Intervention de Pierre Laurent

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 21 septembre 2022 à 10h30
Audition de M. Rémy Rioux candidat proposé par le président de la république aux fonctions de directeur général de l'agence française de développement

Photo de Pierre LaurentPierre Laurent :

Vous connaissez l'attachement de mon groupe à l'aide publique au développement. Ce vote est donc important. Peut-être aurait-il été judicieux que nous y procédions après avoir entendu la nouvelle secrétaire d'État chargée de la coopération... Il aurait été bon aussi que nous ayons quelques nouvelles de la commission d'évaluation dont la création a été décidée par la loi. Pour vous donner un nouveau mandat, il faudrait davantage de cohérence au niveau national dans cette politique.

Nous nous félicitons de l'augmentation des budgets de l'agence. Nous sommes loin, toutefois, d'avoir réglé la visée de notre programmation budgétaire, puisque nous n'avons aucune garantie de voir une augmentation régulière, et encore moins d'atteindre l'objectif de 0,7 % du PIB. Pourtant, le chiffre que vous avez cité sur la question de l'emploi en Afrique montre que les enjeux de développement sont tout à fait considérables. Je ne suis pas sûr que nous soyons à la hauteur. Alors que l'objectif des 2 % de PIB pour les dépenses militaires fait consensus, celui d'atteindre 0,7 % pour l'aide au développement continue de faire débat. Si nous voulons assurer dans la durée la sécurité humaine globale, qui passe par les enjeux d'alimentation, d'énergie, de climat de promotion des droits des femmes, nous devons corriger la trajectoire.

Le concept 3D n'a pas donné d'excellents résultats au Mali, c'est le moins qu'on puisse dire. Nos objectifs de développement sont-ils assujettis à d'autres objectifs, d'influence ou militaires ? La politique de développement de la France a vocation à être présente dans le monde entier - j'espère que les interventions militaires de la France n'ont pas vocation à se développer dans le monde entier. Nous sommes donc en train de développer un lien qui peut s'avérer très problématique.

Vous avez évoqué la coopération décentralisée comme un acte de soutien. J'ai organisé début juillet un colloque sur la coopération décentralisée avec le Mali, qui est mise en grande difficulté par la situation. L'AFD est-elle prête à appuyer la poursuite de projets de coopération décentralisée au Mali dans la situation actuelle ? La situation politique et militaire a fait peser un très lourd danger sur la poursuite de ces projets qui, pour beaucoup, sont à l'arrêt, ce qui a des conséquences dramatiques pour la population.

Nous avons tous été sollicités sur la situation sociale de l'AFD, qui est problématique. Le personnel de l'agence est très qualifié et son engagement humain est l'un des éléments déterminants de la réussite. Cette situation va-t-elle réellement changer ? L'origine du problème est la volonté de casser le statut, comme on l'a fait dans d'autres secteurs publics, ce qui n'était pas forcément une bonne idée...

Pour moi, la politique de développement devrait avoir un objectif prioritaire, au-delà de tous les objectifs ciblés et sectoriels : favoriser le développement endogène des pays que nous aidons. L'objectif de l'aide publique au développement est que les pays puissent un jour, si possible, s'en passer ! Envisagez-vous de faire évoluer le ciblage des projets de l'AFD pour prioriser les projets qui servent le développement endogène et les infrastructures intérieures des pays concernés ? Si nous ne prenons pas ce tournant, nous raterons l'objectif de l'aide publique au développement. Êtes-vous l'homme de ce tournant nécessaire ?

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