Le projet de loi prévoit également de faciliter l'accès à la validation des acquis de l'expérience (VAE). Celle-ci constitue une troisième voie d'obtention d'un diplôme, d'un titre ou d'une certification professionnelle, aux côtés de la formation initiale et de la formation continue. Elle s'est progressivement ouverte à un large ensemble d'activités pouvant être prises en compte pour la validation des acquis : activité salariée, non salariée, bénévole, mandat syndical ou électif local, etc. La validation, prononcée par un jury, requiert une durée minimale d'activité d'un an, exercée de façon continue ou non.
Toute personne dont la candidature a été déclarée recevable peut bénéficier d'un accompagnement dans la préparation de son dossier et de son entretien avec le jury. Le parcours de VAE peut être financé par plusieurs acteurs : les régions, Pôle emploi, l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph), l'employeur, ou l'actif lui-même, par son compte personnel de formation (CPF).
Le nombre de personnes s'engageant dans une démarche de VAE diminue depuis plusieurs années. Le nombre de candidats diminue également à chaque étape du parcours : entre le dépôt du dossier et son examen par un jury puis entre le passage devant le jury et l'obtention de la certification. Le taux d'obtention d'une certification complète des candidats ayant déposé un dossier s'est élevé à 39 % en 2019 puis à 43 % en 2020. Ce faible recours au dispositif, qui diminue même ces dernières années, s'explique par la complexité du parcours de VAE. La VAE est méconnue, peu valorisée et bénéficie très majoritairement à des personnes en emploi.
L'article 4 avait pour objet, dans sa version initiale, de rendre éligibles à la VAE les compétences acquises par les proches aidants et les aidants familiaux. Il prévoyait aussi de pouvoir comptabiliser, au titre de la durée minimale d'expérience requise, les périodes de mise en situation en milieu professionnel, de renforcer l'accompagnement des candidats dès la constitution de leur dossier et de donner la possibilité aux associations de transition professionnelle de financer les dépenses afférentes. Lors de la discussion à l'Assemblée nationale, cet article a été complété à l'initiative du Gouvernement afin d'instituer un service public de la VAE, dont la mission est d'orienter et d'accompagner tout demandeur. Il crée un groupement d'intérêt public (GIP) chargé de mettre en oeuvre au niveau national le service public de la VAE. Ce GIP doit contribuer à l'information des personnes et à leur orientation dans leur parcours, à la promotion de la VAE ainsi qu'à l'animation et à la cohérence des pratiques sur le territoire.
L'État, les régions, Pôle emploi, l'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), les opérateurs de compétences (Opco) et les associations de transition professionnelle (AT-Pro) seront membres de droit du GIP. Ces dispositions doivent permettre d'instituer un guichet unique et numérique pour les démarches des candidats à la VAE.
La reconnaissance de l'expérience est un puissant levier pour renforcer l'employabilité des personnes concernées, favoriser la progression et la diversification des carrières, répondre aux besoins du marché du travail.
Même si nous soutenons les mesures proposées, elles ne suffiront pas à assurer un réel développement de la VAE. Il appartiendra aux ministères certificateurs de déployer les moyens nécessaires au recrutement et à la mobilisation des jurys. L'objectif du Gouvernement d'atteindre 100 000 parcours de VAE par an est atteignable à condition que les acteurs de l'accompagnement soient soutenus, y compris financièrement, et que les démarches soient réellement simplifiées.
Dans la logique de la réforme engagée, nous vous proposerons de supprimer de la loi la liste des types d'activités et catégories de personnes éligibles à la VAE, afin de poser le principe selon lequel la VAE est ouverte à toute personne qui justifie d'une activité en rapport direct avec le contenu de la certification visée.
Une telle approche, qui s'exonère d'une logique catégorielle, serait plus conforme à l'évolution de la VAE unanimement souhaitée qui vise à en faciliter largement l'accès, à renforcer l'accompagnement des candidats et simplifier leurs démarches. Nous éviterons ainsi le risque d'exclure certaines personnes du dispositif alors que les compétences qu'elles auraient acquises pourraient leur permettre d'obtenir une certification.
Nous vous proposerons également de préciser les missions et la gouvernance du GIP : celui-ci devra tenir compte des besoins en qualifications selon les territoires. Notre amendement prévoit qu'il soit présidé par un président de conseil régional et qu'il comprenne, outre les membres de droit déjà prévus, France compétences et l'Agefiph.
Ce projet de loi sert également de véhicule à une sécurisation de la définition de l'électorat et de l'éligibilité aux élections professionnelles, rendue nécessaire et urgente par une décision du Conseil constitutionnel.
Sur le fondement des articles L. 2314-18 et L. 2314-19 du code du travail, la Cour de cassation juge de manière constante que ne peuvent ni exercer un mandat de représentation du personnel ni être électeurs à l'élection des représentants du personnel au comité social et économique (CSE) les salariés qui disposent d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d'être assimilés au chef d'entreprise et ceux qui représentent effectivement l'employeur devant les institutions représentatives du personnel.
Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel a jugé, le 19 novembre 2021, que l'article L. 2314-18 du code du travail, dans sa rédaction actuelle telle qu'interprétée par la Cour de cassation, portait une atteinte manifestement disproportionnée au principe de participation des travailleurs. Il l'a donc déclaré contraire à la Constitution et l'a abrogé avec effet au 31 octobre 2022.
Pour sécuriser juridiquement l'organisation des élections professionnelles prévues après cette date, l'article 3 rétablit l'article L. 2314-18 du code du travail à compter du 1er novembre. Afin d'en garantir une interprétation conforme à la Constitution par la Cour de cassation, il complète l'article L. 2314-19 relatif aux conditions d'éligibilité, en excluant explicitement les salariés déjà considérés comme non éligibles par la jurisprudence. Une distinction est ainsi introduite, s'agissant de ces salariés, entre électorat et éligibilité.
La rédaction proposée permettant de lever les difficultés juridiques, nous vous proposons donc d'adopter cet article sous réserve d'avancer la date de son entrée en vigueur au 31 octobre 2022, la date d'effet de la décision du Conseil constitutionnel.
Enfin, l'article 5 propose la ratification, sans modification, de vingt ordonnances portant mesures d'urgence en matière de droit du travail et d'emploi pour faire face à la crise sanitaire et à ses conséquences, ainsi que d'une ordonnance relative au recouvrement des contributions à la formation professionnelle.
La pratique de la ratification des ordonnances a enregistré un recul significatif au cours du quinquennat précédent, alors que 78 habilitations à légiférer par ordonnance ont été accordées en moyenne chaque année entre 2017 et 2022, contre une moyenne annuelle de 36 entre 2007 et 2012. La démarche engagée est donc suffisamment rare pour être soulignée.
Toutefois, nous nous interrogeons sur l'utilité de cet exercice qui aura essentiellement pour résultat de gonfler artificiellement des statistiques peu flatteuses. En effet, sur les 21 ordonnances qu'il est proposé de ratifier, 14 ne sont plus en vigueur et une quinzième - l'ordonnance du 2 mai 2020 adaptant temporairement les délais applicables pour la consultation et l'information du CSE afin de faire face à l'épidémie de covid-19 - a vu ses dispositions annulées par le Conseil d'État, qui a considéré qu'elles méconnaissaient le champ de l'habilitation donnée au Gouvernement par l'article 11 de la loi d'urgence du 23 mars 2020. Nous vous proposerons donc de limiter la liste de ratifications proposée aux six ordonnances dont les dispositions restent en vigueur.