– On ne peut pas mettre sur le même plan l’implication du professionnel de santé dans l’assistance au suicide et dans l’euthanasie. Cette différence est fondamentale et n’apparaissait pas suffisamment dans la proposition de loi de M. Falorni.
M. Olivier Henno. – Monsieur Delfraissy, lorsque nous vous avions entendu au sujet du projet de loi relatif à la bioéthique, vous avez prononcé cette phrase terrible mais juste : « On meurt mal dans notre pays. »
Quand vous avez dit que 90 % des personnes mouraient à l’hôpital ou bien quand vous avez posé la question de savoir si notre mort nous appartenait à moins qu’elle n’appartienne à la société, qui l’a déléguée aux médecins, ces propos m’ont interpellé. Le principe d’autonomie semble l’emporter, dans notre société, sur celui de solidarité.
Très souvent, ceux qui se rapprochent de la mort souhaitent mourir chez eux ; or c’est loin d’être toujours possible, ce qui accentue l’angoisse de la mort et contribue à la montée du principe d’autonomie. Est-il inéluctable que 90 % des personnes meurent à l’hôpital ? Ne peut-on pas mourir dans la dignité même chez soi ?
M. Daniel Chasseing. – Certaines situations sont difficiles à tous les âges, qu’il s’agisse du cancer ou des maladies neurodégénératives. La loi suffit-elle à encadrer ces situations rares ? Dans certains cas, je ne le crois pas.
Si les personnes meurent rarement à domicile, c’est par manque d’accompagnement, qu’il s’agisse de la famille, des infirmiers ou du médecin. Tout est problème d’accompagnement. Même si l’immunothérapie a beaucoup progressé, de sorte que certains patients vivent jusqu’à des stades très avancés de leur maladie, il arrive toujours un moment où l’on est en difficulté et où l’on a besoin d’un accompagnement plus important.
La loi Claeys-Leonetti a permis des progrès considérables, notamment dans les départements ruraux comme la Corrèze. Dans les Ehpad, les familles ont pu apprécier l’accompagnement des soins palliatifs. Il faudrait les développer encore davantage, en amont.
Faut-il changer la loi pour ce faire ou bien simplement l’adapter ? Il convient en tout cas de la renforcer pour favoriser le développement des soins palliatifs, en collaboration avec les équipes soignantes.
Mme Victoire Jasmin. – Je suis heureuse d’entendre parler, dans ce débat, de « solidarité », de « dignité » et de « souffrance des soignants ». Cependant, comment a-t-on pu en venir à banaliser l’administration du Rivotril dans les Ehpad, il y a quelques mois ?