Intervention de Claude Malhuret

Réunion du 5 octobre 2022 à 15h00
Atteintes aux droits des femmes et aux droits de l'homme en iran — Débat d'actualité

Photo de Claude MalhuretClaude Malhuret :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le temps des dictateurs est revenu. Les démocraties, au terme d’une lutte implacable, avaient vaincu au XXe siècle les deux totalitarismes aux dizaines de millions de morts. Certains les croyaient disparus à jamais.

Sous nos yeux, l’internationale des tyrans se reforme. Le boucher de Moscou, le génocidaire des Ouïghours en Chine, le docteur Folamour de Corée du Nord, le massacreur de femmes de Téhéran et quelques autres se sont regroupés. Leur seul but : se venger, abattre l’Occident, mettre à bas la liberté et, en premier lieu, celle des femmes.

Le pire est que, comme au siècle précédent, ils comptent des alliés dans nos propres pays : les adorateurs de Poutine, indifférents au massacre des Ukrainiens ; les complices de Xi, qui se moquent des Ouïghours et de Taïwan ; les alliés de Khamenei, expliquant, au moment où les Iraniennes meurent, que le voile est seyant ; en un mot, les populistes de tous bords, qui partagent une idée fixe avec les despotes : la haine de la démocratie.

Depuis le début de la révolte en Iran, et jusqu’à la manifestation de dimanche dernier à Paris, ces professionnels de l’indignation, ceux qui battent le pavé chaque semaine pour crier que la police tue ou dénoncer le racisme systémique en France, avaient disparu. Où étaient-ils lors des deux premiers rassemblements en soutien des femmes iraniennes ? En week-end sans doute, comme lors des manifestations pour l’Ukraine ! Leurs comptes Twitter, qui dénoncent chaque jour le patriarcat et l’islamophobie, sont devenus muets : pas un mot de soutien, pas un appel contre la « mollarchie » et sa police des mœurs ! Pendant qu’à Téhéran, les femmes meurent sous les coups et les balles, ils préfèrent dénoncer le virilisme du barbecue, faire l’éloge d’un gifleur ou juger les harceleurs dans des « comités de transparence », qui sont l’oxymore le plus grotesque inventé depuis la dictature du prolétariat.

Quelques-uns d’entre eux ont réapparu dimanche dernier lors du rassemblement place de la République à Paris. Les Iraniens et les Iraniennes présents leur ont donné une grande leçon de laïcité. En signifiant à Mme Rousseau qu’elle n’était pas la bienvenue, ils ont rendu clair pour tout le monde cette évidence : on ne peut pas en même temps être pour le voile à Paris et défendre celles qui brûlent leur voile à Téhéran. §En sifflant Mme Manon Aubry, ils ont signifié qu’un parti ne peut pas marcher avec les islamistes en 2019 et soutenir les victimes de la République islamiste en 2022. En un mot, ils nous ont montré qu’on ne peut à la fois être communautaristes et universalistes : il faut choisir.

En Iran, des femmes risquent leur vie pour se débarrasser du voile. Ici, les intersectionnels le présentent comme une liberté. Écoutons ce que leur répond Chantal de Rudder : « Le voile n’est pas un objet cultuel, mais un objet politique. C’est le produit phare de l’islamisme. Et c’est désormais une affirmation anti-occidentale et antidémocratique. »

Ce morceau d’étoffe, Bourguiba l’appelait « l’épouvantable chiffon ». Aux naïfs qui croient que se voiler est un choix, aux décoloniaux qui n’ont jamais lu un livre d’histoire, il faut rappeler que la lutte contre le voile n’est pas une oppression néocoloniale : les grands dirigeants musulmans ayant compris que la soumission de la femme était l’une des causes principales du déclin de leur pays l’ont combattu. Atatürk, le premier, l’a interdit dans les années 1920 en Turquie ; puis, ce fut Reza Chah dans les années 1930 en Iran, et Bourguiba plus tard en Tunisie. Nasser, en Égypte, s’en moquait publiquement devant le grand mufti d’al-Azhar.

Ce combat, gagné par eux, a été perdu depuis la révolution islamique de 1979. Les femmes iraniennes reprennent aujourd’hui ce flambeau contre les mollahs, les ayatollahs, les dictateurs, les talibans et leur police des mœurs.

C’est un coup de poignard dans le dos de ces combattantes qu’enfoncent certaines néoféministes en condamnant toute critique du voile au prétexte de ne pas nourrir l’islamophobie. C’est un coup de poignard dans le dos lorsque Sandrine Rousseau déclare que le voile peut être un « embellissement » ou que Rokhaya Diallo ose affirmer : « La liberté peut aussi être dans le hijab. »

Combien faudra-t-il de morts à Téhéran pour que l’héroïsme des Iraniennes les force à ouvrir les yeux et les oreilles et pour qu’elles cessent de danser le moonwalk de Michael Jackson en faisant semblant de faire avancer la cause des femmes tout en la faisant reculer ?

Le XXIe siècle s’annonce aussi dangereux que le précédent ; il est temps de s’en rendre compte. Ceux qui croient que nous ne sommes pas en guerre ou qui, pour se rassurer, se forcent à le croire commettent une erreur tragique, car les dictateurs et les ayatollahs, eux, savent qu’ils sont en guerre contre nous.

Puissent les admirables femmes iraniennes, les héroïques soldats ukrainiens et les courageux dissidents chinois nous convaincre de nous rallier à leur cri : « Liberté ! »

1 commentaire :

Le 22/10/2022 à 16:43, aristide a dit :

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"Écoutons ce que leur répond Chantal de Rudder : « Le voile n’est pas un objet cultuel, mais un objet politique. C’est le produit phare de l’islamisme. Et c’est désormais une affirmation anti-occidentale et antidémocratique. »”

Plus c'est con, mieux c'est ..

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