Vous avez évoqué la stratégie du groupe SNCF en termes de ventes, de rachats et de logistique : c'est un sujet important. Je ne reviendrai ni sur le peu d'appétence des joueurs du Paris-Saint-Germain pour certains transports en commun ni sur la demande pour le moins saugrenue du Gouvernement, qui demande au mode de transport le plus décarboné d'être plus sobre... Dans ce tumulte, je note que le recours au train devient de plus en plus prégnant, ce qui est un signal positif que nous plébiscitons au sein de cette commission. Nous avons d'ailleurs proposé et fait voter la baisse de la TVA à 5,5 % pour le train et le doublement du fret ferroviaire, ainsi que la limitation de la contribution de solidarité territoriale (CST) et de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF), deux taxes pesant sur la SNCF qui ont été supprimées par l'Assemblée nationale.
Après un bel été teinté de records de trafic, vous devriez être porté par un vent d'optimisme puissant. Mais cet intermède estival ne saurait occulter les difficultés structurelles qui ne manqueront pas d'obérer la dynamique du train si on ne les affronte pas une fois pour toutes. Les sujets sont nombreux : le coût de l'énergie, qui change la donne ; le poids financier de la perfusion publique des contribuables ; les problèmes de personnel et de recrutement ; le mouvement social annoncé...
Je resterai concentré sur notre fil rouge : la mauvaise surprise que représente le contrat de performance signé entre SNCF Réseau et l'État. Les montants prévus dans ce document stratégique sont clairement en deçà de ce qui serait nécessaire pour moderniser et améliorer notre réseau. Ce contrat multiplie les renoncements, prévoit des investissements de renouvellement insuffisants, fait l'impasse sur la modernisation, sanctuarise la fragilité du réseau. Premiers à dénoncer ces constats, nous avons été rejoints par la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), l'association française du rail (AFRA), Fret ferroviaire français du futur (4F), Régions de France et le gendarme du rail, l'Autorité de régulation des transports (ART).
Depuis lors, monsieur le président, vous avez réagi de manière puissante, affirmée et courageuse, en évaluant le besoin d'investissement à 100 milliards d'euros supplémentaires sur quinze ans, afin de contribuer à la décarbonation des transports et de doubler la part du train. Au même moment, pour ce qui concerne les infrastructures, l'Allemagne vient d'annoncer un plan de 86 milliards d'euros et l'Italie un plan de 120 milliards d'euros. Pour notre part, dans une logique transpartisane, nous avons déposé un amendement d'appel - un cri d'alarme ! - avant le rendez-vous du projet de loi de finances (PLF), tendant à prévoir l'ajout d'un milliard d'euros dans le projet de loi de finances rectificative (PLFR) 2022. Cette idée fait consensus au-delà des clivages partisans, et même si nous avons précédemment retiré cet amendement, tel ne sera pas le cas lors de la discussion du PLF.
Nous combattons en faveur d'une modernisation du rail, mais pas d'une modernisation au rabais. Nous nous opposons à la version du Gouvernement qui, à travers la bouche de Gabriel Attal, me répondait de manière jupitérienne que tous les moyens avaient été à la hauteur lors du précédent mandat...
Il y a une seule vérité : sans un engagement financier beaucoup plus massif de l'État, le réseau français décrochera irrémédiablement de ses homologues européens. Un sursaut est-il encore possible ? Avez-vous reçu des garanties du Gouvernement que la copie sera revue à la hausse, pour une amélioration nette de la mobilité ferroviaire ? Si rien ne devait bouger, ne pensez-vous pas, à l'instar de l'établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF), que cela reviendrait à acter une véritable mise en danger des usagers ?