dans le Finistère.

Troisième tendance : une extension temporelle. La période à risque fort sera trois fois plus longue, les feux hivernaux devraient se multiplier. Rappelons-nous du message fort du président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), M. Grégory Allione, entendu par nos deux commissions en juin dernier : « aujourd’hui, la saison des feux, c’est toute l’année ».

Quatrième et dernière tendance : le développement d’incendies de végétation ou de terres agricoles.

L’extension géographique et temporelle, l’intensification du risque incendie, le développement d’incendies de végétation ou de terres agricoles s’expliquent structurellement par l’évolution attendue des conditions météorologiques dans le contexte du réchauffement climatique. L’augmentation moyenne du niveau des températures contribue, en effet, à une sécheresse croissante de la biomasse, qui facilite les départs de feux et leur propagation. À cet égard, il est évident que l’atteinte de nos objectifs climatiques et le respect de l’accord de Paris constitueront le levier de prévention incendie le plus transversal et structurant à la disposition des pouvoirs publics.

Des facteurs supplémentaires contribuent ou pourraient contribuer à cette évolution défavorable : la dégradation de l’état sanitaire des forêts, l’impact potentiel d’une sylviculture trop intensive ou, à l’inverse, la « libre évolution » des forêts, car l’adaptation des forêts au changement climatique nécessitera l’intervention active de l’homme.

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