Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis au cœur de l’été pour discuter d’un document stratégique qui va engager la responsabilité du Gouvernement sur sa gestion des finances publiques à moyen terme.
Le rapporteur général a parfaitement illustré le caractère parfois arbitraire, en tout cas optimiste, des hypothèses retenues sur l’inflation, la croissance ou encore le solde public. Nous aimerions être aussi optimistes !
Déjà, pour le projet de loi de finances rectificative (PLFR), le Haut Conseil des finances publiques faisait état d’une incertitude de 10 à 15 milliards d’euros sur les recettes…
Le programme de stabilité postule une croissance potentielle de 1, 35 % à partir de 2022. Comme l’a dit le rapporteur général, la croissance potentielle est un paramètre déterminant pour la programmation des finances publiques. En effet, elle constitue la meilleure prévision de la croissance du PIB à moyen terme.
Mais pour être crédible, l’hypothèse de croissance potentielle doit correspondre à un régime de croissance équilibré. À cet égard, notre déficit public, celui de notre balance commerciale ou encore la désindustrialisation de notre économie limitent les perspectives.
Par ailleurs, un nouveau défi s’ouvre devant nous, qui n’est pour ainsi dire pas évoqué dans le projet de programme de stabilité. Il s’agit de la lutte contre le changement climatique, qui aura des conséquences sur notre économie. Une étude de Rexecode publiée en mai 2022, que je vous invite tous à lire, mesure la marche à franchir : les dépenses d’investissement devraient être supérieures de 10 % pour les entreprises et de 20 % pour les ménages par rapport aux tendances actuelles.
Les éléments d’analyse rassemblés par un membre du secrétariat permanent du Haut Conseil des finances publiques laissent d’ailleurs penser que, dans les cinq années qui viennent, la croissance potentielle de l’économie française sera plutôt proche de 1 %, ou légèrement inférieure ou supérieure à ce niveau selon le degré de mise en œuvre de la réforme des retraites.
Or le doute est permis sur cette réforme, puisque le président candidat a rétropédalé dès l’entre-deux-tours… Et le rendement de l’allongement de la durée de cotisation n’est pas le même que celui du report de l’âge de départ.
Notre absence de courage aujourd’hui aura des conséquences significatives pour nos enfants et nos petits-enfants. En effet, les projections du Conseil d’orientation des retraites (COR) indiquent que le taux de remplacement, et donc le niveau de vie des retraités, passerait de 102, 8 % du niveau de vie des actifs en 2020 à 82, 5 % en 2070.
Comme pourraient le faire les stoïciens, je distingue ce qui ne dépend pas directement de l’action du Gouvernement – l’arrêt du conflit entre la Russie et l’Ukraine, la rudesse de l’hiver – et ce qui en dépend. Permettez-nous d’être inquiets, car le plan de stabilité repose uniquement sur ce qui ne dépend pas complètement de l’action du Gouvernement – la baisse de l’inflation, le maintien de la croissance – plutôt que sur la maîtrise des dépenses publiques, sur laquelle il a complètement la main.