Intervention de Pascale Gruny

Commission des affaires européennes — Réunion du 5 octobre 2022 à 13h35
Questions sociales travail santé — Travailleurs de plateformes - examen du rapport de la proposition de résolution européenne et de l'avis politique

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny, rapporteur :

C'est dans ce contexte que la Commission a publié son texte en décembre dernier. Il a 4 objectifs principaux :

Le premier consiste à qualifier correctement le statut professionnel des travailleurs de plateforme en posant le principe d'une présomption réfragable de salariat.

La proposition de directive fournit ainsi une liste de cinq critères permettant de déterminer si la plateforme est un « employeur ». Si elle remplit au moins deux de ces cinq critères, elle est juridiquement présumée être un employeur. Il s'agit ainsi d'analyser si :

(critère a) la plateforme détermine le niveau de rémunération du travailleur ou son plafond ;

(critère b) la plateforme exige du travailleur qu'il respecte des règles impératives spécifiques en matière d'apparence, de conduite à l'égard du destinataire du service ou d'exécution du travail ;

(critère c) la plateforme supervise l'exécution du travail ou vérifie la qualité des résultats de celui-ci ;

(critère d) la plateforme limite, notamment au moyen de sanctions, la liberté du travailleur d'organiser son travail, en particulier sa liberté de choisir ses horaires de travail ou ses périodes d'absence, d'accepter ou de refuser des tâches ou de faire appel à des sous-traitants ou à des remplaçants ;

(critère e) la plateforme limite la possibilité pour le travailleur de se constituer une clientèle ou d'effectuer un travail pour un tiers.

Le texte prévoit également la possibilité de renverser la présomption de salariat, en prouvant que la relation contractuelle n'est pas une relation de salariat, un regard non pas de ces critères mais de la jurisprudence ou de la législation nationale.

Le deuxième objectif essentiel du texte est l'amélioration de la transparence, des droits des travailleurs et de la responsabilité des plateformes concernant la gestion algorithmique. Il impose ainsi aux plateformes de communiquer aux travailleurs des informations concernant le fonctionnement de leurs algorithmes, qui devront également faire l'objet d'une évaluation « humaine ». Par ailleurs, les travailleurs de plateformes auront le droit de contester des décisions automatisées.

Troisième objectif de la directive : l'amélioration du respect de la réglementation et la traçabilité du travail via une plateforme, y compris dans les situations transfrontières. Les plateformes devront ainsi déclarer le travail dans le pays où il est effectué et fournir aux autorités nationales des informations sur leurs conditions générales et sur les personnes qui travaillent par leur intermédiaire.

Quatrième et dernier objectif : le renforcement de la négociation collective et du dialogue social, rapporteur. La proposition de directive impose à la plateforme d'informer et de consulter les travailleurs des plateformes et leurs représentants sur les décisions de gestion algorithmique. Par ailleurs, elle demande aux plateformes de faciliter la mise en place de canaux de communication permettant aux personnes qui travaillent par leur intermédiaire de s'organiser et d'être contactées par les représentants des travailleurs.

Ce texte plutôt ambitieux de la Commission, notamment s'agissant du mécanisme de présomption de salariat, a suscité de vives réactions, comme vous pouvez l'imaginez.

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