Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis l’automne 2021, notre pays fait face à une inflation que nous n’avions pas connue depuis des décennies. À la faveur de la reprise de l’économie mondiale et en raison, depuis février 2022, de l’invasion de l’Ukraine, la vie chère met notre société à rude épreuve.
Disons-le sans détour : la situation est particulièrement difficile et l’enlisement du conflit nous place dans une situation de grande incertitude – les missiles tombés hier sur le sol polonais nous l’ont encore rappelé.
Oui, le contexte est sombre, mais notre choix est clair. Ce choix, c’est de lutter contre la vie chère pour protéger les Français et ce projet de loi de finances rectificative(PLFR) marque une nouvelle étape dans ce combat.
C’est un combat que nous continuerons à mener l’année prochaine, car l’inflation devrait demeurer à un niveau élevé. Mais nous devrons le mener de façon différente, je veux bien sûr parler d’une approche plus ciblée dans les soutiens que nous apporterons, car l’équation des finances publiques d’aujourd’hui ne ressemble pas à celle que nous connaissions durant cette parenthèse où l’argent – l’emprunt – semblait gratuit.
Ce projet de loi de finances rectificative, qui n’est pas seulement un texte de fin de gestion, s’inscrit dans la continuité du paquet pouvoir d’achat que vous avez voté et enrichi cet été. Je vous le dis clairement : c’est une continuité que je revendique.
Je la revendique, parce qu’elle constitue une réponse à l’urgence et nos compatriotes ne comprendraient pas qu’on les laisse démunis face aux prix qui augmentent.
Je la revendique aussi, parce qu’elle a produit des résultats : la France est le pays de la zone euro où l’inflation est la plus contenue.
Avant de vous présenter les grandes lignes de ce texte, il me semble utile de vous dire un mot sur la situation de l’économie française en cette fin d’année 2022.
Vous le savez, les prévisions adossées à ce deuxième projet de loi de finances rectificative font état d’une croissance de 2, 7 % cette année, un chiffre jugé crédible par le Haut Conseil des finances publiques.
Pour ma part, au-delà des prévisions, ce qui m’intéresse, c’est de savoir si nous mettons tout en œuvre pour atteindre notre objectif. Il est évidemment trop tôt pour dire avec une absolue certitude si nous y parviendrons, mais ce qui me semble incontestable, c’est que le texte que nous vous présentons aujourd’hui intensifie notre combat contre la vie chère et qu’il permettra donc à l’économie française de mieux tenir le choc.
C’est vrai, les nuages s’amoncellent : le conflit ukrainien, la crise immobilière en Chine, l’Inflation Reduction Act américain qui constitue une forme de dumping et qui fait par conséquent peser des risques sur l’économie européenne, en particulier sur notre industrie, les aléas sur la zone euro liés aux choix que fera l’Italie pour la trajectoire de ses finances publiques, etc.
Mais ce que je peux vous dire, c’est que notre économie résiste admirablement en cette fin d’année 2022. Il ne s’agit pas de dire que tout va bien ou de verser dans l’autosatisfaction, mais simplement de savoir distinguer les signes encourageants malgré l’incertitude.
La réalité, c’est que nous sommes au cœur de la tempête, mais que cette tempête ne nous emportera pas. Non, elle ne nous emportera pas, car nous pouvons compter sur des fondamentaux solides.
Je souhaite à cet égard rendre hommage à ces millions de Françaises et de Français qui se lèvent chaque matin pour créer de la richesse par leur travail, leur courage, leur audace et leur intelligence. Je pense en particulier à tous les chefs d’entreprise, à tous les élus et les maires de notre pays, qui tiennent bon malgré les aléas, les difficultés et la hausse des factures, à ces entrepreneurs qui continuent d’investir, d’inventer, d’embaucher. Bref, ce que je veux saluer, c’est cette France qui résiste et qui ne cède pas un pouce de terrain à la morosité.
Les derniers chiffres de l’Insee sont d’ailleurs encourageants : ils démontrent la résilience de notre économie.
La demande intérieure a continué de soutenir la croissance malgré une hausse des prix que nous n’avions pas connue depuis des décennies. L’investissement des entreprises a crû de 2, 3 % ce trimestre, tandis que la consommation des ménages s’est maintenue.
La situation de l’emploi constitue un autre indicateur positif, puisque les créations d’emplois sont restées dynamiques au troisième trimestre. Encore au mois de septembre, nous avons comptabilisé 60 000 chômeurs de moins.
S’agissant de ce qui nous attend pour ce quatrième trimestre, les signaux et indicateurs dont nous disposons sont plutôt favorables, qu’il s’agisse de l’activité, des intentions d’embauches ou de l’investissement des entreprises.
Bien entendu, le niveau élevé d’inflation suscite des inquiétudes du côté des ménages comme des chefs d’entreprise.
La hausse des prix a en effet rebondi à 6, 2 % en octobre après 5, 6 % en septembre. Pour autant, ce niveau reste cohérent avec la prévision adossée à ce deuxième PLFR, c’est-à-dire une inflation de 5, 3 % en moyenne annuelle, jugée elle aussi crédible par le Haut Conseil des finances publiques.
Ne nous voilons pas la face : nous avons l’inflation la moins élevée de toute la zone euro, mais la dynamique de hausse des prix fait encore des dégâts.
Le texte que nous vous présentons aujourd’hui permet d’assurer le financement de mesures qui vont changer le quotidien des Français, tout en procédant à un certain nombre d’ajustements dans une logique très classique de fin de gestion.
Comme le PLFR de juillet, ce texte traduit d’abord une volonté de soutenir et de protéger.
Pour ma part, il me semble qu’une large majorité peut se retrouver dans cet objectif. D’ailleurs, ce texte a été adopté par l’Assemblée nationale de manière classique, si je puis dire, c’est-à-dire sans application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, grâce au vote de la majorité présidentielle et à l’abstention constructive des groupes Les Républicains, Socialistes et apparentés et Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (Liot).
Ce qui vous est proposé aujourd’hui, c’est une rallonge de 2, 5 milliards d’euros.