Intervention de Laurence Cohen

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 6 octobre 2022 : 1ère réunion
Audition de Mme Isabelle Lonvis-rome ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes de la diversité et de l'égalité des chances

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Les violences faites aux femmes sont un véritable fléau. En cinq ans, le mouvement historique #MeToo a permis une prise de conscience : ces violences sont enracinées dans le système patriarcal, mais concrètement, les choses ont peu évolué.

Je regardais hier soir un débat sur les questions des violences en entreprise et c'était assez terrible. Le témoignage d'une femme illustrait très bien ce qu'il s'y passe : elle explique le harcèlement dont elle est victime de la part du PDG d'une grosse entreprise, qui lui envoie jusqu'à plus de 100 SMS dans une journée. Elle hésite à le dénoncer parce qu'elle a un poste à très hautes responsabilités qu'elle ne veut pas perdre. Cette femme a perdu son emploi, est « blacklistée » partout, a dû recourir au RSA et, pire encore, attend son procès depuis huit ans !

L'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) est une association très combative qui accompagne les victimes de violences au travail. Elle réclame des amendes beaucoup plus dissuasives au niveau des entreprises quand ce ce genre de phénomène se produit.

Or quand j'ai interrogé la Première ministre, ex-ministre du travail, à ce sujet, elle m'a répondu que les amendes étaient suffisamment dissuasives et qu'il n'était pas question de les augmenter. Le sentiment d'impunité est justifié car on voit bien que les victimes ont la double, voire la triple peine : non seulement elles sont victimes d'un harceleur, et cela peut aller jusqu'au viol, mais en plus, elles perdent leur statut social et économique. J'aimerais connaître votre analyse sur ce sujet des violences en entreprise.

De manière plus générale, les plaintes pour violences sexuelles ont augmenté de 30 % en 2021. Mais seulement 10 % des victimes portent plainte, ce qui peut se comprendre puisque 80 % des plaintes sont classées sans suite, et 1 % seulement des plaintes pour viol aboutissent à une condamnation pénale. On voit bien qu'on est toujours dans une société de « culture du viol », ce que nous avons d'ailleurs dénoncé dans notre rapport sur la pornographie.

Comment peut-on améliorer le traitement des violences sexuelles, dans l'entreprise et de manière générale ? Je fais partie de celles et ceux qui pensent qu'il faudrait des tribunaux spécialisés. L'idée suscite la controverse mais je me réjouis qu'elle fasse l'objet d'une mission de parlementaires pour essayer d'y réfléchir. Quoi qu'il en soit, il faut absolument raccourcir ces délais : huit ans, dix ans pour avoir un jugement, ce n'est tout simplement pas possible.

Concernant votre budget, je salue la hausse des crédits mais s'agit-il toujours du plus petit budget de l'État ?

Pourriez-vous, en outre, nous préciser le montant de l'Aide financière à l'insertion sociale (AFIS), attribuée dans le cadre d'un parcours de sortie de la prostitution ? Il me semble qu'il s'élevait l'an dernier à 1,5 million d'euros, ce qui correspond à une allocation de 330 euros par mois. Y a-t-il une hausse de ces montants en 2022 ?

Enfin, restera-t-il quelque chose dans votre budget pour appliquer certaines des recommandations de notre rapport sur l'industrie de la pornographie ? Qu'il s'agisse de l'Éducation nationale, de la Justice, de la police, les services publics sont démunis.

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