Intervention de Stéphanie Rist

Commission mixte paritaire — Réunion du 15 novembre 2022 à 18h55
Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023

Stéphanie Rist, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale :

Sans revenir sur les statistiques évoquées par la présidente Khattabi, il convient d'indiquer d'emblée qu'en dépit d'un travail important d'amélioration du texte effectué par le Sénat, nos points de divergence sont trop nombreux pour nous permettre d'espérer une issue conclusive à la commission mixte paritaire.

Parmi les points d'accord, je salue l'esprit de responsabilité qui a animé le Sénat lorsqu'il a rétabli les deux premières parties de la loi de financement - et cela, même si nous ne faisons pas la même analyse de l'article 1er. À défaut, la constitutionnalité du texte aurait été menacée.

D'autres points se sont traduits soit par des votes conformes, soit par des améliorations de la rédaction. Je pense notamment, s'agissant des recettes et de l'équilibre général, à la poursuite de la modernisation des offres de services à la personne, à l'affiliation des psychomotriciens à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse des professions libérales (Cipav) ou à l'affiliation des junior entreprises au régime général, tout en préservant leur modèle ; s'agissant des sujets liés à la santé, au prolongement des mesures pour faire face à la crise sanitaire, à l'extension du dépistage sans ordonnance des infections sexuellement transmissibles, à la plupart des mesures portant sur le financement des médicaments et des dispositifs médicaux - en particulier à l'élargissement du 100 % Santé aux prothèses capillaires - ou encore aux dispositions concernant la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).

Pour ce qui concerne la branche autonomie, nous sommes d'accord concernant le renforcement des astreintes et sanctions pouvant être prononcées contre les établissements qui ne respectent pas les règles du code de l'action sociale et des familles, sur la poursuite de la réforme du financement des services infirmiers à domicile, sur la plus grande flexibilité dont doivent disposer les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) dans la gestion de leur plan d'aide et sur l'indexation du tarif plancher des heures d'aide et d'accompagnement à domicile sur la majoration pour tierce personne. S'agissant de la branche vieillesse, je me réjouis que le Sénat partage avec nous l'ambition de favoriser l'exercice des professionnels de santé retraités dans les zones sous-denses, outil efficace pour lutter contre la désertification sanitaire. Quant à la branche famille, nous visons le même objectif de renforcer l'accès aux proches aidants pour les agents publics.

La lutte contre la fraude sociale doit nous rassembler, quelle que soit notre appartenance politique. Les débats au Sénat ont permis d'enrichir les articles en renforçant les outils, notamment l'obligation de verser sur un compte français les prestations sociales sous condition de résidence.

Nos convergences sont donc nombreuses, et ne se limitent pas à des modifications de forme. Malheureusement, il en est de même pour nos divergences.

D'abord, le Sénat a adopté, parfois contre l'avis de sa commission, des prélèvements supplémentaires que notre assemblée ne juge pas fondés et des exonérations qui vont plus loin que ce que nous souhaitons.

Il a également supprimé les transferts financiers entre la branche famille et la branche maladie, lesquels visaient à faire prendre en charge à la première une part du financement des indemnités journalières versées pendant le congé maternité et à rationaliser le financement de certaines indemnités eu égard à l'objectif visé. Cette suppression conduirait à creuser d'autant le déficit de la branche maladie et à réduire l'effort de cohérence budgétaire engagé par cet article.

Le Sénat a rejeté l'article - obligatoire - d'approbation de l'annexe B, au motif qu'il s'interrogeait sur les hypothèses macroéconomiques formulées. La forte incertitude qui préside à l'évolution de la situation économique n'a pourtant pas empêché le Haut Conseil des finances publiques de qualifier, dans son avis sur le projet de loi, de « crédible » la trajectoire pour 2022 et de « plausibles » les hypothèses d'inflation et d'évolution de la masse salariale pour 2023.

Nous avons également une divergence, dans la quatrième partie, sur l'amendement de réforme des retraites présenté par notre collègue René-Paul Savary. Si je partage le constat dressé par la majorité sénatoriale, le Gouvernement s'est engagé dans une concertation avec les partenaires sociaux pour déterminer les critères devant présider à une réforme. Je pense que le législateur doit attendre l'issue de ces discussions avant de s'engager en faveur de la préservation de notre système de retraite, auquel nous sommes tous attachés. J'espère que c'est un objectif sur lequel nous pourrons nous rejoindre.

Certaines dispositions concernant l'accès aux soins ont été supprimées : ainsi, l'extension de la permanence des soins ou l'expérimentation de l'accès direct aux infirmiers en pratique avancée, proposition formulée par le groupe de travail transpartisan créé au sein de notre commission. Je prends acte de la volonté des sénateurs d'examiner un texte sur l'organisation et le fonctionnement du système de santé ; je les invite donc à soutenir, le moment venu, les mesures que je présenterai dans le cadre d'une future proposition de loi sur les partages d'activité entre professionnels et l'accès direct.

Le Sénat a supprimé l'article 44, ce qui prive l'assurance maladie de la possibilité de récupérer des sommes importantes indûment versées par la collectivité.

Il est regrettable aussi que le Sénat ait supprimé l'article 37, relatif à la subrogation des indemnités journalières dues à l'occasion des congés de maternité, de paternité et d'adoption, alors même qu'une garantie de remboursement des entreprises dans un délai de sept jours était prévue et que l'objectif était de sécuriser les ressources des familles à un moment où elles sont financièrement vulnérables.

Dans ces conditions, il paraît difficile de trouver un accord permettant de surmonter nos divergences. Les rapporteurs de l'Assemblée nationale veilleront néanmoins à ce que les avancées apportées par le Sénat soient maintenues.

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