Intervention de Pascale Gruny

Commission des affaires européennes — Réunion du 5 octobre 2022 à 13h35
Questions sociales travail santé — Travailleurs de plateformes - examen du rapport de la proposition de résolution européenne et de l'avis politique

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny, rapporteur :

La proposition de directive de la Commission européenne, publiée le 9 décembre 2021, concerne un sujet hautement d'actualité, en Europe et en France : les conditions de travail des travailleurs de plateformes.

Depuis plusieurs années, nous assistons à un essor impressionnant des plateformes en ligne, notamment celles de livraison et de mobilité. Parallèlement, les contentieux augmentent, et les « affaires » se multiplient : pas plus tard que la semaine dernière, la plateforme de livraison, Stuart, propriété du groupe La Poste, était jugée pour travail dissimulé et prêt de main-d'oeuvre illicite devant le tribunal correctionnel de Paris. La plateforme a fait l'objet d'une réquisition maximale de 375 000 euros d'amende, la procureure ayant conclu à « une dissimulation généralisée de l'emploi », considérant qu'un faisceau d'indices attestait l'existence d'un lien de subordination entre Stuart et les livreurs, pourtant sous statut d'autoentrepreneurs.

Cet exemple illustre parfaitement une des principales problématiques en jeu s'agissant des travailleurs de plateformes : la question du statut professionnel. Le développement de ces plateformes pose, en effet, la question du statut de ces travailleurs, au regard de la distinction fondamentale qu'opère le droit entre travail indépendant et travail salarié. Ces travailleurs de plateformes peuvent très souvent apparaître, en effet, comme des travailleurs indépendants « économiquement dépendants », ce qui interroge sur l'adéquation de leur statut d'emploi avec la réalité de leur situation.

C'est l'objet de la directive que propose la Commission européenne : qui entend qualifier correctement le statut d'emploi de ces travailleurs, et prévoit une présomption réfragable de salariat. L'autre volet, également essentiel, de cette directive vise à encadrer la gestion des algorithmes utilisés par les plateformes, non seulement pour réguler l'offre et la demande, mais également pour organiser les conditions de travail de ces travailleurs.

Sur ce sujet, la Commission européenne, tout comme chaque législateur national, est face à une équation complexe : encadrer juridiquement un modèle économique innovant - et répondant à une demande certaine -, sans en freiner le développement. Plusieurs de nos collègues ici même, au sein de la commission des affaires sociales et dans le cadre de missions d'information temporaires, se sont penchés sur cette question. Au Sénat, depuis 2019, la question du statut des travailleurs de plateformes a ainsi fait l'objet de cinq propositions de loi et de deux missions d'information.

Pour notre part, nous nous sommes efforcés de faire un état des lieux de la question à l'échelle de l'Union européenne et d'analyser les apports et les lacunes de la proposition de directive.

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