Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le réchauffement climatique et les crises énergétiques, sociales et géopolitiques nous obligent à accélérer le déploiement des énergies renouvelables, dont bien évidemment le photovoltaïque.
Nous privilégions sans ambiguïté le déploiement de celui-ci sur les toitures et les terres déjà artificialisées. Néanmoins, les études prospectives indiquent clairement que nous n’atteindrons pas les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie sans photovoltaïque au sol. Dans ce cadre, l’agrivoltaïsme semble pertinent si l’on veut concilier le développement des énergies renouvelables et la production agricole, à condition toutefois qu’il réponde à un certain nombre de critères auxquels il ne pourra déroger.
À l’heure où les projets se développent à grande vitesse dans les territoires, il devient urgent de mettre en place un cadre précis et une stratégie lisible pour les acteurs concernés ; ainsi, on accompagnera le déploiement régulé d’un agrivoltaïsme vertueux.
C’est pourquoi nous saluons l’objectif des auteurs de cette proposition de loi : fixer un cadre juridique et budgétaire à l’agrivoltaïsme.
Comme plusieurs de mes collègues l’ont souligné, nous devons être particulièrement vigilants sur quelques points majeurs, sur lesquels nous ne pouvons pas transiger si nous voulons cadrer au mieux cette filière naissante.
Le premier point de vigilance concerne le risque de spéculation foncière et, en corollaire, les problèmes de transmission qui peuvent en découler, dans un contexte où le prix des terres agricoles a doublé en vingt ans et où le renouvellement des générations agricoles s’impose comme un défi majeur de cette décennie.
Deuxième point de vigilance, nous devons veiller à ne pas laisser des conflits d’usage de la terre se développer ni laisser s’installer une concurrence potentiellement déloyale entre production alimentaire et production non alimentaire. L’agrivoltaïsme doit être un facteur d’amélioration de la production agricole principale, en synergie avec une production énergétique qui doit rester secondaire. En parallèle, le maintien ou l’amélioration des revenus agricoles doit être assuré.
De plus, il nous faut veiller à ce que ces installations respectent scrupuleusement les normes en matière d’urbanisme, de patrimoine et de paysages. L’avis conforme de la CDPENAF nous semble là aussi indispensable et apparaît comme un outil stratégique pour ajuster les projets en fonction des réalités des territoires et des besoins des agriculteurs.
Il faut enfin prendre en compte le risque d’artificialisation des terres. Les ancrages en béton, les clôtures, les lignes électriques enterrées et les voies d’accès peuvent affecter les sols ou perturber la faune et la flore. Il faut investir dans des installations matériellement réversibles ; nous saluons l’ajout effectué sur ce point, sur l’initiative du rapporteur. Toute implantation a forcément des impacts ; il s’agit de les limiter.
Pour répondre à ces problématiques, il est fondamental d’apporter au préalable une définition claire de l’agrivoltaïsme. Cette définition doit fournir toutes les garanties nécessaires à la protection de la biodiversité et au maintien de la vocation nourricière des terres et des services écosystémiques des sols.
Il convient, en ce sens, de distinguer le photovoltaïque au sol et l’agrivoltaïsme. Quand le premier a pour unique vocation la production d’énergie et peut contribuer à l’artificialisation des sols, le second devrait, selon la définition qui serait actée dans le code de l’énergie, apporter un service à une problématique agricole et in fine contribuer à une certaine résilience vis-à-vis du changement climatique, à l’heure où les agriculteurs sont les premiers touchés.
Si la définition proposée par le rapporteur nous paraît aller globalement dans le bon sens, nous défendrons toutefois un amendement visant à renforcer encore davantage les garde-fous, notamment sur le revenu agricole et sur la transmission des parcelles. La succession, comme je l’ai indiqué précédemment, nous semble en effet un enjeu fondamental.
Ce texte a le mérite de poser un cadre juridique et une orientation stratégique. Notre vote dépendra toutefois de l’adoption ou non d’un certain nombre de dispositions qui nous paraissent primordiales.