Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le temps de la forêt nous oblige à placer la réflexion sur une autre échelle que la nôtre et à sortir des schémas habituels. Ce soir, nous devons travailler en conscience de l’urgence du long terme, pour reprendre l’expression d’Étienne Klein.
La forêt doit s’adapter plus rapidement aux changements que le climat déréglé lui impose. Tant qu’elle évolue, elle est vivante. Sera-t-elle assez rapide pour lutter contre les maux qui l’attaquent ? Nous proposons, avec cette proposition de loi, d’amorcer une réflexion différente et d’apporter une première réponse, certes partielle, mais opérationnelle, à cet enjeu.
Mes premiers remerciements vont à notre collègue Anne-Catherine Loisier, dont l’expertise et les conseils avisés ont fortement contribué au calage de ce texte.
Je remercie aussi notre rapporteur et les membres de la commission des finances, dont je salue le vote très largement favorable à cette initiative.
Nous sommes tous d’accord : la forêt apporte des bienfaits inestimables à notre environnement.
Seules certaines de ses externalités positives sont visées dans l’exposé des motifs. Bien entendu, j’ai pensé à la captation du carbone, à la contribution à la préservation de notre biodiversité ou encore à l’amélioration de la qualité de l’eau via le filtrage naturel qu’assure la forêt.
Au-delà, la forêt est essentielle : lutte contre l’érosion des sols ou leur déstabilisation ; amélioration de la qualité de l’air ; effet positif produit sur notre santé physique et mentale.
Partant, agir efficacement pour accompagner la forêt devient une priorité pour notre pays. De ce chef, sa gestion durable est primordiale.
Nous avons eu de nombreux échanges avec des acteurs clefs de la forêt et de ses filières amont et aval. Pour ma part, j’en ai également eu en ma qualité de présidente des communes forestières de l’Aube. Ce qui ressort de ces entretiens, c’est la complexité à embrasser et à traiter le sujet : c’est logique à l’aune des multifonctionnalités de la forêt.
Ce texte est comme la première pierre de l’édifice qu’il nous faut bâtir ensemble : une première étape que nous avons choisi de cibler sur les forêts communales, parce que nous sommes ici, au Sénat, les représentants des territoires.
Un tel fléchage était important à plusieurs égards.
D’abord, parce que le manque de moyens de la plupart des communes rurales est un fait.
Ensuite, parce que nous avons voulu notre dispositif incitatif en ce qu’il pose comme prérequis le régime forestier, assurant la sanctuarisation des forêts publiques et permettant une gestion planifiée.
En outre, car je crois beaucoup à l’alliance public-privé dans des causes aussi justes que cet impératif de gestion durable. C’est important dans la société dans laquelle nous vivons et aspirons à nous définir.
Enfin, parce que c’est, pensons-nous, une attente de nos concitoyens. Les événements récents, notamment les feux de forêt, qui ont ravagé près de 65 000 hectares cet été, ont suscité, à juste titre, de vives émotions. Les citoyens s’engagent, veulent participer à l’amélioration de leur environnement. Ils le prouvent en faisant des dons à des associations. Autant qu’ils puissent le faire, plus directement, auprès de leurs communes forestières, syndicats et groupements forestiers. Qu’ils le fassent en faveur de leur forêt de résidence ou de cœur, contribuant ainsi au financement du rachat de parcelles, de replantations, d’aménagements d’accès, etc.
Les maires et acteurs auditionnés ont montré leur enthousiasme pour les mécanismes de dons par des personnes physiques et morales proposés aux articles 1er et 2 du texte. Certains nous ont confié qu’ils attendaient, de longue date, un tel dispositif. Preuve en est, s’il le fallait, de l’utilité de notre démarche.
Nous apportons un supplément de clarté juridique, afin de lever tout flou et de permettre une pleine application de la loi au bénéfice des forêts communales. Si nul n’est censé ignorer la loi, vous conviendrez avec moi que « ce qui se conçoit bien s’énonce clairement ». La loi doit être simple, précise et applicable. C’est le rôle qui nous échoit, à nous, législateurs.
D’autres points requièrent notre attention. Il en est ainsi de la démarche éviter-réduire-compenser, que l’on pourrait réordonnancer en compenser-éviter-réduire, car l’urgence le commande. Des travaux sont en cours à l’échelon européen. Nous devons prendre part à ce débat.
Chacun doit se sentir concerné et disposer de moyens d’action. C’est en tout cas la vision que nous partageons au sein du groupe Les Indépendants. Nous pensons l’écologie libérale, où les forces en présence dégagent des solutions de progrès, n’opposant pas environnement, société et économie. Nous souhaitons, par notre approche holistique, tracer le chemin d’un possible pour les générations suivantes.
Pour contribuer à cet équilibre de la forêt, nous vous invitons, mes chers collègues, à participer à l’examen des articles du texte lorsqu’il aura lieu. Nous sommes à l’orée d’un champ de travail immense qui reste à labourer pour offrir un cadre d’évolution plus résilient à notre forêt communale.