Intervention de Jean Pisani-Ferr

Commission des affaires européennes — Réunion du 16 novembre 2022 à 13h30
« ambitions européennes et chocs économiques actuels » — Audition de Mm. Jean Pisani-ferry professeur à sciences-po paris et à la hertie school of governance berlin senior fellow chez bruegel et titulaire de la chaire tommaso padoa-schioppa à l'institut universitaire européen florence xavier timbeau directeur principal de l'observatoire français des conjonctures économiques ofce charles wyplosz professeur honoraire à l'institut de hautes études internationales et du développement iheid à genève

Jean Pisani-Ferr :

y. - Je me concentrerai sur les questions relatives à la transition climatique.

La note que j'ai publiée et que vous avez évoquée a un caractère très préliminaire. Le travail n'est pas terminé mais il me semblait important de mettre certains éléments en débat dès à présent. Il s'agit notamment de faire valoir, comme mentionné par Charles Wyplosz, que nous pouvons éviter certains coûts de cette transition grâce à une approche économique. Ainsi, le coût à la tonne de carbone évitée est sept fois supérieur pour passer un logement de la classe énergétique C à la classe B qu'il ne l'est pour passer de la classe G à la classe B. La dispersion des coûts d'abattement est considérable. Les décisions publiques doivent connaître ces évaluations.

Les politiques climatiques ne sont pas crédibles, notamment du fait des engagements internationaux. Lorsque la France renonce par deux fois à la tarification du carbone et n'atteint pas ses objectifs de renouvelables pour 2020 - elle est le seul pays de l'Union européenne dans cette situation -, elle n'est pas crédible. Tenir l'objectif 2030, sachant que le nucléaire ne sera pas opérationnel à cette échéance, constitue un immense défi. Une politique qui n'est pas crédible suscite une attitude d'attente et n'est donc pas efficace.

Les économistes s'accordent sur la nécessité de donner du poids au bien-être des générations futures dans l'actualisation. Il y a une quinzaine d'années, certains estimaient que les techniques d'actualisation usuelles devaient être utilisées tandis que d'autres soutenaient la nécessité d'un taux d'actualisation bas. Le débat a progressé dans cette direction.

En ce qui concerne la croissance très modeste, le débat est fort entre Jean-Marc Jancovici, qui considère que notre productivité provient de l'énergie fossile et en dépend, et Philippe Aghion, qui estime que l'énergie fossile nous a détournés de techniques de production d'énergie renouvelable potentiellement plus efficaces qui offrent une possibilité de substitution. La chute du prix des batteries, du solaire et des éoliennes est impressionnante ; elle donne du crédit à cette vision.

Je ne crois pas que le contexte actuel offre l'opportunité de reprendre ce que nous avons laissé au marché. Nous avons cherché un équilibre différent entre initiative privée et cadrage public. Le capitalisme vert est une innovation nécessaire que nous devons canaliser et orienter pour investir dans le futur.

Les 2,5 points de PIB évoqués dans la note correspondent au montant total des investissements. Nous n'apportons pas encore de réponse sur la part publique dans ce total, mais elle se situe vraisemblablement entre 0,5 et 1 point.

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