Bonjour et merci Monsieur le président, merci à tous de nous accueillir pour cet échange. Nous sommes ravis de partager avec vous nos travaux et nos dernières réalisations. Effectivement on avait été auditionné dans le cadre de votre précédent rapport dont les conclusions convergent en grande part avec nos recommandations en ce qui concerne notamment l'équilibre des piliers de l'ESG, l'importance à donner à la formation en matière de RSE, qui nous tient particulièrement à coeur. Récemment à la plateforme, nous avons, comme ça ne vous a pas échappé, travaillé sur les questions européennes. Nous avons consulté les membres de la plateforme RSE qui sont au nombre de cinquante et qui, pour rappel, sont organisés en cinq pôles : le pôle économique, le pôle des organisations syndicales, la société civile, le pôle des chercheurs-développeurs et le pôle des institutions publiques.
De cette consultation est ressortie la nécessité d'une priorité très évidente : travailler sur l'Europe. On était en 2020, et en 2021 allait être à l'ordre du jour au niveau européen un certain nombre de textes que vous avez cité sur le reporting avec la directive CSRD sur la taxonomie et puis sur la gouvernance d'entreprise durable et le devoir de vigilance. Pour ces raisons, il nous est apparu important de se saisir des sujets à la fois pour suivre, mais aussi pour pouvoir porter la voix des acteurs français notamment au moment où la France s'apprêtait à présider le Conseil de l'Union européenne. Au sein de la plateforme, nous avions de l'expertise sur ces sujets-là, mais ce qui nous manquait, et qui a été un peu le point de départ de nos travaux, c'était une vision partagée et un besoin de mettre tous ces textes en cohérence. Ce besoin de cohérence, c'était vraiment ce qui a guidé nos travaux parce qu'il est facile d'avoir une vision en silo, sur des sujets parfois très techniques, qui s'adressent à différents types d'acteurs, et il nous apparaissait important d'essayer d'en comprendre les enjeux de façon très transversale au-delà de la spécificité de certains textes dont il fallait quand même entrer dans le détail. On a procédé par une série d'auditions comme nous avons l'habitude de le faire. On s'est attaché à comprendre et à réunir des experts autour des différents textes cités pour essayer ensuite de définir une vision globale et les principales attentes sur ces différents textes. L'idée était que la France étant pionnière en Europe et à l'origine d'un certain nombre de réglementations avec sa loi NRE, l'idée était de continuer à jouer ce rôle de pionniers, sans arrogance. C'était aussi un point de vigilance du groupe mais il s'agissait de voir comment valoriser l'expérience française et capitaliser sur cette expérience.
Ce qui ressort de nos travaux, se sont trois axes : le premier c'est tout ce qui tourne autour de la souveraineté. Ce qui nous est apparu important, c'est la nécessité d'affirmer une souveraineté européenne en matière de RSE en promouvant des standards européens et en s'assurant de l'ambition des travaux en cours au niveau de la Commission. Pourquoi ? Parce qu'on parle des normes avec toute une bataille de normes et il y a un vrai enjeu à ne pas se faire imposer des normes qui ne correspondent pas à notre histoire, à notre mode de fonctionnement, et qui ne seraient pas opérantes. Il y a tout un enjeu avec l'idée qui reste à creuser autour d'une réflexion sur la création d'une agence européenne d'évaluation publique de l'information ESG. La réalité, c'est que l'information ESG va être plus importante compte tenu de l'augmentation du nombre d'entreprises qui vont être soumises au reporting par la directive CSRD ; on multiplie par quatre le nombre d'entreprises qui vont y être soumises, avec l'abaissement des seuils à 250 , ce qui va produire plus d'informations. Donc voilà une piste qui est à réfléchir, autour de cette agence d'évaluation publique de l'information. Et puis l'idée aussi, de faire de l'exigence européenne en matière de RSE, un outil de différenciation avec l'idée d'étendre le champ d'application des différents textes en question aux entreprises non européennes, mais qui ont une activité au sein de l'Union européenne ; ça c'est un point très important pour les acteurs de la plateforme RSE.
Le deuxième axe est autour du fait d'asseoir les spécificités de la vision européenne de la RSE. Qu'est-ce que ça veut dire ? C'était un point de votre rapport, mais il est pour nous important d'avoir une vision équilibrée de la RSE.
En s'assurant de l'équilibre des différents piliers, car il peut y avoir un risque que les sujets environnementaux éclipsent parfois les sujets sociaux. On a cette vigilance de demander à ce qu'on ne privilégie pas certains enjeux au détriment d'autres mais d'avoir bien cette vision transversale et de vraiment consacrer cette notion de double-matérialité qui nous semble très intéressante. Il s'agit non pas de se situer seulement du point de vue des risques pour l'activité de l'entreprise, mais aussi dans un point de vue plus global des risques que l'activité de l'entreprise fait peser sur son écosystème et sur l'environnement.
Un autre point qui nous paraît être une spécificité européenne, c'est la méthode, et nous y revenons très souvent dans nos travaux. L'association des parties prenantes, c'est un peu l'ADN de la Plateforme RSE et c'est aussi l'esprit de la norme ISO 26000 qui guide les travaux en matière de RSE. Cette association des parties prenantes nous paraît absolument clé à tous les niveaux de l'élaboration des normes jusqu'à leur suivi, leur évaluation. Nous insistons sur cette méthode dans tous nos travaux.
On s'est accordé aussi à dire qu'il était nécessaire d'avoir un mécanisme obligatoire en matière de devoir de vigilance, inspiré du modèle français, et qui soit en fait généralisé au niveau européen. Et puis, il y a toute une série de points sur la nécessaire cohérence entre les différents textes, les différentes réglementations européennes pour pouvoir s'y retrouver, et pour s'assurer de l'harmonisation des textes à différents niveaux européen.
Le troisième pilier de nos recommandations concerne la mise en oeuvre effective avec la nécessité d'avoir des informations extra-financières qui vont devenir informations de soutenabilité. L'idée, c'est qu'elles puissent être accessibles, claires et être utilisées par tous. Que ce ne soit pas seulement un sujet d'experts, mais que chacun puisse être acteur à son niveau et s'approprier l'information. Il y a aussi un point dans notre travail sur la nécessité d'une approche différenciée et sectorielle avec notamment, et je laisserai Sandrine Bourgogne développer ce point : du fait que l'on parle d'abaissement des seuils, un plus grand nombre d'entreprises vont être soumises notamment des entreprises de plus petite taille, et ainsi, existe le besoin d'accompagnement, le besoin de standards proportionnés qui puissent prendre en compte aussi la réalité des entreprises qui n'ont pas eu cette expérience ni forcément les moyens, pour mettre en oeuvre ces nouvelles obligations. Voilà, à grands traits, les différents axes de nos travaux récents sur l'Europe.
On a également, compte tenu des échéances électorales de 2022, proposé une synthèse qu'on vous remettra et qui s'appelle « Responsabilité sociétale des entreprises, une ambition partagée », qui est une synthèse de nos différents travaux des dernières années. Elle met l'accent sur ce qui nous paraît le plus important, les éléments un peu incontournables de nos recommandations sur différents volets, sur les différents leviers de la RSE.