Intervention de Tatiana Marquez Uriarte

Commission des affaires économiques — Réunion du 13 octobre 2022 à 9h00
L'énergie : des enjeux stratégiques pour l'union européenne — Audition de Mm. Marc-Antoine Eyl-mazzega directeur du centre énergie et climat de l'institut français des relations internationales ifri thomas pellerin-carlin directeur du programme europe de l'institut de l'économie pour le climat i4ce mmes maría eugenia sanin maître de conférences en sciences économiques à université d'évry-val d'essonne et tatiana marquez uriarte membre du cabinet de la commissaire européenne à l'énergie

Tatiana Marquez Uriarte, membre du cabinet de la commissaire européenne à l'énergie Mme Kadri Simson :

Plusieurs d'entre vous ont parlé de nos relations avec les pays tiers, dont nous sommes très dépendants du point de vue énergétique, mais qui ont également des intérêts propres.

Nous avons adopté une communication au mois de mai sur nos relations internationales énergétiques dans laquelle la Commission européenne propose un système innovant. Jusqu'à maintenant, nous nous sommes bien souvent bornés à des relations de simple vente-achat avec les États producteurs de pétrole.

Nous avons longtemps acheté du gaz peu cher, par exemple à l'Algérie, où des mouvements se sont formés pour défendre les ressources naturelles et augmenter les prix. Certains pays ont en effet pu se sentir utilisés.

Nous proposons donc de diversifier nos approvisionnements. Étant entendu que nous ne disposons pas d'assez d'EnR ou de nucléaire pour remplacer le gaz que nous consommons, nous allons devoir remplacer le gaz russe par du gaz provenant d'autres pays.

Pour autant, le gaz ne figure pas dans nos objectifs de long terme et doit être une énergie de transition pour nous aider à équilibrer notre consommation. Au bout du compte, nous devons produire un maximum d'énergies renouvelables - et, pour les pays qui le souhaitent, de nucléaire - et développer l'hydrogène pour les installations qui ne peuvent pas être électrifiées - manufactures industrielles, certains types de transport...

Depuis six mois, nos relations avec les pays tiers dont nous achetons le gaz ont évolué et le discours qu'on leur tient est plus nuancé : si nous voulons actuellement leur acheter plus de gaz qu'auparavant, nous souhaitons aussi, à l'avenir, leur acheter de l'électricité et de l'hydrogène renouvelable qu'ils produiront grâce à nos technologies et à l'aide de nos entreprises sur place. Nous leur proposons des partenariats de très long terme et pas seulement le temps de décarboner notre production.

Nous avons commencé à signer des memoranda incluant des chapitres sur les EnR et l'hydrogène avec des pays tiers : Égypte, Israël, Azerbaïdjan... Nous sommes bien sûr conscients que nous ne devons pas substituer à nos dépendances actuelles des dépendances futures, par exemple à l'hydrogène. Nous devons commencer par développer la production d'hydrogène domestique. Mais, même en le faisant sur de très gros volumes - nous avons un objectif immense de 10 millions de tonnes produites en Europe -, ce ne sera pas suffisant pour les besoins futurs : nous aurons besoin d'au moins la même quantité venant de l'extérieur.

Il est donc nécessaire d'établir des partenariats stratégiques pour assurer la décarbonation de nos industries.

Sur la question de l'échelle de temps, je suis d'accord que nous avons trop tendance à mettre des petits patchs pour que notre production continue de fonctionner en évitant de prendre des décisions stratégiques qui peuvent être dures. La Commission européenne se veut un peu la conscience derrière les États membres pour les pousser à prendre des choix stratégiques, développer les EnR, aller vers l'efficacité énergétique, afin de devenir plus indépendants.

La mise en pratique de ces choix est difficile et demande de gros investissements, pas seulement publics, mais aussi privés. Le programme Next Generation EU constitue un gros levier de financement public pour les États membres. Les fonds alloués sont destinés à la transition énergétique ou à la lutte contre le changement climatique : production d'hydrogène ou d'EnR, rénovation des bâtiments... Mais il faudra nécessairement se tourner également vers des financements privés.

Par ailleurs, les personnes vulnérables le sont de plus en plus et doivent être aidées par les pouvoirs publics. Les prix actuels du gaz et de l'électricité tendent à étendre cette vulnérabilité aux populations moyennes. Nous avons changé le cadre législatif pour permettre temporairement à certains membres d'aider tous les foyers, mais aussi les petites et moyennes entreprises. Pour les grands consommateurs industriels, nous prenons des mesures pour plafonner le prix du gaz et tenter de limiter les revenus des producteurs inframarginaux d'électricité.

Je tiens également à rappeler que nous devons tous défendre les règles de la concurrence : tous les États n'ont pas la même capacité financière à aider leurs entreprises et ces règles doivent nous permettre de nous assurer que les effets sur la concurrence à l'intérieur de l'UE ne sont pas excessivement faussés par des aides publiques.

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