Intervention de Philippe Dominati

Réunion du 25 novembre 2022 à 10h30
Loi de finances pour 2023 — Compte d'affectation spéciale : contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Photo de Philippe DominatiPhilippe Dominati :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen du budget de la mission « Sécurités » pour 2023 s’inscrit dans un contexte qui pourrait appeler à la nouveauté : d’une part, il s’agit du premier budget du second quinquennat du président Emmanuel Macron ; d’autre part, c’est également le premier budget de mise en œuvre des annonces faites dans le cadre du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), en cours d’examen par le Parlement.

Pourtant, en examinant précisément le budget de la mission, on constate avant tout une forme de continuité.

Certes, il y a des changements positifs qu’il faut souligner. Globalement, les crédits de la mission sont ainsi en hausse et je m’en réjouis.

Le projet de Lopmi prévoit d’ailleurs une hausse cumulée du budget du ministère de l’intérieur de 15 milliards d’euros entre 2023 et 2027.

En 2023, pour ce qui concerne l’ensemble de la mission « Sécurités », la hausse des crédits s’élève à 1, 43 milliard d’euros en crédits de paiement, soit une hausse d’un peu moins de 7 %. Pour la police et la gendarmerie nationales, les crédits de paiement sont en hausse de 1, 34 milliard d’euros.

Pour les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », les dépenses hors titre 2 augmentent de 2, 1 % en autorisations d’engagement et de 10 % en crédits de paiement. En 2023, ces crédits sont en particulier dédiés à la modernisation numérique et à l’équipement de la gendarmerie et de la police nationales. C’est une dynamique nécessaire.

S’agissant du numérique, il est notamment prévu, d’une part, de développer les outils numériques des forces de sécurité intérieure afin d’améliorer leurs conditions de travail et favoriser leur présence et leur efficacité sur le terrain, d’autre part, de renforcer les moyens de lutte contre la cybercriminalité, en augmentant par exemple le nombre de « cyberpatrouilleurs », et d’améliorer la relation numérique avec les citoyens.

Par ailleurs, l’équipement des policiers et gendarmes fait également l’objet d’efforts pour assurer l’opérationnalité de nos forces et accompagner les hausses d’effectifs. Est notamment prévu en 2023 le renouvellement des équipements de protection, d’intervention et de maintien de l’ordre, de l’habillement et des outils technologiques de pointe. La tenue de la Coupe du monde de rugby en 2023 et la préparation des jeux Olympiques de 2024 justifient cet effort sur l’équipement de nos forces.

Pour autant, comme je le disais, le présent budget présente aussi des caractéristiques de continuité ; on pourrait même dire qu’il retombe dans certains travers constatés par le passé, ce que l’on peut regretter.

En premier lieu, on constate une stabilisation de la part des dépenses de personnel dans l’ensemble des dépenses de la police et de la gendarmerie en 2023. C’est une mauvaise nouvelle, d’autant qu’une dynamique de baisse avait été amorcée en 2021.

Comme je l’ai souvent rappelé, il est indispensable de réduire la part des dépenses de personnel dans l’ensemble du budget des deux forces, afin de dégager des marges de manœuvre suffisantes pour l’équipement et l’investissement.

Or il est souvent arrivé dans le passé que les dépenses de personnel dérapent au détriment de l’investissement et des autres dépenses de fonctionnement. En 2023, 83 % des autorisations d’engagement et 86 % des crédits de paiement seront consacrés aux dépenses de personnel pour les deux forces – c’est beaucoup.

Cette stabilisation de la part des dépenses de personnel s’explique par le fait que ces dernières augmentent de 5, 8 % pour les deux forces en 2023.

Cette hausse provient, d’abord, de la poursuite de la politique de recrutement. Comme vous le savez, le Président de la République a décidé la création de plus de 10 000 emplois de 2018 à 2022.

Alors que ce plan de création de postes était achevé, la Première ministre, Élisabeth Borne, a annoncé, le 6 septembre dernier, la création de 8 500 postes de policiers et de gendarmes d’ici à 2027, poursuivant ainsi sur la lancée du quinquennat précédent.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit la création de 2 857 postes équivalents temps plein (ETP) pour les deux forces, dont 1 907 pour la police nationale et 950 pour la gendarmerie nationale. Ces recrutements ont nécessairement des conséquences financières notables.

En outre, l’année 2023 sera également marquée par le coût lié à la revalorisation du point d’indice de la fonction publique intervenue au 1er juillet 2022, pour un coût d’environ 170 millions d’euros pour les deux forces.

Enfin, le poids des mesures catégorielles atteindra, en 2023, 85 millions d’euros pour la police nationale et 72 millions pour la gendarmerie nationale. Ce montant est en forte hausse du fait des premières conséquences budgétaires des deux protocoles conclus en mars 2022.

En second lieu, et c’est la deuxième limite du présent budget, les crédits de la mission sont insatisfaisants s’agissant de certaines dépenses de fonctionnement et d’investissement. Le risque est, comme cela est déjà arrivé par le passé, qu’à la sortie d’un plan d’équipement porté cette fois-ci par le plan de relance les dépenses d’investissement se tarissent, dans une sorte de stop and go difficilement soutenable.

En particulier, l’investissement dans l’immobilier ne répond pas à l’acuité des enjeux, surtout pour la gendarmerie nationale.

En effet, les crédits d’investissement portés par la mission pour les locaux de la gendarmerie, c’est-à-dire principalement les casernes, sont en baisse de 42, 5 millions d’euros en autorisations d’engagement. Ils n’augmentent que très modérément, de 13, 5 millions d’euros, en crédits de paiement.

Globalement, les crédits de paiement s’établissent ainsi à 130 millions d’euros en 2023, chiffre à comparer au montant des revalorisations catégorielles que je viens d’évoquer. Le caractère modeste de cette somme doit être souligné, d’autant qu’à compter de 2023 les crédits du plan de relance ne viennent plus apporter un complément significatif comme cela avait été le cas en 2021 et 2022.

Je rappelle que, s’agissant de l’immobilier, l’effort doit être maintenu sur la durée.

Je voudrais conclure par quelques mots sur le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » et sur la politique de sécurité routière.

En 2021, année encore marquée par les restrictions de déplacement dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire, la mortalité avait augmenté par rapport à 2020, 3 219 personnes ayant alors été tuées sur les routes de France.

Par rapport à 2019, cependant, année de référence avant la pandémie, la mortalité avait diminué de 9 % et l’accidentalité, de 4, 5 %.

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