Intervention de Carole Grandjean

Commission des affaires sociales — Réunion du 28 septembre 2022 à 15h00
Projet de loi portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi — Audition de M. Olivier duSsopt et de Mme Carole Grandjean

Carole Grandjean, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels :

ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. – À mon tour, je vous présenterai ma feuille de route et sa contribution au plein emploi.

Cette feuille de route repose sur trois axes : réforme des lycées professionnels, apprentissage et forte simplification de la formation continue.

La réforme du lycée professionnel est conduite sous l’autorité du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse : je n’y reviendrai donc pas aujourd’hui, mais elle concourt à cette dynamique.

S’agissant de l’apprentissage, nous visons 1 million d’apprentis chaque année d’ici à la fin du quinquennat. Le dispositif d’aide exceptionnelle, prolongé jusqu’à la fin de cette année, a permis, malgré les crises, la signature de 732 000 contrats en 2021, soit deux fois plus que pendant la période 2012-2017. Des concertations auront lieu sur les primes de l’année prochaine, qui devront diminuer sans casser cette dynamique.

Cette croissance exceptionnelle doit être consolidée et optimisée. Nous devons notamment travailler à l’augmentation du nombre d’apprentis préparant un diplôme de niveau infrabac ou bac. À cet égard, je salue la qualité du rapport de vos collègues Frédérique Puissat, Martin Lévrier et Corinne Féret sur France compétences, dont nous partageons largement les préconisations.

Tous ces sujets feront l’objet de concertations avec les partenaires sociaux.

D’autre part, nous voulons renforcer l’efficacité de la formation professionnelle continue, afin de mieux préparer les actifs aux métiers de demain. Il s’agit de permettre à un plus grand nombre d’actifs d’accéder à des parcours sécurisés, pour leur donner les moyens de faire face aux mutations économiques.

D’abord, nous simplifierons radicalement les dispositifs d’accompagnement et de transition : entre Pro-A, CPF de transition, Transitions collectives et FNE-Formation, on a du mal à s’y retrouver.

Ensuite, nous voulons faire du compte personnel de formation (CPF) un véritable outil de réussite des transitions professionnelles pour l’ensemble des actifs. S’il a popularisé l’accès à la formation, son catalogue doit désormais être mieux orienté vers les besoins de l’économie. Il convient aussi de lutter contre les fraudes qui entourent ce dispositif ; une proposition de loi en ce sens sera débattue à l’Assemblée nationale dans les prochains jours.

Le CPF a pour vertu d’avoir soutenu l’entrée en formation des femmes : la moitié des utilisateurs sont des femmes. Par ailleurs, 70 % sont des ouvriers ou employés : il s’agit donc d’un vrai progrès social, que nous devons consolider et orienter mieux vers des dispositifs employabilité.

Nous souhaitons travailler aussi sur le droit d’accès aux compétences de base et aux savoirs fondamentaux, afin de rendre universel le droit de savoir lire, écrire et compter. Plus de 2,5 millions d’adultes sont en situation d’illettrisme dans notre pays, dont la moitié en activité professionnelle. Nous prévoyons de systématiser la détection de l’illettrisme, y compris en entreprise, de poursuivre les efforts d’orientation et de construire un Observatoire de l’illettrisme, pour que les acteurs disposent de ressources fiables et territorialisées. Enfin, nous souhaitons bâtir avec les acteurs un programme pluriannuel de sensibilisation aux enjeux de l’illettrisme.

Enfin, le projet de loi dit « marché du travail » simplifie et modernise la validation des acquis de l’expérience (VAE). Cette réforme est cohérente avec celle de l’assurance chômage : si nous incitons au retour à l’emploi, c’est en permettant à chacun de renforcer son employabilité – telle est notre philosophie d’action.

Nous voulons permettre au plus grand nombre de personnes d’accéder à une certification, donc de progresser sur le chemin de l’emploi. Pour cela, une rénovation profonde est nécessaire, car, aujourd’hui, la VAE ne convainc pas : elle est vécue comme un parcours du combattant et n’est pas perçue comme une troisième voie d’accès à la qualification. Elle souffre d’un manque flagrant d’attractivité, avec seulement 30 000 parcours réalisés l’an dernier, deux fois moins qu’il y a dix ans. C’est pourquoi nous voulons la redynamiser pour soutenir efficacement les parcours de promotion, d’évolution et de reconversion des actifs, ce qui contribuera aussi à la lutte contre les tensions de recrutement et à l’atteinte du plein emploi.

Si nous voulons permettre aux actifs de mieux faire face aux mutations de l’économie, nous devons mieux reconnaître les compétences acquises tout au long de la vie. En ce sens, ce projet de loi marque un grand progrès social en ouvrant à la reconnaissance des compétences sociales, associatives ou bénévoles, notamment celles des proches aidants – nombre de parlementaires ont travaillé à cette reconnaissance, en particulier sous la dernière mandature.

L’article 4 du projet de loi lève les freins entravant l’accès à la VAE, en vue d’atteindre 100 000 parcours initiés par an d’ici à la fin du quinquennat. Pour y parvenir, nous visons deux objectifs : élargir l’accès à la VAE en intégrant les compétences acquises dans le cadre de périodes de mise en situation en milieu professionnel et sécuriser les parcours des candidats en travaillant à une meilleure individualisation et à un accompagnement en amont de la phase de recevabilité. Les associations de transition professionnelle pourront financer des parcours d’accompagnement à la VAE pour les salariés désireux de se reconvertir.

Je compte sur les débats parlementaires pour approfondir la réflexion sur ces enjeux. La VAE mérite d’être valorisée : elle est au cœur non seulement de la bataille du plein emploi, mais aussi de notre pacte social et républicain. Faisons de la reconnaissance permanente des compétences un droit réel tout au long de la vie, au cœur de la société du savoir et des compétences que nous souhaitons construire.

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