Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, au terme de cette discussion générale commune, je tiens tout d’abord à remercier l’ensemble des orateurs qui se sont exprimés : les uns de leur soutien et de leurs suggestions, les autres de la manière courtoise dont ils ont émis leurs critiques.
Sans trop entrer dans le détail, puisque nous aurons l’occasion de le faire lors de la discussion des articles et que l’excellent rapport de M. Gélard éclaircit un certain nombre de points, je répondrai aux idées principales qui me semblent avoir émergé des différentes interventions.
Comme M. le rapporteur l’a souligné, ceux qui, après avoir voté contre la révision constitutionnelle en 2008, sont hostiles à tout ce qui en permet la mise en œuvre font preuve d’une incontestable logique. Et c’est un choix parfaitement respectable. Dès lors, je ne comprends pas pourquoi certains veulent « habiller » d’arguments divers cette prise de position théorique et préalable pour justifier leur rejet du texte. Il serait beaucoup plus simple et clair d’affirmer d’emblée cette position de principe. Il n’y aurait là, monsieur Mermaz, pour le coup, aucune hypocrisie : ce serait simplement faire preuve de courage !
S’agissant des délais de mise en œuvre de la réforme constitutionnelle, Richard Yung prétend qu’il aura fallu deux ans au Gouvernement pour préparer ces textes. Non ! Je rappelle que le projet de loi organique comme le projet de loi ordinaire ont été déposés au Sénat le 9 septembre 2008, c'est-à-dire quelques mois après la révision constitutionnelle.
M. Yung parle également d’improvisation. Un tel reproche me paraît tout aussi infondé : les dispositions que contient ce texte découlent aussi des travaux du comité Balladur. Je ne fais pas du tout la même lecture que M. Yung du rapport de ce comité, et sans doute ne suis-je pas la seule : il n’a jamais été question de créer un super-Médiateur de la République ; c’est bien d’un Défenseur des droits qu’il s’est toujours agi. C’est écrit en toutes lettres dans ce document ; il n’est que de le relire.
Des remarques sur le périmètre de l’institution ont été formulées. MM. Peyronnet, Masson, About, Michel, Colin et Yung l’ont évoqué, mais je constate leur désaccord sur le sujet. Si certains regrettent que ce périmètre ne soit pas étendu à certaines institutions, en particulier au Contrôleur général des lieux de privation de liberté, d’autres, en revanche, déplorent que la HALDE ou le Défenseur des enfants y soient inclus. Il s’agit là de contradictions tout à fait légitimes, qui reflètent des divergences d’appréciation. J’apporterai néanmoins un certain nombre de précisions à cet égard.
Le périmètre qui a été déterminé n’est pas définitivement figé, notamment en ce qui concerne le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, pour lequel la question peut se poser de façon très opportune. Toutefois, et cela été fort justement souligné, dans la mesure où il s’agit d’une institution très récente, il semble plus pertinent de lui laisser le temps de s’installer et de prendre toute son ampleur avant d’envisager de l’intégrer dans une autre.
Par ailleurs, certaines des missions qui lui sont confiées ne sont pas relatives à l’exercice direct des droits et des libertés. Pour lire systématiquement toutes les remarques, suggestions ou critiques émises par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté – j’y réponds d’ailleurs point par point –, je sais que, si certains problèmes touchent aux libertés ou aux droits des individus, d’autres portent sur les aménagements de lieux ou sur des questions de fonctionnement.
Je dois reconnaître que, dans l’ambitieux travail d’amélioration des lieux de privation de liberté que nous avons engagé avec beaucoup de détermination, à travers notamment le plan de construction immobilière, mais également les aménagements que j’entreprends, en particulier pour prendre en compte certains choix qui ont été faits dans le cadre de la loi pénitentiaire, ce sont là des apports tout à fait considérables et précieux.
Dès lors que nous aurons réussi, en particulier grâce aux suggestions du Contrôleur général, à répondre aux problèmes d’ordre pratique qui se posent aujourd'hui dans les lieux de privation de liberté, nous pourrons centrer beaucoup plus que ce n’est actuellement le cas notre action sur le contrôle des droits et des libertés des personnes détenues. Si la situation évolue comme je le pressens, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté aura donc très logiquement vocation à être, lui aussi, intégré dans le périmètre du Défenseur des droits.
Dans d’autres domaines, ce sont des raisons techniques qui rendent pour le moment une telle intégration inenvisageable.
À cet égard, plusieurs d’entre vous ont évoqué la CADA. Force est de constater que les missions qui lui sont dévolues ne correspondent pas à la définition du rôle d’un Défenseur des droits. La CADA s’est notamment vu confier une mission de régulation en matière d’utilisation des informations publiques, à caractère économique en particulier. À l’évidence, cela n’a pas de rapport direct avec le sujet qui nous occupe aujourd'hui.
Peut-être faudra-t-il réfléchir par la suite sur l’opportunité d’opérer un rapprochement entre la CADA et la CNIL, comme cela a pu être suggéré, ou de transférer une partie de ses missions au Défenseur des droits.
En tout état de cause, de par la nature même de la CADA, son intégration ne serait pas conforme à la logique qui a présidé à la création du Défenseur des droits.
Je tiens maintenant à m’inscrire en faux contre les critiques formulées sur la façon dont le périmètre a été élaboré. D’aucuns ont prétendu que certaines des personnalités qui se trouvent à la tête des autorités indépendantes n’auraient pas été associées à la réflexion. Or j’ai personnellement reçu à plusieurs reprises le Défenseur des enfants, Mme Versini, et ce presque aussitôt après mon arrivée au ministère. Je lui ai proposé d’être associée, avec ses collaborateurs, à la rédaction et à l’amélioration du texte. Elle a ainsi participé à des réunions qui ont eu lieu à la Chancellerie. Il est donc pour le moins curieux d’affirmer aujourd'hui qu’il n’en a rien été !
Je signale d’ailleurs que, entre autres préoccupations, Mme Versini a fait valoir qu’elle souhaitait que l’intégration éventuelle du Défenseur des enfants ne soit pas effective avant le mois de novembre prochain, au cours duquel se tiendra une réunion internationale, voire avant la fin de son mandat. Autrement dit, il ne s’agissait aucunement d’une contestation sur le fond. Il fallait que cela fût dit !