Intervention de Daniel Breuiller

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 26 septembre 2022 à 17h35
Projet de loi de finances pour 2023- Audition de Mm. Bruno Le maire ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et gabriel attal ministre délégué auprès du ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique chargé des comptes publics

Photo de Daniel BreuillerDaniel Breuiller :

En introduction de vos propos, monsieur le ministre, vous avez évoqué les incertitudes très fortes qui pèsent sur le plan énergétique et sur l'inflation ; j'y ajoute l'accélération gravissime de la crise climatique que nous traversons.

Pour ceux qui pourraient encore en douter, les événements majeurs survenus cet été -- sécheresse, incendies -- l'ont bien illustrée.

Il s'agit d'un problème international, et non national. L'exemple du Pakistan montre les enjeux géostratégiques que cette crise climatique fait peser sur le devenir des populations, sur les migrations, sur la possibilité même de vivre dans certains territoires.

J'estime donc que les propositions que vous nous faites, même si les mots annoncent des inflexions, sont très loin du compte.

Puisque nous sommes dans le « combien ça coûte », je vais vous dire combien ça coûtera de ne pas nous mettre à la bonne hauteur.

Il y a eu 40 milliards d'euros, il va y avoir 36 milliards ou 16 milliards nets de bouclier énergétique, dont 2,5 milliards sur l'isolation des bâtiments. Mais, si on veut sortir de notre dépendance au gaz russe et ne pas tomber dans la dépendance au gaz de schiste, il faut mettre un facteur 10 sur cet engagement. Il faut mettre a minima 10 milliards d'euros sur l'isolation thermique. Il faut mettre des crédits aussi pour accroître la place du rail.

Nous ne sommes pas du tout dans les ordres de grandeur qui permettent un bouleversement.

Le volet de la sobriété, qui n'est d'ailleurs pas toujours coûteux, ne mérite pas les mesurettes annoncées, mais un vrai engagement collectif pour une sobriété heureuse.

Il est nécessaire de dégager des moyens d'action sur ces sujets. Dans cette perspective, nous estimons que ce n'est donc pas le moment de supprimer la CVAE, car cela constitue un désarmement de la capacité de l'État à agir, dans ce domaine comme dans celui de la justice sociale.

Vous devriez, a minima, messieurs les ministres, proposer des conditionnalités climatiques ou sociales chiffrées pour les entreprises qui vont bénéficier d'une réduction de leurs impôts.

Toutes les décisions que nous prenons devraient être mesurées à l'aune de leur impact sur la crise climatique ou sur la justice sociale. Certaines niches fiscales méritent d'être regardées. La taxation des superprofits doit être étudiée -- je regrette, monsieur Le Maire, que vous n'ayez pas lu ou apprécié à sa juste valeur la proposition déposée par les groupes de gauche qui définit exactement ce qu'est cette taxation et n'en fait pas une taxation pérenne.

Nous proposons également un impôt sur la fortune (ISF) climatique pour aider les personnes les plus aisées, qui émettent le plus de CO2, à réduire leurs émissions.

Enfin, le fonds vert à destination des collectivités territoriales de 1,5 milliard d'euros n'est pas à la hauteur non plus. Or ces dernières seront sans nul doute le premier acteur de la transition écologique du pays. Dans une république décentralisée, nous devrions prendre au moins autant soin des collectivités territoriales que vous le faites des entreprises.

La commune dont j'ai été maire a vu ses frais d'énergie augmenter de 2 millions d'euros ; l'institut Gustave-Roussy, que j'ai visité il y a quelques jours avec le président du Sénat, a vu les siens augmenter de 5 millions d'euros. Je pense également aux universités, souvent vétustes et mal isolées. Où trouver cet argent ? Il faut un bouclier tarifaire sur l'énergie pour les collectivités.

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