Intervention de Patrick de Cambourg

Délégation aux entreprises — Réunion du 17 février 2022 à 9h00
Responsabilité sociétale des entreprises — Audition de M. Patrick de Cambourg président de l'autorité des normes comptables président de la commission climat et finance durable de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution acpr

Patrick de Cambourg, président de l'Autorité des normes comptables, président de la commission Climat et finance durable de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) :

Sur la première question, sur les auditeurs, aujourd'hui la CSRD prévoit les commissaires aux comptes parmi les intervenants possibles, et les États membres pourront élargir, s'ils le souhaitent, le champ des intervenants. C'est une discussion en ce moment au Parlement européen et au Conseil. S'il y a un élargissement, la question est de savoir si les autres intervenants seront soumis aux mêmes règles d'indépendance, de déontologie, de contrôle technique et de supervision technique. Il est vrai que c'est un problème compliqué ; il y a encore sept ans j'étais moi-même dans cette profession, où j'ai fait une bonne partie, sinon toute ma carrière précédente. Je crois effectivement qu'il y a un intérêt à ce que ce soit ceux qui regardent les comptes, et qui regardent les systèmes qui aboutissent aux comptes -- c'est-à-dire les systèmes de collecte de l'information, de traitement de l'information -- qui regardent également le côté extra-financier. À condition qu'il n'y ait pas de captation, parce que je pense qu'il ne faut pas donner un tour trop financier, il faut que l'information extra-financière garde sa spécificité, qui est indépendante à bien des égards.

C'est pour cela que je parle de deux jambes, nous n'aurons jamais la fusion des deux jambes, je pense que ce serait une mauvaise idée pour plein de raisons qu'il serait peut-être un peu trop long d'évoquer ici. En revanche, il y a quelque chose de fondamental, c'est que l'information d'entreprise est « une » : il faut que la connexion entre les deux jambes fonctionne. À ce propos, vous avez des éléments qui commencent à apparaître, comme des informations de durabilité, qui transitent, petit à petit, vers une comptabilisation. C'est le cas du carbone aujourd'hui. Au départ, il ne coûte pas très cher, on émet gratuitement dans l'atmosphère, on sait que ce n'est pas bien et qu'il faudra trouver des moyens de le réguler. Ces moyens vont finir par se traduire par des comptabilisations : comptabilisation d'investissement pour réduire l'émission, prix du carbone que l'on devra payer, les quotas de CO2, etc. On nourrit la réflexion qui se traduit un jour par des flux financiers, c'est ce qu'on appelle la matérialité dynamique : d'un impact, on évolue petit à petit vers un risque financier. C'est ce qui en fait toute la difficulté, mais la complémentarité.

Je pense et j'espère que le leadership pris par l'Europe en la matière aura une influence sur la rédaction des normes internationales ; nous appelons à la co-construction. Nous pensons que c'est le bon sens et que le défi est suffisamment large pour que l'on ne joue pas la dispersion. L'Europe avancera, la commissaire l'a répété devant le Parlement européen la semaine dernière, après notre propre audition. Je dis « notre » parce que j'étais avec le président de l'EFRAG, Jean-Paul Gauzès. Elle a dit : « écoutez, nous avançons, nous avons des objectifs très particuliers à l'Europe, nous ne sommes pas du tout contre le fait de travailler internationalement, mais nous devons satisfaire nos objectifs stratégiques en la matière ».

Et à vrai dire, je crois que c'est un avantage compétitif pour l'Europe et, au sein de l'Europe, pour la France, qui est assez pionnière comme cela a été dit, si l'on est raisonnable et mesuré dans ce que l'on fait. Selon moi, c'est un avantage compétitif significatif, à la fois pour les entreprises, pour les gestionnaires d'actifs et pour l'ensemble des parties prenantes.

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