Intervention de Laurence Harribey

Commission des affaires européennes — Réunion du 20 octobre 2022 à 8h35
Questions sociales travail santé — Stratégie pharmaceutique pour l'europe - rapport d'information et avis politique de mmes pascale gruny et laurence harribey

Photo de Laurence HarribeyLaurence Harribey, rapporteure :

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, continuer à faire baisser les prix des médicaments anciens n'est pas de nature à en favoriser l'accès. La logique des États membres qui souhaitent diminuer le coût des médicaments pour limiter la dépense publique se comprend, mais la politique de recherche permanente du prix le plus bas fragilise le tissu industriel européen.

Ainsi, les marchés publics pour l'achat de gros volumes contribuent à raréfier l'offre de médicaments. En effet, le recours à des marchés publics pour l'approvisionnement en médicaments dont le brevet est tombé dans le domaine public ne favorise pas le maintien en activité des sites des producteurs concurrents qui n'obtiennent pas le marché. Le système des marchés publics génère, selon que le producteur devient titulaire du marché ou non, une hausse ou une chute brutale de sa production nécessitant une redéfinition des moyens industriels, ce qui n'est pas compatible avec un approvisionnement fluide et anticipé. En outre, les critères liés aux appels d'offres devraient désormais intégrer la sécurité des approvisionnements et de nouvelles normes écologiques, qui se traduiront nécessairement par une augmentation du prix.

Il existe d'autres moyens de diminuer le prix des médicaments. Ainsi la Commission européenne souhaite renforcer la coopération entre États membres pour la négociation du prix des médicaments. BeNeLuxA est une initiative conjointe associant la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, l'Autriche et l'Irlande dans le but de conduire des évaluations communes des technologies de la santé et de négocier en commun le prix de certains médicaments, notamment les plus innovants. Ces initiatives, quand elles sont volontaires, doivent être soutenues.

La deuxième piste consiste à poser les bases d'une solidarité européenne dans le domaine de la santé. La Commission devra réfléchir à un mécanisme de solidarité permettant la mise sur le marché de médicaments destinés à des besoins médicaux non satisfaits lorsque, malgré un prix juste et équitable proposé par le laboratoire, les ressources de l'État membre, évaluées notamment au regard de son PIB par habitant, paraissent insuffisantes pour en permettre l'achat. À cette fin, un fonds de solidarité européen pourrait être activé sous le contrôle de la Commission et des États membres pour financer une quote-part à déterminer du prix. Pour éviter tout effet d'aubaine, cette mesure devra naturellement s'accompagner d'un renforcement de l'encadrement des exportations parallèles.

Enfin, les médicaments génériques et biosimilaires jouent un rôle essentiel pour favoriser l'accès aux médicaments. Aujourd'hui, 40 % des médicaments consommés en France sont des génériques. Or les fabricants ont mentionné, lors de leur audition, des pratiques déloyales mises en oeuvre par les fabricants de princeps pour retarder l'accès aux marchés des médicaments génériques. Il appartient donc à la Commission de garantir une concurrence équitable sur le marché.

Voilà nos remarques et propositions à la suite de la publication par la Commission européenne de sa stratégie pharmaceutique pour l'Europe. Pascale Gruny le disait, notre objectif est de mettre le patient au coeur de cette stratégie pour permettre l'accès au médicament, sans parti pris dogmatique et sans prisme uniquement économique.

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