La crise à laquelle l’agriculture doit actuellement faire face est très grave. Si le contexte ne change pas rapidement, elle pourrait être fatale aux agriculteurs dont la situation est déjà fragile. Ce n’est pas une crise de plus, c’est la fin d’un système, d’une PAC faite d’équilibres instables, de contradictions et de compromis sans issue entre ultralibéralisme et régulation.
Devant la gravité de la situation de trop nombreux agriculteurs, les responsables politiques, économiques et agricoles doivent agir de concert, dans la plus étroite complémentarité, car les difficultés doivent être traitées à différents niveaux, depuis celui de nos fermes jusqu’à ceux de l’État, de l’Union européenne et des différentes instances internationales, la mondialisation étant depuis longtemps déjà une réalité quotidienne pour les agriculteurs, qui ont placé la France dans le peloton des têtes des pays exportateurs de produits alimentaires.
Le présent projet de loi est porteur d’une grande ambition, monsieur le ministre, et je suis persuadé que ce texte marquera l’histoire de l’agriculture française comme l’ont fait la loi d’orientation agricole de 1960 et la loi complémentaire de 1962.
Tous les articles de ce projet de loi, dont je salue l’architecture, sont importants, singulièrement l’article 7, relatif aux interprofessions.
En effet, soutenir le principe de l’interprofession, c’est soutenir tous les acteurs de la filière agricole et alimentaire, mais également favoriser le consommateur et, surtout, répondre à une des principales attentes des agriculteurs.
Nous avons pu constater, ces dernières années, que sans interprofessions, les prix ne reflètent pas la réalité économique que connaissent les agriculteurs. Par exemple, depuis une vingtaine d’années, le prix d’achat de la viande bovine à l’éleveur a baissé de près de 10 %, alors que le prix payé par le consommateur a augmenté de plus de 50 % pendant la même période. Plus récemment, la hausse des cours des céréales et du lait a été répercutée immédiatement sur le prix des produits transformés. En revanche, quand ces cours ont ensuite nettement baissé, le consommateur n’a constaté aucune évolution des prix pratiqués par la grande distribution. La récente réunion qui s’est tenue à l’Élysée nous laisse présager que des changements allant dans le bon sens se profilent à cet égard.
Nous devons voir dans les interprofessions un véritable atout pour défendre l’agriculture, les agriculteurs, les consommateurs et les transformateurs, mais aussi pour faire face à la mondialisation, à l’inorganisation des marchés agricoles et surtout à la volatilité des cours. La seule loi du marché, dans le secteur agricole, montre très vite ses limites et ses dangers. Elle livre le consommateur et le producteur aux aléas d’un marché spéculatif, volatil et erratique. Finalement, tout laisser au bon vouloir de la grande distribution, désormais hyperconcentrée, ferait courir le risque de voir se répéter, dans la sphère agroalimentaire, des comportements analogues à ceux des financiers internationaux qui se sont servis abondamment, sans autre objectif ou justification que la rapacité, et ont fragilisé durablement l’ensemble des pays, aujourd’hui confrontés à une crise sans précédent.
L’article 7 nous offre un excellent outil pour conforter l’agriculture française et consolider son avenir, malgré un contexte national et européen contraint et une situation internationale très difficile. Je suis sûr que le monde agricole saisira l’occasion qui lui est offerte de reprendre en mains son avenir.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une organisation interprofessionnelle réussie permettra un partage équitable des marges entre producteurs, transformateurs et distributeurs, et donc des prix acceptables pour les producteurs et les consommateurs.