Intervention de Christine Lavarde

Réunion du 17 novembre 2022 à 14h30
Loi de finances pour 2023 — Discussion générale, amendements 1662 8 1 2 6

Photo de Christine LavardeChristine Lavarde :

Oui, mais sans avoir à gérer une crise financière, monsieur le président…

Puis elles ont progressé de 118 milliards durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron.

Pour 2023, premier exercice du second quinquennat, nous en sommes à plus de 62 milliards pour les dépenses courantes hors dépenses liées à la crise – j’ai fait ce calcul à partir des chiffres annoncés le 26 septembre, sachant que d’autres dépenses se sont ajoutées depuis…

Aucune économie structurelle n’est réalisée, les dépenses ordinaires continuent de croître et le déficit va augmenter en 2023. Parallèlement, nous persistons à penser que votre prévision de croissance est trop optimiste, si bien que le déficit risque d’être encore plus élevé que ce que vous annoncez…

Vous nous dites que l’État protège, mais en fait il déverse des milliards financés par le déficit ! La dette publique représente aujourd’hui près de 42 000 euros par Français. Or ce que le consommateur gagne aujourd’hui sur son pouvoir d’achat – cinquante-deux occurrences de ce terme dans le rapport économique, social et financier ! –, le contribuable devra l’honorer demain avec la hausse rapide de la charge de la dette – ce terme, en revanche, n’est utilisé que neuf fois dans le même rapport…

Pourtant, l’enjeu de la dette ne peut être passé sous silence. De PLF en PLF, le groupe Les Républicains n’a cessé d’alerter les gouvernements successifs sur le risque de ne pas nous attaquer au mur de la dette, en particulier en cas de remontée des taux. Or nous sommes désormais, je suis au regret de le dire, face à ce mur.

De négatif en décembre 2021, le taux des obligations assimilables du Trésor (OAT) a dépassé les 3 % le 21 octobre dernier. De manière inquiétante, le PLF est construit sur une hypothèse de taux de 2, 6 % pour 2023. Pour mémoire, un point de taux d’intérêt en plus, c’est au bout de dix ans un coût de 40 milliards d’euros selon les données de la Banque de France, soit en ordre de grandeur le budget de la défense !

En 2027, la charge de la dette sera, à elle seule, supérieure au premier budget de l’État, l’enseignement scolaire. La charge de la dette est une dépense obligatoire ; sa croissance vient donc diminuer d’autant la capacité de l’État à investir dans des dépenses d’avenir – recherche, éducation, décarbonation…

Il n’existe qu’un seul bouclier – un terme à la mode… – pour protéger de cette hausse : la maîtrise de la dépense publique. C’est ce que nous vous avons proposé dans une version amendée de la loi de programmation des finances publiques. Dans votre copie initiale, le lent redressement des comptes publics reposait principalement sur les collectivités locales.

Alors, j’ai bien noté l’annonce faite par Bruno Le Maire : l’État serait prêt à prendre sa part, en acceptant une diminution de ses dépenses de 0, 5 % – il reste encore à définir l’assiette concernée…

Nous allons vous montrer, au cours de la discussion de ce PLF, que la trajectoire définie par le Sénat, que vous jugez irresponsable, trop contraignante en termes d’économies à réaliser, est atteignable.

Je constate que l’amendement n° I-1662 déposé par le Gouvernement sur l’article liminaire remet déjà en cause votre proposition initiale, monsieur le ministre. Vous prévoyez que le taux des prélèvements obligatoires va encore augmenter, alors même que Bruno Le Maire nous rappelait, voilà seulement quelques instants, que notre pays était le plus imposé fiscalement parmi les pays développés. De son côté, la dépense publique va augmenter de 8 milliards d’euros et ne baissera que de 1, 2 % contre 2, 6 % annoncés dans la loi de programmation des finances publiques.

L’année dernière, je vous faisais remarquer que les discussions à l’Assemblée nationale s’étaient déroulées au mépris du Parlement. En effet, le Gouvernement avait déposé 125 amendements en cours de lecture, qui ne tendaient pas à de simples corrections, mais constituaient des ajouts très importants, proposés au dernier moment et sans étude d’impact pour un montant total de 11, 8 milliards d’euros de dépenses supplémentaires.

Je suis au regret de vous dire que vous continuez cette année : taxation de la rente inframarginale, bouclier électricité et gaz, amortisseur, filet de sécurité pour les collectivités… Ce sont des sujets très sensibles, qui nécessitent un travail important d’expertise. Or nous n’avons ni temps, ni données, ni réponses à nos questions ! Tout porte à croire que le Gouvernement navigue à vue… Je reviendrai d’ailleurs sur certains de ces sujets pour montrer les limites de plusieurs propositions.

Mépris envers le Parlement, certes, mais aussi envers les collectivités locales au travers de fausses annonces. Les membres du Gouvernement se gargarisent tous du fameux programme 380, « Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires », aussi appelé fonds vert. Vous faites croire aux collectivités qu’elles pourront disposer de 2 milliards d’euros d’argent frais pour financer leur transition écologique. C’est faux ! Il s’agit uniquement d’un recyclage de crédits précédemment portés par le programme 362 de la mission « Plan de relance » ! Ces crédits viendront simplement compléter des politiques déjà portées par les programmes 113 et 181.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion