Intervention de Gérald Darmanin

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 21 septembre 2022 à 16h00
Projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur et sur l'état et les moyens de la sécurité civile — Audition de M. Gérald daRmanin ministre de l'intérieur et des outre-mer

Gérald Darmanin, ministre :

Madame Lherbier, il ne s'agit pas seulement de niveau de rémunération, mais aussi de sens à donner à son métier. Aujourd'hui, les services de renseignement croulent sous les candidatures, car chacun voit aujourd'hui combien il est important de défendre son pays. Les armées ont réussi à attirer des gens très différents, de grande qualité, en changeant d'image. Nous allons essayer de suivre cet exemple. L'image du policier et du gendarme peut être largement améliorée. J'ai demandé à l'école polytechnique de réserver quatre places de commissaires de police pour avoir enfin des ingénieurs au sein de la police nationale, qui porteront des projets numériques particulièrement importants. Nous allons aussi développer le recrutement sur titre, comme le font déjà en partie les gendarmes. De même, on peut envisager certains échanges avec des entreprises et la mise en place d'une formation continue plus efficace.

Monsieur Bourgi, je suis décentralisateur. J'estime simplement qu'une part de responsabilité incombe aux collectivités territoriales, ce qui n'empêche pas de bien travailler ensemble. Certains départements, à l'instar du vôtre, ont su innover, ce que nous devons encourager.

Vous avez raison de souligner l'importance des feux naissant sur les aires d'autoroute ou sur les voies SNCF. Cet été, la sécheresse a été si forte que le grincement des rails a fait naître des étincelles, qui ont provoqué un feu important dans les Bouches-du-Rhône, alors même que la voie concernée était bien entretenue. Sans doute faut-il revoir les normes d'entretien à l'aune du réchauffement climatique, ce qui dépasse mes compétences.

La question des incitations fiscales et des exemptions de taxe relève du domaine de Bercy, qui s'y est opposé, au nom du droit européen. Je relaierai toutefois vos demandes auprès du ministère de l'économie et des finances.

Oui et mille fois oui à une promotion spécifique avec agrafes « feux de forêt ». Le Président de la République va recevoir les acteurs de la sécurité civile à l'Élysée. Je lui ai proposé de remettre quelques décorations à cette occasion.

Madame de La Gontrie, vous avez raison en ce qui concerne les violences intrafamiliales. Ce texte comporte une disposition importante avec la création de 2 000 postes supplémentaires d'enquêteurs et de nombreux postes de psychologues et d'assistantes sociales à la disposition des commissariats et des brigades de gendarmerie. Je suis convaincu de l'importance d'une justice spécialisée, comme en Espagne.

L'année dernière, 30 % des auteurs de féminicides avaient déjà fait l'objet d'un signalement, d'une plainte, d'une main courante ; ce qui veut dire que 70 % des féminicides avaient échappé à tout signal avant-coureur. Au-delà de la spécialisation de la justice et des policiers et gendarmes, il faut améliorer les premiers signes, notamment en sensibilisant davantage les médecins.

Dans la nuit de lundi à mardi dernier, il y a eu six refus d'obtempérer. À Nantes, une femme est aujourd'hui entre la vie et la mort pour avoir été percutée par le véhicule en question. Il s'agit toujours d'un drame, même quand le policier tire et qu'il est dans son bon droit. Les refus d'obtempérer ont augmenté de 13 % depuis 2016 : 27 609 en 2021 contre 24 216 en 2016. Aujourd'hui, on dénombre un refus d'obtempérer toutes les trente minutes en zone police ou gendarmerie. Depuis le 1er janvier dernier, 41 gendarmes et policiers ont été blessés gravement. La loi de 2017 a-t-elle amélioré les choses ? J'ai tendance à penser que ce n'est pas vraiment le sujet : on comptait 137 tirs en 2016, 202 en 2017, 170 en 2018,147 en 2019 et 153 en 2020, ce qui est beaucoup pour ces deux années « covid », et 157 en 2021, c'est-à-dire moins qu'en 2018 ou 2017. Sans doute peut-on encore améliorer la formation et apprendre à chaque policier ou gendarme à tirer dans les endroits non létaux, mais quand il fait nuit et que la voiture roule extrêmement vite, les choses sont beaucoup moins simples sur la route qu'ici. Il s'agit de professionnels de la sécurité, qui doivent agir dans un cadre déontologique. J'ai demandé au directeur général de la gendarmerie et à celui de la police nationale de réfléchir ensemble à ce qu'il était possible d'améliorer.

Il y a aussi ceux qui nous disent de faire comme les Britanniques avec le tamponnage, mais j'y suis pour ma part opposé. La doctrine des forces de police et de gendarmerie françaises est la suivante : arrêter la poursuite des suspects quand les conséquences négatives risquent d'être plus importantes que le bénéfice de l'arrestation. La police gagne toujours à la fin, de toute façon. Mais il n'est pas toujours facile de faire les bons choix dans le feu de l'action.

Il faut savoir que, depuis 2016, il y a eu une hausse de 16 % des refus d'obtempérer, mais une baisse de 8 % des tirs, donc on ne peut pas dire que le phénomène est en forte augmentation. Cependant, je vous l'accorde, il faut poursuivre le travail de formation sur la déontologie.

Vous savez, c'est toujours un drame pour tout le monde, y compris pour le policier ou le gendarme à l'origine des tirs.

Enfin, je vous fais remarquer que la première cause de mortalité des policiers, ce sont les chocs avec des véhicules tiers.

Monsieur Le Rudulier, vous semblez regretter que ce texte soit trop court, mais c'est justement pour répondre aux souhaits des parlementaires que nous avons fait ce choix. Nous avons ainsi retiré un certain nombre de points qui ne nous semblaient pas essentiels.

Par ailleurs, s'il n'y a pas de mesures « polices municipales », c'est parce que le Conseil constitutionnel a été très clair sur ce point.

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